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Anna Brontë décrit la condition peu enviable de bien des femmes qui ne peuvent être que gouvernantes, situation sentimentale d'une sécheresse triste. La modestie, les bonnes manières, l'éducation sont mises en avant comme étant des valeurs fort protestantes. Enfin, l'innocence enfantine est ici bien vite réfutée : impossible d'y croire après.
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S'il existe un dénominateur commun aux romans écrits par des femmes de lettres anglaises entre la fin du XVIIIème siècle et le milieu du XIXème siècle - les fameuses périodes géorgienne et victorienne - c'est bien la qualité d'écriture. le style en est si caractéristique qu'on pourrait presque les croire tous issus de la même plume mais ce ne serait pas leur rendre justice car ils sont vraiment tous différents les uns des autres. Ce qui les différencie ainsi, c'est la subtile combinaison de la sensibilité et du talent de leurs auteurs.

Pour le cas très particulier de la fratrie Brontë, il existe un autre facteur de différenciation, c'est l'approche dramatique. Ainsi, si Charlotte et Emily ont respectivement donné dans le drame noir ("Jane Eyre") voire très noir ("Les Hauts de Hurle-Vent"), Anne, quant à elle, a préféré préserver son héroïne des pires "souffrances", lesquelles ne s'avéreront ni insurmontables ni de nature à dénaturer sa personnalité.

Et pourtant, la célèbre famille Brontë semble avoir eu le drame dans la peau !
Si nous nous penchons quelques instants sur la destinée de ses membres, nous constatons qu'aucun des enfants Brontë n'a fait de vieux os. Les aînées, Maria et Elizabeth, sont décédées avant l'adolescence, Charlotte n'a pas atteint la quarantaine, Branwell - le seul petit gars - a cassé sa pipe tout juste passé les trente ans, Emily l'a imité au même âge et quant à Anne, notre auteur, elle ne les aura jamais atteints !

Intéressons-nous de près à "Agnès Grey", un roman conçu comme le journal intime d'une gouvernante, fille de pasteur, placée dans différentes riches maisons, parvenues ou aristocratiques. Ses divers postes lui fournissent d'innombrables exemples de la piètre qualité des moeurs et des vertus des classes aisées de la société britannique de l'époque et, de ce fait, son récit est une source sociologique précieuse.

J'ai déjà mentionné en introduction que l'écriture était très belle et, en effet, on sent que l'auteur est bel et bien issue d'une famille de lettrés. Née la benjamine et ne souhaitant sans doute pas déroger à la tradition, Anne a donc pris la plume à son tour et s'est plu à témoigner de l'existence souvent rude et toujours ingrate des gouvernantes, de ces femmes qui sans faire partie de la classe des domestiques n'en étaient pas moins considérées comme des "gens de maison", c'est-à-dire que leur statut n'était pas digne d'intérêt pour la société qu'elles fréquentaient. Aujourd'hui, on dirait pour faire court qu'elles avaient "le cul entre deux chaises".

Anne Grey ayant elle-même exercé l'emploi de gouvernante, elle peut donc en parler avec justesse et précision. Son lecteur devient alors le spectateur privilégié du quotidien d'Agnès, son héroïne, malmenée par ses élèves, méprisée par ses employeurs, humiliée par le cercle de leurs familiers, etc. Même sans connaître sur le bout des doigts la biographie d'Anne Brontë, on peut facilement comprendre qu'une grande part du récit d'Agnès fait écho à sa propre expérience. Mais, rassurez-vous, notre auteur est une femme au coeur d'artichaut et les jours sombres d'Agnès pourraient bien finir par virer au rose...

Je n'ai pas été transportée par ma lecture. le tempérament d'Agnès, sa morale, sa bigoterie, ses choix, son impuissance et ses mines de chien battu m'ont souvent tapé sur le système et quoiqu'elle mette en lumière avec réalisme le quotidien des gouvernantes, l'attitude de notre héroïne m'a plutôt ennuyée. de plus, le récit n'est jamais illuminé par quelques notes d'humour ou par quelques considérations intellectuelles - éléments qui font toute la supériorité de Jane Austen, soit dit en passant.

