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Quelle gifle que cette ascension reconstituée d'un moins que rien, mû par la foi en son importance et un féroce désir de revanche, de cet Arturo Ui, né dans les faubourgs de New-York, venu jusqu'à Chicago avec 7 comparses, autour d'un projet simple. Il ne s'agit de rien moins que menacer, effrayer, ruiner, pour venir après le chaos savamment orchestré proposer sa protection, moyennant finance et influence. Des méthodes mafieuses en somme.

Il est vrai que les hommes de main de Ui ne reculent devant rien et jouent du browning ou du seau de pétrole comme personne. Incendier des entrepôts, c'est bien pratique pour faire régner la terreur, le point de départ de leur action étant le cartel du chou-fleur. Assassiner les opposants les uns après les autres pour faire taire la conscience du peuple et accessoirement réviser les testaments (il faut bien alimenter la machine politique), c'est également utile pour faire son trou, d'abord à Chicago, puis à Cicero, ville voisine et lieu d'un test grandeur nature pour se projeter dans l'Amérique toute entière.

La justesse de l'observation et des rouages de la politique brutale des Nazis (ou autres sbires de l'extrême-droite) est confondante, d'autant plus qu'Arturo est un personnage complexe, en quête de reconnaissance donc sans doute humain, mais froid, prêt à passer sur tous les corps pour réaliser son ambition, y compris à se débarrasser de son plus ancien ami. Il veut s'imposer par la violence mais voudrait qu'on abonde dans son sens, qu'on le soutienne et encense. La manipulation est toujours en avant-scène, se nourrissant de la lâcheté physique ou de la peur sociale des hommes, qui cèdent et comptent sur d'autres pour lui résister.

Un mot en passant sur le titre, qui m'a toujours intriguée avant de l'avoir lu : cette "résistible" ascension - pourquoi résistible ? me demandais-je. J'avais l'impression d'une erreur, et non : elle est résistible parce qu'en plusieurs étapes il aurait pu être arrêté, empêché ou contré.
C'est glaçant et essentiel à lire, et je laisse libre toute personne de savourer la célèbre parole citée au début de la présentation : "Le ventre est encore fécond, d'où a surgi la bête immonde." Je crois qu'on s'en rend assez bien compte.
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Cette pièce... Ah cette pièce ! On m'avait pendant longtemps conseillé du Bertolt Brecht ! Alors cette lecture obligatoire à l'université tombait à pic et je n'ai pas été déçu ! Je la trouve malheureusement d'actualité à l'heure actuelle. Tout fonctionne à mon sens !
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Bertolt Brecht est un auteur allemand du XXe siècle. En 1941, Brecht écrit La Résistible Ascension d'Arturo Ui, une pièce de théâtre « pour expliquer au monde capitaliste l'ascension d'Adolf Hitler ». Cette pièce de théâtre se situe à Chicago où le trust du chou-fleur, et son dirigeant Clark, voit ses rendements diminués. Pour contrer la mauvaise situation dans laquelle se trouve Clark et ses associés, ils décident d'obtenir des subventions de la ville. le décor se met en place pour qu'ils atteignent leur objectif, notamment par la corruption. de nouveaux protagonistes entrent alors en scène : le gang d'Arturo Ui, qui tente de s'approprier le trust du chou-fleur. Pour cela, ils vont proposer au responsable politique de la ville une « protection » autour de ce commerce contre des violences créées de toutes pièces par Arturo Ui et ses hommes. le gang fait taire les personnes ayant des soupçons sur ces soi-disant violences, Ui prend des cours de discours pour faire entendre ses règles auprès des marchands de choux-fleurs. Son ambition ne va pas s'arrêter là et s'étendra sur les villes alentours.

