AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,47

sur 38 notes
5
2 avis
4
2 avis
3
2 avis
2
1 avis
1
1 avis
La Tyrannie de la pénitence est sans doute un essai écrit à la suite de la longue litanies de repentances et de demandes d'excuses publiques à propos de sujets divers et variés traduisant l'état moral des démocraties occidentales et de leurs relations au monde, principalement à différents pays du sud dits "en développement" . En digne successeur des philosophes des Lumières, Pascal Bruckner cherche à réveiller nos consciences en nous rappelant que si l'Occident a réellement créé des monstres, il a aussi su créé les "théories qui permettent de penser et de détruire les monstres" .La complaisance qui consiste à se répandre en excuses a quelque chose de malsain et de contre-productif. En remettant les pendules démocratiques à l'heure, Pascal Bruckner insiste sur le fait que toute nation doit susciter de la part de ses citoyens un jugement équilibré et éclairé qui ne néglige pas les erreurs et les fourvoiements mais qui ne leur donne pas toute la place. En effet, en rejetant les valeurs de l'Europe au nom de leurs échecs, on risque de rejeter leur valeurs intemporelles et universelles; En un mot, n'ayons pas peur de nos valeurs en restant conscients de leurs limites.
Il faut avouer que les positions de Pascal Bruckner semblent très solides et qu'elles sont affirmées dans une langue concrète, riche, subtile et éloignée de tout jargon philosophique . Il exprime de façon convaincante une vision de l'abdication intellectuelle et du déclin de l'Europe occidentale qui, contrairement aux États-Unis, se complaît et se repait d'une bonne conscience faite d'affliction du moins dans sa représentation théâtrale. le principal reproche à cet excellent livre concerne un point accessoire: l'auteur considère comme une évidence que la philosophie doit être une école d'athéisme; en dehors de l'athéisme, pas de philosophie possible! Ce genre d'à-priori vient inutilement affaiblir un essai qui cherche à montrer que la vitalité et la force d'une nation repose sur l'assentiment actif de l'ensemble de ses citoyens (croyants ou non).
Commenter  J’apprécie          80
Dans cet essai de 2007, Pascal Bruckner continue de sonder l'âme européenne et nos grands travers, pour nous livrer avec honnêteté l'état actuel de notre monde moderne occidental en véritable psychologue dans le sens nietzschéen du terme.

Après avoir approché notre "Tentation de l'innocence ", notre tropisme vers "L'euphorie perpétuelle", il dénonce maintenant notre propension au masochisme qu'il considère être une "Tyrannie de la pénitence".
Constat très juste me semble-t-il, car s'il ne faut évidemment pas laissés nos crimes anciens (colonialisme, fascisme, nazisme, communisme etc.) sans en avoir fait une certaine expiation et présenter des excuses aux individus, ethnies et peuples victimes, la repentance perpétuelle ne peut que nous laisser dans une certaine torpeur peu propice à l'action tout en pouvant aussi la trouver très confortable. En effet, en laissant le soin aux autres nations (Etats-Unis, Israël) de mener les combats pour la paix et la démocratie, ce sont elles qui reçoivent ainsi toutes les critiques à notre place. Sans compter que cette repentance perpétuelle contribue à une concurrence victimaire qui affaiblit la volonté des individus et des Etats pour s'en sortir.

Cependant, si l'Europe a bel et bien commis de nombreux crimes dans sa longue histoire, elle est en tout cas la seule à les reconnaître, s'en excuser et à mettre en place une législation empêchant leur retour. A t-on jamais vu par exemple une nation musulmane présenter des excuses pour ses crimes esclavagistes?