Dans l'ensemble, le récit d'Agnès reste très prosaïque, moralisateur et mortifiant. Il n'en aurait pas fallu beaucoup plus pour transformer son journal en "évangile selon Agnès Grey" or, sans en espérer cinquante, quelques nuances auraient été appréciables...
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Anne est la moins connue des trois soeurs Brontë. Elle était la plus jeune, il s'en fallut de quelque mois qu'elle ne soit aussi la première à mourir. Elle ne connut guère sa mère, morte quand elle avait un an, ni ses deux soeurs ainées Maria et Elizabeth, morte quand elle en avait cinq. Elle ne connut pas non plus les internats où faillirent succomber les deux autres. Mais la tuberculose finit par faire son oeuvre également sur elle, alors qu'elle n'avait encore écrit que deux romans.

Agnès Grey' est le premier des deux. Très autobiographique, il raconte ses douloureuses expériences de (très) jeune gouvernante dans diverses familles de la bonne société anglaise. La fin heureuse en revanche, relève hélas de la fiction…

D'emblée, on constate que son style littéraire n'a strictement rien à envier à celui de ses deux soeurs. Elles sont passées par le même creuset. Des esprits fins, subtiles, délicats, brillants. Et, dans le cas de la pauvre Anne, ou Agnès comme elle a préféré se désigner, condamnée par la pauvreté à évoluer dans un milieu rustre et grossier. Malgré leur fortune, ses employeurs sont des brutes à peine patinées d'un verni de courtoisie. Tout le monde la tient pour quantité négligeable, y comprit les domestiques – qu'elle est pourtant la seule à considérer comme des êtres humains et pas des machines à servir.

Quand aux enfants dont elle s'occupe, on pourra constater qu'hier comme aujourd'hui l'absence d'éducation produit les mêmes résultats. Seul changement notable, les petites brutes modernes ne sont Dieu merci plus assez dégourdies pour dénicher les oisillons. S'ils l'étaient, ils leur arracheraient sans doute les ailes avec autant de plaisir.

S'y ajoute, bien sûr, une solide morale victorienne. Anne Brontë se fait visiblement une haute idée du métier d'éducateur, mais guère si différente d'aujourd'hui. Certaines leçons morales ont changées (une fille ne doit pas trainer avec les palefreniers et les piqueurs) d'autres sont toujours valables (ne pas épouser un homme uniquement pour son argent). La religion est son principale refuge et soutien moral – ce qu'on peut comprendre, pour quelqu'un qui a grandi au milieu des deuils.

