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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Serge Bramly, en fin stratège, nous fera lanterner pendant un bon tiers du livre en nous faisant passer... et repasser, la silhouette de Duchamp devant les yeux, comme on agite un chiffon rouge, distillant les informations au compte-gouttes. Mais alors me direz-vous, que raconte l'auteur pendant tout ce temps où il nous fait languir ?
Il nous raconte en contre-champ le contexte historique, dans lequel évoluait l'artiste pendant ses trois semaines de transit forcées au Maroc, dans l'attente du bateau qui le mènera en Amérique... nous plaçant ainsi malicieusement dans la même position d'attente. Ah ! le farceur !
D'ailleurs n'y tenant plus, on va moissonner ailleurs, sur internet les renseignements qui tardent tant à venir, pour s'apercevoir en souriant que la narratrice du livre a eu la même démarche que nous. Car l'oeuvre de Duchamp «ne se laisse entrevoir que dans sa fréquentation, il faut la «contempler d'un oeil, de près, durant beaucoup plus d'une heure» pour déblayer le terrain et permettre à l'auteur de positionner sur l'échiquier les pièces qui vont nous entraîner dans un jeu de mise en abîme, aux multiples combinaisons.
Et quand on fait cette trouvaille : que l'un des personnages, historien d'art, s'appelle Tobie Vidal, que l'anagramme de Tobie = boite, et qu'associée à Vidal cela donne la boite vide, nous comprenons que l'auteur nous convie à entrer dans le jeu. Egratignant au passage la nombreuse littérature parfois discutable au sujet de l'artiste car «Personne ne vient à bout de Duchamp, parce que Duchamp c'est le silence et le vide, le vertige de l'infra-mince, l'absence et le gouffre. Il va vous obnubiler, ça deviendra votre idée fixe, votre névrose».
Pour ceux qui auraient la crainte de ne voir en ce livre qu'un «casse-tête», ce qu'il est au bon sens du terme pour les esprits espiègles et joueurs, des boites, il y en aura beaucoup d'autres à ouvrir et elles sont loin d'être vides, comme la boite à souvenirs de l'auteur dans laquelle est contenue toute sa tendresse.
J'ai pris un immense plaisir à lire ce livre. J'ai appris beaucoup de choses et pas seulement celles que j'étais venues chercher. Mais la plus grande réussite de l'auteur est de nous inciter à découvrir sans complexe l'oeuvre d'un artiste qui a influencé et révolutionné les pratiques artistiques en faisant basculer l'art moderne vers l'art contemporain.
«L'art, et surtout l'art contemporain n'est pas dans ce que l'on voit, la toile accrochée au mur, l'objet trônant sur son socle. Il n'est pas purement rétinien. Il doit aussi intéresser la matière grise, notre appétit de compréhension. le plaisir ne vient qu'en partie des couleurs et des formes. Duchamp disait: l'art est d'abord dans la lacune.»
Serge Bramly aura la générosité à la fin du livre de nous donner les clés de l'Eden, mais pas toutes, à nous de trouver celle du Paradis. «Il estimait en avoir assez dit pour que nous complétions sa pensée à notre guise, quitte à ce que nous la déformions ou nous en écartions, avec toutes les boursouflures, tous les enrichissements et les appauvrissements que cela suppose, c'est tout à fait dans son esprit.»
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Avis rédigé par Emily


« Première sélection pour le GoncourtPrintemps barbare, Hector Tobar »
Orchidée fixe, Serge Bramly
8 Septembre 2012 par Emily
A mi-chemin entre le roman et la biographie, Orchidée fixe revient sur l'interlude marocain de la vie de Marcel Duchamp, célèbre pour ses oeuvres d'art insolites et parfois hermétiques, car difficiles d'interprétation. Orchidée fixe a été récemment annoncé dans la liste des Goncourables. Raison de plus pour se plonger dans cette belle histoire, même si l'oeuvre de Marcel Duchamp vous est inconnue.



Orchidée fixe est le récit de la rencontre d'une famille de Tel-Aviv d'origine française et d'un Américain féru d'art. Autrefois, en 1942, le patriarche de la famille a côtoyé l'artiste Marcel Duchamp, lorsque celui-ci a quitté la France occupée pour les États-Unis, en passant par le Maroc, car les liaisons vers l'Amérique étaient alors coupées en France. S'entrelacent alors le récit du grand-père d'un passé désormais lointain mais pourtant tellement proche et un présent où la passion de l'art réunit la narratrice et le professeur américain venu interroger son grand-père.