Bertolt Brecht a construit sa pière sur le modèle du théâtre épique, qui a pour vocation à « éveiller la conscience » en disséquant « les mécanismes économiques et politiques qui ont permis l'ascension au pouvoir d'Hitler », notamment par la « critique du spectateur ». Brecht nous met en position d'« observateur-acteur », c'est-à-dire que nous allons devoir chercher nous-même le message dans le texte, et le comprendre. L'enjeu est d'éveiller notre conscience, pour nous amener à nous interroger sur nos propres agissements. Dans cette pièce, Arturo Ui est Adolf Hitler, Dogsborough, représentant de la ville de Chicago, est le président du Reich Hindenburg. Toute la pièce retrace l'ascension de Hitler au travers de la nouvelle identité des protagonistes et du décor. Par exemple, Arturo Ui prend des cours de gestuelles et de dictions, et à la fin de cette scène un panneau apparaît pour rappeler le parallèle avec les faits réels qui dit : « D'après la rumeur, Hitler prit des cours de déclamation et de noble maintien avec le comédien de province Basil », rien n'est dit mais tout est écrit, ainsi c'est nous qui créons le lien entre la scène qui vient de se produire et ce que le panneau dit.

En bref, cette pièce de théâtre, c'est du lourd. Intelligemment écrite et terriblement puissante.
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Pièce de théâtre qui a pour principal intérêt de montrer, par analogie et de façon simplifiée, comment Hitler est arrivé au pouvoir dans l'Allemagne des années 30. En revanche, la pièce est assez ennuyeuse, l'analogie avec les gangsters américains et leur main mise sur le commerce des légumes (qui rappelle ce qui s'est passé avec Al Capone et le lait) est malheureuse et peu intéressante. Il y a trop de personnages, qu'on a beaucoup de mal à identifier. Il faudrait voir la pièce jouée mais, sur le papier, elle parait ennuyeuse.

Deuxième lecture : j'ai un peu plus apprécier cette pièces qui décrypte les mécanismes de l'accession au pouvoir des dictateurs, encore d'actualité. Je passe à 4 étoiles.
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L'ascension d'Hitler transposée à Chicago dans les années 20 : dans cette pièce écrite en 1941, Arturo Ui, entouré de ses gangsters, impose sa protection sur les marchands de légumes de la ville. Des panneaux rappellent les parallèles historiques avec les différents chapitres de la construction du troisième Reich. Glaçant évidemment.
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Il y a de nombreuses années (1995) j'ai assisté à la représentation de cet oeuvre au théâtre de Chaillot. Arturo Ui était interprété par Guy Bedos. Honnêtement il me reste qu'un très vague souvenir de ce spectacle.
24 ans plus tard je suis amenée à lire l'ouvrage dans le cadre de la prochaine réunion du café littéraire auquel je suis inscrite.

S'inspirant de l'ascension d'Hitler au pouvoir en Allemagne, Brecht raconte une sorte de fable qui se déroule à Chicago.
Afin de racketter les marchands de légumes Arturo Ui cherche à s'immiscer dans le trust des choux fleur pour leur imposer une protection lourdement rémunérée contre de soi-disant violence.
Ayant appris que Hindsborough, responsable politique respecté, s'était laissé corrompre, Ui réussit à imposer son pouvoir sur le trust.
Dans la dernière scène Ui annonce qu'il va répondre "aux demande de protection" émanant de nombreuses villes des États-Unis.

Après chaque scène un panneau apparaît rappelant les événements historiques dont s'inspire l'auteur pour les écrire.