On peut trouver la parole de Bruckner juste quand il dénonce la faiblesse de la politique européenne et encourage la vitalité américaine mais la réalité le détromper. Il a été l'un des intellectuels français ayant soutenu l'invasion de l'Irak en 2003 avec les résultats que l'on connaît. Il dénonce d'ailleurs au final, et cela tout à son honneur, la politique de Bush à la fin de cet essai, ce qui peut nous faire nous demander cependant pourquoi il n'a pas pu prévoir que la démocratie ne pouvait pas s'imposer par les armes, en tout cas pas dans les pays où les Lumières ne se seraient pas épanouies naturellement...
La question du droit d'ingérence se pose encore toujours aujourd'hui avec la question afghane et le départ des troupes américaines après 20 ans de présence qui en toute vraisemblance n'a servie à rien.

Pour Bruckner, les européens doivent s'unir encore davantage face aux multiples défis actuels et se rapprocher toujours plus de son cousin américain afin de se nourrir mutuellement de la sagesse de l'un et de la vaillance de l'autre.

A mon avis, si une Europe de la défense peut sembler pertinente, c'est une certaine dose de souveraineté recouvrée qui pourrait permettre aux nations et ainsi au continent de retrouver un certain panache plutôt qu'une dilution encore accentuée dans des institutions supranationales.
Commenter  J’apprécie          60
Il y a à boire et à manger dans cet essai…

On pourra ainsi déplorer quelques approximations de l'auteur, qui oublie notamment que Jacques Chirac, dans son discours de 1995, sur la rafle du Vel d'Hiv, n'a pas accusé le gouvernement de Vichy mais bel et bien l'État français : « Oui, la folie criminelle de l'occupant a été secondée par des Français, par l'État français » (Jacques Chirac, discours du 16 juillet 1995 lors de la cérémonie commémorant la rafle du Vel d'hiv du 16 et 17 juillet 1942). Or, d'État français, libre et indépendant, il n'y avait point à cette époque. Cela dit sans dédouaner les collaborateurs zélés, depuis le sommet jusqu'en bas de la pyramide.

Autre chose, la chasse aux sorcières, qu'on se le dise une fois pour toutes, fut essentiellement le fait des laïcs et non de l'Église, contrairement à ce qu'avance l'auteur. S'agissant des Croisades, l'auteur semble aussi ignorer l'Histoire et répéter la doxa dans l'air du temps, à savoir que les chrétiens seraient gratuitement venus agresser les musulmans, omettant de dire que ces derniers leur avaient interdit l'accès aux lieux saints du christianisme.

Ce qui n'empêche pas Bruckner de fustiger avec raison l'entrisme islamique, notamment grâce à ce concept malhonnête d'islamophobie qui se voudrait un racisme comme un autre : « Nous assistons bien à la fabrication planétaire d'un nouveau délit d'opinion analogue à ce qui se faisait jadis dans l'Union Soviétique contre les ennemis du peuple. »

Quant à l'atlantisme de l'auteur, il est à l'occasion caricatural, entre autres lorsqu'il défend l'interventionnisme américain au nom de la démocratie – rappelons que le présent essai a été publié en 2006, tandis que les États-Unis mettaient à feu et à sang le Moyen-Orient, sous le prétexte fallacieux que Saddam Hussein – peu recommandable il est vrai – détenait des armes de destruction massive.

On peut ainsi lire que l'Amérique montre alors qu'en intervenant elle est capable de « s'élever au-dessus de ses intérêts immédiats » (sic). À sa défense, Bruckner sait aussi voir « l'avidité économique » et « le messianisme démocratique » des États-Unis, dont les dégâts sur le monde ne sont plus à démontrer. « Mais ils ne connaissent pas ces vagues d'autodépréciation qui affligent en Europe toute une société et en affecte durablement l'humeur », précise-t-il à leur crédit. Vérité qui tend à ne plus l'être en 2022, avec la tyrannie wokiste qui règne outre-Atlantique.

Et de pointer en miroir l'individualisme européen que Bruckner illustre par Jean Giono, qui préférait effectivement être « un Allemand vivant qu'un Français mort ». Sauf qu'il omet de dire que l'expérience de la Première Guerre mondiale a durablement traumatisé Giono, notamment son passage à Verdun !

