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EAN : 9781534319240
144 pages
Image Comics (26/10/2021)
5/5   1 notes
Résumé :
The next book in the red-hot Reckless series is here!

"Oh man, this book pushed every crime fiction button for me... Bliss."
- Patton Oswalt

Bestselling crime noir masters Ed Brubaker and Sean Phillips bring us a new original graphic novel starring troublemaker-for-hire Ethan Reckless.

It's 1988 and Ethan has been hired for his strangest case yet: finding the secrets of a Los Angeles real estate mogul. How hard cou... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Ce qui tient à coeur
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Ce tome fait suite à Friend of the Devil (A Reckless Book) (2021) des mêmes auteurs. Il n'est pas indispensable de l'avoir lu avant, car les auteurs rappellent les éléments indispensables à la compréhension, en cours de route. Pour autant ce tome exhale plus de saveurs si le lecteur a lu les deux premiers. Il est paru sans prépublication initiale en chapitre, en 2021. Il a été réalisé par Ed Brubaker pour le scénario, Sean Phillips pour les dessins et l'encrage et les couleurs sont l'oeuvre de Jacob Phillips. La quatrième de couverture comprend des commentaires élogieux Publishers Weekly, Patton Oswald, et de Joe Hill. Il se termine avec une postface d'une page rédigée par le scénariste.

1988 : c'est l'année où Ethan Reckless a commencé à se sentir vieux. Il avait alors trente-sept ans, et chaque matin il éprouvait des raideurs et des douleurs dans plusieurs endroits de son corps, de vieilles blessures. Sa routine matinale commençant par une demi-heure d'étirements. Il était comme une voiture ayant subi un accident, ayant été réparée, mais ne fonctionnant plus exactement comme avant. Ce jour de 1988, un incendie s'est déclaré au premier étage du bâtiment qui abrite le cinéma El Ricardo dont il est propriétaire. Reckless pénètre dans la salle de visionnage, l'extincteur à la main. Il appelle son assistante Anna. Elle n'est pas là. Il se rend alors dans la cabine de projection : personne. Puis il va dans la réserve où le feu est en train de se propager aux bobines de film : il commence à faire usage de l'extincteur. Quelqu'un lui assène un coup de pied de biche sur la joue gauche, et il tombe à terre. L'agresseur porte un masque à gaz à cartouche, et il répond qu'il n'est pas Anna. 1988 : c'est l'année où Ethan a bien foiré.

Quatre mois auparavant, en avril 1988, Ethan vient de garer son mini-van Dodge devant la boutique où il s'approvisionne en bobines de copie de film. Il vient chercher le cadeau qu'il a commandé pour l'anniversaire d'Anna, espérant qu'elle acceptera de le pardonner pour ses propos très critiques sur son petit copain. Il rentre dans la boutique et salue le propriétaire Byron. Celui-ci lui indique qu'il allait justement le contacter car il a reçu sa commande. Il est assez surpris car il n'aurait jamais imaginé qu'un tel film soit du goût d'Ethan, sauf évidemment si celui-ci voue une passion à Judy Garland. Cela fait lui penser à la manière dont il a rencontré Anna. C'était en 1979, et il venait d'entrer en possession du cinéma El Ricardo. Il avait occupé son premier mois à effectuer lui-même de menus travaux de réparation pour le remettre en état. Régulièrement quand il arrivait le matin, il trouvait un grand A dans un cercle tracé à la bombe de peinture sur la double porte vitrée d'entrée. Il sortait alors les chiffons et le dissolvant pour enlever la peinture. Mais quelques jours plus tard, il retrouvait le symbole Anarchie à l'identique. Finissant par trouver la blague lassante, Ethan avait passé une nuit à attendre pour surprendre le petit malin en flagrant délit. Il avait observé une jeune fille peindre le A, puis pénétrer dans le bâtiment avec ses clés.

Le lecteur achète ce tome les yeux fermés et s'y plonge avec délice, en ayant pris bien soin de ne pas être dérangé. Comme il s'y attend, les auteurs commencent par une scène d'action de 4 pages, présentant la phase la plus violente de l'enquête. Il retrouve immédiatement cette sensation unique à la découverte des dessins : un équilibre extraordinaire entre des éléments représentés avec un détail minutieux, et des éléments esquissés pour ne pas alourdir les cases. Dans le premier registre se trouvent la façade extérieure du cinéma ainsi que les deux projecteurs de film dans la salle attitrée. Dans le second registre se trouvent les fauteuils de la salle, les bobines de film, ou encore la tenue de l'agresseur. le lecteur éprouve la sensation de s'y trouver : la chaleur des flammes sinistres, grâce à la mise en couleurs, la fumée noirâtre qui commence à envahir les pièces, dans un noir profond et des formes irrégulières qui se confondent avec l'ombre des pièces non éclairées, sauf par les flammes de l'incendie. le lecteur retrouve cette approche sophistiquée de la représentation descriptive dans la suite de l'ouvrage.