Il n'est pas aisé d'écrire sur ce très beau texte où le lecteur est davantage touché par des impressions et des scènes que par l'histoire à proprement dite. La force d'évocation du récit rend chaque mot beaucoup plus réel, et des paysages entiers surgissent dans l'esprit du lecteur, qui a l'impression de voir la côte marocaine telle que la voit Duchamp en arrivant à Casablanca ou encore les parties de cartes endiablées de l'arrière-grand-père Zafrani. Ces souvenirs sont certes romancés, mais ils ont pourtant un poids tangible, et une réalité très visuelle. L'on est alors immergé dans le Casablanca des années 40, avec tous les enjeux que cela entraîne : la guerre semble pourtant bien lointaine, vue du Maroc, mais ne peut être oubliée.

Servie par une écriture toute en subtilité et en puissance, l'histoire de Marcel Duchamp et son amitié avec René Zafrani n'est pas très romanesque et on ne croule pas sous les scènes d'action. Cet intermède marocain imaginé est surtout une rencontre, une amitié. Orchidée fixe se lit pour la beauté du texte, et non pour le romanesque. L'estime que porte l'auteur à Marcel Duchamp est touchante et donne envie au lecteur de découvrir l'oeuvre d'un homme qu'il a cru apprendre à connaître au fil du récit.

Récit solaire, Orchidée fixe est probablement la lecture idéale en ce début de mois de septembre, afin de se transporter en pensée à Tel-Aviv, aux États-Unis et au Maroc. En somme, les vacances ne sont pas tout à fait terminées !
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Serge Bramly a reçu le prix Interallié 2008 pour «Le Premier Principe, le Second Principe».
Il a une écriture agréable, plaisante à lire (ça se dit ça d'une écriture ? bon, ben moi je le dis). Il écrit bien quoi. Donc si il écrit bien ben y'a des chances que le lecteur lise bien aussi, prenne de plaisir à lire.
Ce dernier roman est une parenthèse.
Il fait partie de la première liste des ouvrages sélectionnés pour le prix Goncourt 2012.
Le titre «Orchidée fixe» est un calembour emprunté aux notes de l'artiste.
« J'ai commencé ce livre il y a un peu plus de vingt ans. Je l'ai abandonné et l'ai repris à plusieurs reprises. L'idée d'écrire quelque chose sur Marcel Duchamp m'obsédait mais je n'ai pas su pendant longtemps quelle forme cela devait prendre.»
Marcel Duchamp (oui c'est bien de lui qu'il s'agit, le célèbre Marcel Duchamp, oui celui qui a exposé le fameux urinoir, oui mais pas que…) va passer un peu moins de trois semaines, en 1942, à Casablanca.
Une parenthèse entre Paris et l'Amérique.

Avis rédigé par Cripure
Il a cinquante-cinq ans. Encore inconnu en Europe, déjà célèbre en Amérique.
C'est Nina qui écrit.
Un récit dans le récit.
Son grand-père et son arrière-grand-père ont connu Marcel Duchamp.
C'est le grand-père qui raconte.
C'est Nina qui écoute.
Le professeur américian Tobie Vidal veut écrire une biographie «monumentale» de Marcel Duchamp.
C'est le grand-père qui raconte.
C'est Nina et Vidal qui écoutent.
Elle va écrire un roman. Il va écrire une biographie.
Peut-être aussi Nina et Tobie vont-ils s'aimer : à vous de lire !
«Il n'y a pas de hasard, il n'y a que des rendez-vous.» écrivait Eluard.
Le hasard cher aux surréalistes.
Marcel Duchamp est une légende.
Mystérieux, peu causant, joueur d'échecs passionné.
«Il aurait rendu son dernier souffle en lisant aux toilettes quelque loufoquerie d'Alphonse Allais
Il dort dans une baignoire.
«Il enfilait deux pantalons, deux chemises l'une sur l'autre, sa veste par-dessus, glissait des chaussettes de rechange dans une poche, la brosse à dents dans l'autre, auprès de l'échiquier pliant.»
L'artiste n'aimait pas s'encombrer de valise.
On se promène au bras et aux mots de l'espiègle Nina à Casablanca, à Tel-Aviv, dans le Colorado et c'est pas du tout désagréable, ma foi, ma foi de lecteur.
Aujourd'hui tout le monde se réclame de Marcel Duchamp.
Il n'en demandait pas tant…
Regardez son tableau intitulé «Nu descendant un escalier» : magnifique !
«L'art a le don de mettre au jour les ruines que chacun de nous porte en lui. Il creuse des strates profondes, remue des gravats, balaie la poussière qui voile le regard et relève des vestiges dont on se demande alors s'ils ne sont pas les bribes d'une existence hors du temps, déjà vécue ou que l'on s'apprête à vivre.»
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