Toutefois, à bien des égards, ce texte est très pertinent. Bruckner pourfend ainsi cette pénitence stérile, sans pour autant exonérer l'Occident de ses crimes, mais sans non plus en faire un instrument d'autoflagellation perpétuelle – qui frise le ridicule lorsqu'on découvre qu'un avocat exige des réparations financières pour la traite des Noirs. Pourquoi ne pas demander alors réparation pour les crimes commis par César en représailles du soulèvement gaulois contre Rome ?! « La repentance tous azimuts est contemporaine du dernier âge de l'État : celui de son affaissement », écrit l'auteur. On ne peut qu'acquiescer.

Face à cette culpabilité imprescriptible de l'Occident, Bruckner avance ceci : « Faut-il rappeler cette évidence : que les Africains, comme les Asiatiques ou les Français, sont les seuls responsables de leur développement et ne peuvent s'en prendre qu'à eux-mêmes de leur retard, quelle que soit par ailleurs la dureté du système international. »

Bruckner dénonce aussi une certaine obscénité mémorielle qui consiste, par exemple, à « raccrocher le petit wagon de la conquête de l'Algérie au grand train de la Shoah ». Il parle de « litige généralisé » où chacun voudrait, dans une concurrence mémorielle, se hisser au niveau de l'extermination des Juifs d'Europe. Juifs qu'on jalouse en quelque sorte (sic) et auxquels on ne pardonne pas de s'être construit un État.

Pire, dans une « mystique de l'altérité », qui brise toute possibilité d'unité nationale, s'agissant de la France, « sous prétexte de célébrer l'idée de diversité, on instaure à la fois la séparation des hommes et leur inégalité puisque certains, du seul fait d'exister, jouissent d'avantages prohibés aux autres. » Et l'on « réclame la punition des favorisés plutôt que l'amélioration du sort de tous. »

Cependant, qu'il est étrange de vanter la démocratie, le dialogue des cultures et autres étoiles du firmament de la bienveillance, tout en professant une fermeté impitoyable à l'égard d'un peuple de misère qui se révolte. Je veux parler des Gilets jaunes, que je filme et photographie depuis bientôt quatre années, et que l'auteur de cet essai a traités avec un impitoyable mépris, à l'instar de ses petits camarades nouveaux philosophes, BHL en tête. Passons…
Commenter  J’apprécie          50
La réflexion de Pascal Bruckner porte souvent sur des questions de culture et de mentalité, dans une sorte d'auscultation de la réalité contemporaine. Dans le présent essai, son point de départ est le constat suivant, largement partagé : les Européens en général, et les Français en particulier, vivent mal leur passé avec lequel ils entretiennent des relations ambiguës. Comme si pour eux, exister consistait d'abord à s'excuser de tout ce que leur histoire a produit en termes de méfaits de toutes sortes. Cette « vision ténébreuse » de l'histoire, qui oublie ses pages glorieuses, brouille le regard critique et engendre, nous explique l'auteur, les clichés du « penser correct », comme l'antiaméricanisme, le refus de la mondialisation et du libéralisme, l'Europe bouc émissaire de tous nos maux, etc.

L'analyse rigoureuse, argumentée de P. Bruckner débusque tous les lieux communs, les fausses évidences comme les vertueuses indignations d'une société qui doute d'elle-même et se réfugie, à bon compte, dans une attitude victimaire qui n'est rien d'autre qu'une nouvelle servitude. En rappelant la distinction philosophique classique entre le repentir qui reconnaît la faute pour mieux la dépasser et le remords qui enferme dans le piège pénitentiel, véritable matrice de ce qu'il appelle « le masochisme occidental », Bruckner nous donne les clefs d'une interprétation équilibrée de notre passé comme de notre présent.

Au fil de sa réflexion, Bruckner met le doigt sur ce qu'on pourrait appeler le malaise français, qui conjugue arrogance, au nom de son passé, et doute de soi, face à un présent qui lui échappe en grande partie. La France se prend trop souvent pour une patrie messianique dont la laïcité serait le nouvel universalisme d'un monde sécularisé. Or, ce surmoi religieux qui pèse sur la notion de République au point d'en faire le principe de toutes les valeurs donne peut-être aux politiques les illusions des grandes utopies sans pour autant garantir une réelle efficacité de gouvernance.