Cet oeuvre ne fut ni éditée ni jouée du vivant de l'auteur. Elle fut créé en 1958 à Stuttgart deux ans après sa mort.
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La célébrissime pièce de Brecht a, depuis sa création, été disséquée, pesée, analysée, commentée, critiquée tant et tant de fois… et le sera encore, et c'est tant mieux, par des gens plus avisés et plus talentueux que moi, que je ne vais pas courir le risque d'emprunter ce chemin semé de trop d'embûches.
Je me conterai donc de conseiller, voyons… aux quarante ans et plus, sa (re)-lecture, en guise d'indispensable piqûre de rappel, et aux lecteurs plus jeunes de se faire vacciner au plus vite… si ce n'est déjà fait.
Le génie de Brecht, et la lecture de son chef-d'oeuvre - La Résistible Ascension d'Arturo Ui - relèvent de la salubrité publique... surtout par les vilains temps que nous traversons.
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Une idée casse-gueule, sur laquelle je n'aurais pas misé un kopeck: parler de la résistible ascension d'Hitler par le biais d'une histoire de gangsters - il y a même des panneaux soulignant les parallélismes avec la montée du nazisme, ça devrait être lourdingue et too much non?
Et pourtant le mélange de la dimension tragédie politique, du « grand style » et du côté cabaret, farce du trust du chou-fleur, univers de gangsters hollywoodien, fonctionne en fait très bien. C'est drôle, c'est terrifiant, intelligent et très efficace d'un point de vue dramaturgique.
La référence historique n'a rien d'enfermant ici, au contraire, et La Résistible ascension d'Arturo Ui garde toute sa force et résonne aussi fort chez le lecteur ou spectateur d'aujourd'hui. Bien sûr, l'épilogue indique clairement que la dimension anti-fasciste de la pièce continue à nous concerner, ce qui a assuré à la phrase finale sa triste notoriété:
« Vous, apprenez à voir, plutôt que de rester
Les yeux ronds. Agissez au lieu de bavarder.
Voilà ce qui aurait pour un peu dominé le monde !
Les peuples en ont eu raison, mais il ne faut
Pas nous chanter victoire, il est encore trop tôt :
Le ventre est encore fécond d'où a surgi la bête immonde ! »
Mais les réflexions auxquelles nous pousse la pièce débordent largement le cadre du nazisme ou du fascisme: crise de la démocratie et pourrissement du capitalisme, élus manipulés par des hommes d'affaires, instrumentalisation nauséabonde du thème de l'insécurité, de la peur, importance de la com, de la manipulation par la politique-spectacle, passivité qui laisse mourir la vie démocratique...
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Quand j'étais jeune, les pièces de Bertold Brecht étaient très souvent jouées; ce n'est plus le cas, de nos jours. La résistible ascension d'Arturo Ui, écrite aux moments les plus sombres de la guerre mondiale (en 1941), n'est pas la plus célèbre de l'auteur. Mais j'y repense maintenant, après avoir lu "L'ordre du jour" (prix Goncourt 2017). La pièce de Brecht me semble particulièrement suggestive. Elle veut souligner que les chefs nazis avaient l'esprit et les méthodes des gangsters: ambition démesurée, agressivité, absence totale de scrupules, désir de domination, brutalité extrême… tout y est. C'est pourquoi je trouve géniale l'idée de transposer la folle aventure hitlérienne dans le milieu des truands américains. Ici, le "parrain" de Chicago ne s'appelle pas Al Capone, mais Ui. Mais les noms de ses protagonistes sont de déformations transparentes des sinistres Göring, Röhm, Goebbels, Hindenburg, etc… Si c'est une pièce à clé, cette clé n'est pas difficile à trouver ! Et la leçon qu'elle nous donne, sur le plan politique, n'est pas difficile à retenir. « Le ventre est encore fécond, d'où a surgi la bête immonde ». Cette caricature hideuse de Hitler et de tous ses acolytes nous interpelle, sans se présenter comme une oeuvre de propagande trop primaire.
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Une pièce remarquable qui interroge sur L Histoire. Un éclairage particulièrement saisissant sur l'ascension d'Hitler et les mécanismes totalitaires.

Le choix de l'aborder par le biais du théâtre apporte de la densité au propos. Cette lecture aborde une période historique précise mais on ne peut pas s'empêcher d'y voir des mécanismes à l'oeuvre dans nos sociétés d'aujourd'hui...A lire et à relire !
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