On reconnait bien le talent des soeurs Brontë quand bien même le récit, plus autobiographique, voir cathartique, n'a pas la fulgurance des ‘Hauts de Hurlevent' ou la puissance de ‘Jane Eyre'.
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J'ai découvert Anne Brontë avec "Agnes Grey" et j'ai bien fait car c'est un livre magnifique.
J'adore le personnage d'Agnès Grey voulant aider sa famille en se proposant d'exercer le métier d'institutrice dans plusieurs familles.
Mais cela se révélera plus compliqué que ce qu'elle avait pu imaginer...
En effet, la première famille concernée, les Bloomfield, se montre très désagréable envers Agnès.
Ainsi elle est renvoyée après plusieurs mois de travail.
Malgré cela, Agnès veut continuer à donner des leçons et rentre finalement chez les Murray, plus polis mais tout aussi stupides que les Bloomfield.
Ici, elle croisera la personne de Mr. Weston, le nouveau pasteur du village qui s'avère être très généreux et aimable envers les plus pauvres comme Agnès...
J'aime beaucoup le style d'Anne et j'ai dévoré ce livre...
A lire pour Anne Brontë (qui est aussi douée que ses deux soeurs), et pour cette belle histoire d'amour) !
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La famille Grey se compose du père, curé (anglican), de la mère, et de deux filles dont Agnès, la cadette. le père fait de mauvaises affaires et se retrouve ruiné. L'aînée des filles se marie. Pour aider ses parents et ne pas leur être à charge, Agnès décide de se trouver une place de gouvernante, c'est-à-dire de préceptrice, alors qu'elle n'a aucune expérience et est encore elle-même très jeune. Par relations familiales, elle parvient à trouver cet emploi dans une famille de la riche bourgeoisie commerçante, mais il n'est pas certain qu'elle s'y épanouisse… ● On retrouve dans ce roman le beau style des soeurs d'Anne ou de Jane Austen, c'est très agréable à lire. Voici un exemple de bonheur d'écriture, qu'on trouve à foison : « j'aurais été assez à mon aise, si elle n'avait pris tant de peine pour m'y mettre. » ● C'est une dénonciation des moeurs des riches Anglais du XIXe siècle, de leur égoïsme, de leur fatuité, de leur goût des apparences, et même de leur méchanceté, voire de leur sadisme. ● La pauvre gouvernante a fort à faire avec les enfants : « si un homme civilisé était condamné à passer une douzaine d'années au milieu d'une race d'intraitables sauvages, à moins qu'il n'ait le pouvoir de les civiliser, je ne serais pas étonnée qu'à la fin de cette période il ne fut devenu quelque peu barbare lui-même. Ne pouvant donc rendre mes jeunes compagnons meilleurs, je redoutais fort qu'ils ne me rendissent pire, qu'ils n'amenassent peu à peu mes sentiments, mes habitudes, mes capacités, au niveau des leurs, sans me donner leur insouciance et leur joyeuse vivacité. » ● Mais elle a aussi beaucoup de mal avec les parents, qui la méprisent, la tiennent pour quantité négligeable, lui reprochent des défauts qu'ils inventent avec une mauvaise foi déconcertante, souhaitent qu'elle éduque leurs enfants sans lui donner aucun moyen de le faire, bien au contraire, puisqu'ils prennent toujours le parti des enfants contre celui de la gouvernante. ● On trouve de beaux portraits à charge, comme : « c'était l'oncle Robson, le frère de mistress Bloomfield ; un grand garçon plein de suffisance, aux cheveux noirs et au teint jaune comme sa soeur, avec un nez qui avait l'air de mépriser la terre, et de petits yeux gris fréquemment demi-fermés, avec un mélange de stupidité réelle et de dédain affecté pour tout ce qui l'environnait. » ● le roman a bien sûr des côtés moralisateurs et est dépourvu d'humour (contrairement à ceux de Jane Austen), et la narratrice, Agnès Grey elle-même, semble n'avoir aucun défaut. Les maximes raisonnables parsèment le récit : « on n'apprend rien sans travail et sans peine. » « Hélas ! combien l'espoir de posséder l'emporte quelquefois sur le plaisir de la possession ! » ● La richesse paraît être le plus sûr moyen de corruption de l'âme ; Agnès Grey est une véritable adepte des préceptes évangéliques tandis que tous ceux qui l'entourent, sauf sa famille, sont pénétrés d'un pharisaïsme odieux. ● L'intrigue est assez simple et linéaire, et même si on voit paraître la fin bien avant d'y être, elle n'est pas dépourvue de tension narrative faisant tourner les pages à bonne allure, mais le livre vaut surtout par son style, par son témoignage historique et, du moins à l'époque, par son contenu moral. ● J'ai trouvé fort intéressant de lire le premier roman de la moins connue des soeurs Brontë et je le recommande, d'autant qu'on peut le trouver en Kindle gratuit.
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Mes lectures d'autrices du XIXème siècle se suivent et ne se ressemblent pas... Après Jane Austen, me voici chez Anne Brontë, oui vous savez la benjamine de la fameuse fratrie.
L'univers littéraire des seules soeurs Brontë que je connaissais jusqu'à présent, - Charlotte et Emily, m'ont entrainé dans des territoires romanesques où se côtoient le sombre, le gothique, le morbide...
Anne Brontë est sans doute moins connue que ses deux autres soeurs, elle partage cependant deux points communs avec ses aînées : elle fut à son tour une femme de lettres et elle connut un destin tragique, la mort la fauchant elle aussi à la fleur de l'âge.
Agnès Grey est son premier roman. Il est pour une large part autobiographique, le roman étant fondé sur la propre expérience de l'autrice comme gouvernante et préceptrice.
Ici on est très éloigné de la dramaturgie noire qu'on peut rencontrer dans Jane Eyre ou encore dans Les Hauts de Hurlevent.
J'ai abordé ce roman avec l'attention qu'on porte lorsqu'on est autorisé à ouvrir un journal intime.