De mon point de vue, cette analyse qui montre le fondamental religieux d'une laïcité trop souvent invoquée comme panacée d'une nouvelle société a quelque chose de fascinant et mériterait de plus amples développements. L'ouvrage de Pascal Bruckner arrive à son heure. Sa lecture se recommande au moment où l'Europe comme la France sont face à des choix importants. L'auteur les résume ainsi : « réconcilier l'Europe avec l'histoire et les États-Unis avec le monde » (p. 247).

P. Yves Ledure
Paru dans Esprit & Vie n°188 - Février 2008 - 2e quinzaine, p. 28.
Lien : http://www.esprit-et-vie.com..
Commenter  J’apprécie          50
L'Occident… Étrangement, ce mot porte trop souvent en lui une image négative. Être occidental aujourd'hui, c'est porter bien des responsabilités au regard du passé de l'Europe et du monde: guerres, colonisations, totalitarismes… C'est faire peu de cas du rôle déterminant de l'Occident dans le développement de la planète et de l'humanité: sciences et techniques, systèmes économiques, valeurs morales, droits de l'homme… et j'en passe.

L'essai de Pascal Bruckner vise à tordre le coup de nombre de poncifs qui visent à créer culpabilité et repentance chez les occidentaux. Pour moi, il y réussit de belle manière avec la volonté de ne rien effacer de notre passé mais en mettant les choses en perspective et en se tournant résolument vers l'avenir. J'ai également bien apprécié ses angles de vue différenciés: Etats-Unis, Europe mais aussi France.

En fait, la question levée sans réponse formelle est de savoir quelles sont les motivations – les objectifs – des « Cassandre » du masochisme occidental que dénonce Bruckner ? Une analyse de la typologie de ces « diseuses de mauvaise aventure » aurait permis sans doute d'aller plus loin dans la description du phénomène car ce masochisme est bien né en Occident…

Pour ma part, occidental passionné d'histoire, je regarde résolument vers l'avenir et je continue à penser que l'Occident, par sa puissance, ses valeurs mais aussi par les blessures de son passé, doit continuer sa route positive dans un monde bien troublé dont il n'a pas à porter tous les malheurs.

Lire en complément: Pour en finir avec la repentance coloniale de Daniel Lefeure (2006).
Lien : http://www.bir-hacheim.com/y..
Commenter  J’apprécie          30
On m'a prêté cet essai suite à une discussion sur le décolonialisme. C'était gentil mais j'ai abandonné au 3/4 du livre…
Aux antipodes de la position de Vergès que j'ai lu récemment, je découvre la pensée de Bruckner sur le goût qu'aurait un certain Occident à s'autoflageller par rapport à son passé (entre autres colonial). Ce n'est pas que le propos n'est pas intéressant; il l'est très certainement mais, c'est un peu comme dans certains essais d'Onfray : on a compris après vingt pages et le reste n'est que redites et exemplification.
Commenter  J’apprécie          20
Requiem un peu pathétique d'un vieux mal blanc sarkozyste qui voudrait que rien ne bouge.
Surtout ne pas se remettre en question...
La révolution en cours est peut-être un peu excessive mais ça ne pas être autrement.
Mais salutaire.
Désolé Pascalou...
Commenter  J’apprécie          00
Un livre d'une médiocrité intellectuelle rare. Un ancêtre des fake news d'une mauvaise foi inégalable.
Commenter  J’apprécie          00


Lecteurs (109) Voir plus



Quiz Voir plus

Quelle guerre ?

Autant en emporte le vent, de Margaret Mitchell

la guerre hispano américaine
la guerre d'indépendance américaine
la guerre de sécession
la guerre des pâtissiers

12 questions
3192 lecteurs ont répondu
Thèmes : guerre , histoire militaire , histoireCréer un quiz sur ce livre

{* *}