A cette époque, les hommes ne s'occupaient pas plus des enfants de la maison que des poules ou des lapins. C'était le travail des femmes, et personne n'aurait osé faire le moindre projet pour un fils avant qu'il ait dépassé dix ou onze ans. Les croutes de lait, le croup, la rougeole, les diarrhées, le mal de ventre et toutes sortes de maladies ne manquaient pas pour vider les maisons souvent trop pleines.
"Je me demandais si, à force de vivre plus ailleurs qu'ici par la télévision, ils n'en oublieraient pas ce qui est à leur portée. A trop connaître ce qui se passe au bout de l'univers, ne risquaient-ils pas de délaisser pour des mirages ce regard sur les choses et les êtres qui les entourent, indispensable pour être heureux ? " p.222
" Je rentrai à Lignac, le coeur gros. Le regard de Gervais était encore en moi. Ses larmes brillantes comme des braises me brûlaient. Il fallait donc être sans coeur pour faire mon métier ! Mes jambes étaient lourdes. Je me disais que, plus tard, les hommes inventeraient une machine pour remplacer les facteurs, une machine froide distribuant les lettres et les destins d'une manière mécanique et insensible à la douleur qu'elle sèmerait autour d'elle." p.216
La mort n'est pas triste quand on a fini son ouvrage sur la terre.
Je me faisais du souci pour mes petits enfants.
Comment allaient ils vivre ? Connaitraient ils ses joies qu'apportent chaque saison, chaque jour ? Sauraient ils qu'il suffit de respirer l'air frais du matin, de voir s'envoler une perdrix devant soi, de découvrir la première violette à la fin du mois de février, pour retrouver sa bonne humeur ?
Je me demandais si à force de vivre plus ailleurs qu'ici par la télévision, ils n'en oublieraient pas ce qui est à leur portée. A trop connaitre ce qui se passe au bout de l'univers, ne risquaient ils pas de délaisser pour des mirages, ce regard sur les choses et les êtres qui les entourent, indispensables pour être heureux.
Quand nous avions bien mangé, nous allions au bordel. Je me sentais un peu honteux d’acheter du plaisir. Je comprenais mal qu’on puisse faire l’amour sans amour. Il me semblait qu’avec mon argent je salissais quelque chose d’unique au monde, qui ne pouvait s’acheter, un don de Dieu aux hommes, un bijou brillant que la moindre tache ternissait à jamais… Après de telles pensées, je me jurai de ne jamais retourner chez les filles, pourtant je suivais mes camarades à la première occasion. J’étais quelqu’un d’autre. L’habit militaire m’avait transformé.
Le bonheur ne se mérite pas par des actes, il vient et s'en va, c'est un don du ciel qu'il faut remercier quand on l'a et surtout ne pas se révolter quand il est passé.
La mort n’est pas triste quand on a fini son ouvrage sur la terre.
Le monde changeait. Mes collines se dépouillaient. On les assassinait : le tracteur roi ne respectait rien ; les arbres gênants étaient abattus... Tout changeait et je ne me reconnaissais plus dans ce monde nouveau, dans ces collines où à la place des chants, des appels, des aboiements des chiens autour d'un troupeau , je n'entendais plus que le bruit des moteurs. Tout allait trop vite pour moi.
Le Bon Dieu a mis dans la nature tout ce qu'il faut pour nous guérir ! Les hommes sont bêtes de ne pas savoir le trouver