Agnes Grey est la fille du pasteur d'un village du nord de l'Angleterre, entouré de landes à perte de vue. Ses parents ayant subi un revers de fortune, Agnes Grey décide de les aider financièrement. Elle quitte le presbytère familial pour confier ses services à une riche famille aristocratique, les Bloomfield.
Elle va occuper l'un des rares emplois permis aux femmes respectables au début de l'ère victorienne : gouvernante d'enfants de riches. Dès les premiers jours, elle doit faire face non seulement à l'indiscipline d'enfants gâtés plus passionnés à chaparder les nids, à étrangler les oiseaux dans leurs si douces mains qu'à apprendre leurs leçons, mais aussi aux humiliations des parents qui prennent systématiquement la défense de leurs « adorables » petits chérubins.
Ah ! Ces sales gosses ! À sa place, moi je les aurais... Pardon, je m'emballe... Mais qui voudra encore croire après cela à l'innocence éperdue de l'enfance...
L'écriture, simple, fluide, certes très académique, est d'une très belle tenue.
Le roman vaut surtout pour la peinture, brossée par petites touches mais sans concession, de cette riche bourgeoisie terrienne de l'ère victorienne qui écrase la condition de femmes modestes, société dont les principes fondés sur le rang et l'argent se heurtent à toutes valeurs sociales et morales.
Ce roman avait tout pour égayer mes pensées, j'avais posé mes pas dans la douceur de la narratrice, dans la beauté de ses joues qui rosissent de confusion, son esprit oscillant entre volontarisme et résignation, mais le récit très conventionnel offre finalement peu de nuances d'Agnes Grey, de sorte que l'ennui est venu rapidement au gré de ma lecture.
Dieu aussi est venu s'en mêler, le bougre. Un des personnages a beau rétorquer à notre héroïne que « Dieu est amour », la belle affaire ! je vous avoue que j'ai une autre opinion de ce sentiment exalté...
J'étais pourtant tout émoustillé lorsque j'ai lu cette citation de la narratrice qui commençait pourtant bien :
« J'ai commencé ce livre avec l'intention de ne rien cacher, afin que ceux qui le voudraient pussent lire dans le coeur d'une de leurs semblables ; mais nous avons des pensées que nous ne voudrions laisser voir qu'aux anges du ciel, et non à nos frères les hommes, pas même aux meilleurs et aux plus bienveillants d'entre eux. »
Alors je l'ai laissée folâtrer vers les anges du ciel et de la terre.
J'ai poursuivi ma lecture avec ce bel ennui traversant ce ciel pâle d'automne au-dessus de la campagne anglaise. J'ai tenté d'effleurer les pages, cherchant à éveiller la sensation mutine d'un battement d'ailes, mais leur mélancolie délicieusement désuète ne concédait rien.
Il n'en demeure pas moins un roman de qualité, méconnu tout comme son autrice, méritant d'être déplacé vers la lumière parce qu'il a des choses à nous dire sur les vicissitudes de la condition féminine, bien davantage que sur les états d'âme et les sentiments de sa narratrice.
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Quelle étrange fée a frappé les soeurs Brontë de sa baguette ? Car c est toujours un enchantement d entendre la voix d une de ces sirènes.Ah si elles avaient pu vivre et écrire encore et encore !
Pourtant Anne est différente de ses soeurs. Plus réaliste, moins névrosée que Charlotte, et tellement moins rebelle que la sauvage Emily. Et pourtant on se retrouve en paysages connus, nature sombre et splendide, souffles du vent, sentiments bruts sans mélange. Pas de compromis, pas de soumission, résister, mais ici, avec Agnès, dans l'apparente douceur et le silence.
Gouvernante impuissante et humiliée par des familles déliquescentes dont elle dresse un portrait sans concession et toujours d actualité, Agnès fait l expérience de l échec d un bon sens qu elle croyait partagé par tous et assiste, non sans une certaine cruauté, à la chute de ses pupilles ingouvernables et mal élevés. Ce faisant elle se met à rechercher dans ce monde des âmes honnêtes et fortes qui lui seraient soeurs.
Curieux mélange d analyse sociologique et de romantisme débridé, absolument moderne au style translucide et envoûtant, on quitte toujours ces chefs d oeuvre avec un sentiment de manque, de deuil, et le désir compulsif de replonger dans le deuxième roman de la troisième mais non la moindre des génies de Haworth, la locataire de Wildfeld Hall.
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Agnès Grey menait une vie heureuse mais simple chez ses parents aimants en compagnie de sa soeur aînée. Mais un revers de fortune et des problèmes de santé du père poussèrent la jeune fille à devenir gouvernante.
Chez les Bloomfield, la tâche est rude auprès d'enfants cruels qui ne lui obéissent pas et la méprisent et des parents tout aussi méprisants et détestables. Agnès n'a aucun pouvoir sur les enfants et se contente de subir. le petit garçon étant de loin le plus terrible ayant pour passion de torturer les oiseaux. Après quelques mois de calvaires où elle se sent rabaissée, humiliée, elle est remerciée. Elle s'engage ensuite chez les Murray où les enfants sont plus grands. La famille n'est guère mieux, égoïste, méprisante, stupide. Toutefois, la rencontre avec Mr Weston un pasteur adoucira ses jours.
Si l'écriture est belle, je n'ai pas été passionnée par l'histoire. J'ai connu un passage à vide au chapitre 11 où je me suis vraiment ennuyée, l'héroïne très bigote, s'interrogeait sur sa foi, était en proie aux doutes.
j'aurais aimé une héroïne passionnée alors qu'Agnès semble subir et passe son temps à se plaindre. La romance est également longue à se mettre en place.
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Anne, la plus jeune des soeurs Brontë, écrit ce premier roman à 27 ans.
S'il n'a pas la passion tragique et l'exaltation des sentiments de Jane Eyre ou encore des Hauts de Hurlevent, ce roman mérite qu'on s'y intéresse de près.