Sean Phillips maîtrise à la perfection le dosage entre ce qu'il représente avec précision, et ce qu'il représente de manière plus lâche en laissant l'imagination du lecteur projeter le reste des caractéristiques et des textures. Une fois passée l'introduction de l'incendie du cinéma, la première page montre la vue du personnage principal sortant de son combi Dodge : la plage, avec une longue jetée de bois. le lecteur identifie immédiatement ces éléments dans la case supérieure de la largeur de la page, et il passe à la deuxième image qui occupe la largeur du deuxième tiers de la page, puis à la dernière qui occupe également la largeur du dernier tiers. Il se souvient que l'artiste a pris le parti de se tenir à ce découpage très rigoureux : 3 bandes pour chaque tiers de page. le lecteur rejette un coup d'oeil à cette page pour mieux s'imprégner de l'atmosphère, et il remarque la complémentarité remarquable entre les traits encrés et les couleurs. En particulier, il se rend compte qu'il voit plutôt l'impression que donne la vue sur l'océan, qu'une description photographique. Avec des traits encrés irréguliers, Phillips fait apparaître la jetée avec ses pilotis irréguliers un peu de guingois, les vagues également rendues apparentes par de simples traits noirs irréguliers, et c'est quasiment tout. Avec ce qui pourrait s'apparenter à des coups de pinceau irréguliers, son fils Jacob esquisse des masses nuageuses, les dernières lueurs d'un coucher de soleil maussade, l'eau sombre de l'océan, l'irrégularité du sable, comme ça, de manière aussi naturelle que grossière, pour un résultat évident pour l'esprit du lecteur qui voit aussi bien des détails qui n'y sont pas, qu'il se prend à humer l'air pour essayer d'y déceler l'odeur du sel.

À chaque page, le lecteur retrouve ce dosage incroyable entre ce qui est représenté finement, et ce qui est plus esquissé, ainsi que cette complémentarité si sophistiquée qu'elle en devient invisible, entre les dessins et les couleurs. En fonction de ses envies et de ses inclinations, il ralentit pour mieux apprécier telle ou telle composante du dessin. Il voit bien que chaque personnage dispose d'une forte personnalité graphique cohérente du début jusqu'à la fin, même si en apparence ils semblent plus croqués que dessinés dans le détail. Il voit l'âge et l'expérience d'Ethan Reckless, la jeunesse et le solide caractère d'Anna, le sérieux un peu figé d'Isaac Presley, la morgue méprisante de Gerard Runyan. Ils ont des postures et des comportements d'adulte, sans exagérations de mouvements ou d'expression de visage. Les décors s'inscrivent également dans une veine naturaliste, recréant des endroits de cette zone de Los Angeles dans la fin des années 1980 : les rues avec des immeubles ou des pavillons suivant les quartiers, une zone en déshérence et malfamée, un diner tout-venant, un club huppé, une salle de stockage, et bien sûr plusieurs pièces du cinéma El Ricardo. L'artiste continue de doser la densité d'informations visuelles avec élégance et justesse, tout en recréant ces lieux et leur ambiance. Il fait en sorte de se montrer cohérent avec les modèles de voiture de l'époque, et représente même un personnage utilisant un des tous premiers téléphones portables on disait plutôt portatif à l'époque. de son côté, le scénariste intègre également des marqueurs temporels dans les conversations, avec parcimonie, comme la chanson Your song (1970) d'Elton John. Il intègre également ses propres goûts de l'époque au travers des personnages avec leurs films préférés : Beyond the valley of the dolls (1970) de Russ Meyer, Blow out (1981) de Brian de Palma, The Easter Parade (1948) de Charles Walters, avec Judy Garland.

Le lecteur entame ce troisième tome de la série en sachant qu'il sera narré par Ethan Reckless âgé d'environ 70 ans au temps présent, et évoquant son passé. Cela confère une impression un peu étrange : le temps présent du récit est déjà un passé inscrit dans le marbre, et le personnage principal a survécu à l'évidence, ce qui amoindrit d'autant la tension dramatique. Il flotte également un état d'esprit mélancolique : le narrateur se souvient de cette époque avec les regrets des erreurs commises, comme d'un temps qui ne reviendra plus. Mais, par contraste avec les deux premiers tomes, l'auteur insiste plus sur la relation unissant Ethan à Anna, et à la trajectoire de vie de cette dernière. Cela apporte une chaleur humaine qui faisait un peu défait dans les deux premiers tomes. le lecteur se sent ainsi plus impliqué, et il y a plus de surprises émotionnelles car Anna est plus jeune (à peu près vingt ans) et moins blasée, moins anesthésiée qu'Ethan. L'intrigue repose sur de gros enjeux financiers, l'enquêteur allant fourrer son nez dans les affaires très sales de gens puissants, tout en côtoyant des individus d'autres strates de la société. Brubaker utilise avec un art consommé les conventions et les figures du polar, les mettant au service de son histoire, en adoptant le point de vue spécifique de son personnage, une maîtrise totale du genre. Comme tout polar qui se respecte, l'enquête met en lumière des fonctionnements de la société peu reluisants, des conflits d'intérêt financiers, mais aussi de valeurs, et des motivations qui exposent la noirceur de l'âme humaine.

Il est possible que le lecteur soit aussi blasé qu'Ethan Reckless en entamant sa lecture : forcément encore une réussite d'Ed Brubaker & Sean Phillips, peut-être pas beaucoup de neuf ou une implication émotionnelle émoussée. Effectivement, il y a de cela, et c'est confortable et agréable de retrouver le savoir-faire de ces deux créateurs arrivés à un si haut niveau, et une telle complémentarité. Mais cette histoire révèle plus de saveurs que les deux précédents, une émotion plus profonde, un enquêteur plus conscient de ce qui est important dans sa vie, une jeune femme plus enjouée et parfois espiègle, un regard sur la vie désabusé mais pas déprimé.
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