A travers la narration d'Agnès Grey, l'héroïne de ce roman, c'est sa propre histoire et son propre ressenti qu'Anne dévoile à ses lecteurs. Dans la préface, Isabelle Viéville Degeorges présente Agnès comme l'alter ego de sa créatrice. Comme elle, elle devint gouvernante au service, tour à tour, de deux familles riches et peu respectueuses des valeurs éducatives.

Sa narration simple et transparente ne peut rendre indifférent. Comme je comprends le désarroi qu'Agnès / Anne a pu ressentir face à ces enfants égoïstes et turbulents, face à ces jeunes filles coquettes dont le seul souci était de plaire à la gente masculine sans se soucier des sentiments d'autrui.

Ce roman est à la fois moderne et universel. Même si les méthodes éducatives ont évolué , bien heureusement, il n'en reste pas moins un plaidoyer pour une éducation basée sur l'honnêteté, la bienveillance, le respect de la nature et des animaux , et surtout la nécessité d'un cadre bien défini.

Bien sûr, le côté biblique du discours de l'héroïne peut paraître un brin moralisateur mais il convient de ne pas oublier qu'Anne Brontë était elle même fille de pasteur.

Ce roman m'a fait penser à la prose de la Comtesse de Ségur, dont la littérature a bercé mon enfance , par son côté moralisateur justement, et par la fin heureuse pour l'héroïne.

On trouve aussi dans ce roman de l'amour. Beaucoup moins ravageur que dans les romans de ses soeurs. Mais les tourments d'Agnès ne m'ont pas laissée indifférente.

Une jolie découverte que la prose de la troisième des soeurs Brontë que je compte bien prolonger avec la lecture de son second roman.

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Anne Brontë, alias Acton Bell, souffre aujourd'hui de l'ombre que lui font ses aînées Emily et Charlotte. Ce qui s'avère bien dommage car la cadette de cette trinité littéraire n'est pas moins douée que ses comparses Ellis et Currer. Force est de constater néanmoins que Agnès Grey ou La châtelaine de Widfell Hall pâtissent de la renommée écrasante des Hauts de Hurlevent et de Jane Eyre.

Ceci dit, je reviens à Agnès Grey. Comme sa soeur de livre Jane Eyre, et comme elle-même, elle est fille de pasteur et a grandi avec des ressources financières restreintes. Sa condition la destine au métier de gouvernante. Elle entre ainsi dans des familles. Qu'il s'agisse de parvenus de la société britannique ou de rejetons de l'aristocratie séculaire, Agnès Grey dépeint avec minutie leur quotidien, leurs défauts et le mépris vis-à-vis de leurs inférieurs. En ce sens, la gouvernante est une des plus mal placées car son éducation la rapproche de ses maîtres tout en l'excluant de la domesticité. Ainsi rejetée des deux parties, elle souffre de solitude en plus de toutes les avanies possibles de sa profession. Pas de sympathique Adèle comme pour Jane Eyre ici. Les élèves peuvent se montrer durs et Agnès Grey doit ravaler nombre de mortifications.

Anne Brontë a mis beaucoup de ses principes et de sa morale dans son personnage. Une morale souvent moralisatrice qui alourdit parfois le propos. En revanche, sa plume, elle, ne souffre pas de surcharge pondérale. Comme ses soeurs, elle écrit fort bien et sait instiller sa sensibilité et sa délicatesse à sa prose.

Le nom de son héroïne donne la couleur générale du roman. Si la vie de Miss Grey n'est effectivement pas rose, on reste loin des drames inventés par Charlotte ou Emily (surtout Emily... difficile de faire plus terrible et noir que son Hurlevent).
Agnès Grey a de quoi ravir tous les férus de cette littérature anglaise georgienne et victorienne si caractéristique. Et si fascinante.
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