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C'est une triste histoire à vous conter : en un an j'ai perdu plus d'amis sur Babelio que les doigts d'une main. Tout récemment encore à la suite de quelque avatar, un vient d'en changer après s'être éclipsé avec une ruse de sioux en effaçant toutes ses traces. Voilà au moins une mésaventure qui ne serait pas arrivée aux frères Grossbart pour trois raisons : 1) ils étaient indubitablement des illettrés ; 2) internet n'existait pas au moyen-âge subséquemment Babelio non plus ; 3) ils n'avaient pas d'amis et ceux qui les croisaient moururent avant de pouvoir disparaître en catimini, suis-je assez clair ?

Triste l'histoire des frères Grossbart, oui sans doute ; truculente, certainement ! Quelle est cette histoire du reste ? En gros : boire, se bâfrer, se battre ; accessoirement piller des tombes, pourchasser des démons et des monstres, pérorer sur La Vierge ; se déplacer vers la Gypte et ... dormir ; point bar. Mais en beaucoup, beaucoup mieux écrit, avec moult circonvolutions et surprises, émaillé d'une gouaille que si je la recopie ma critique va être censurée putain de bordel de merde ! Mais là, à la longue on s'y fait comme à la violence et aux monstruosités, ainsi qu'à la lubricité des sorcières et des sirènes, brrr... Ô misère, voilà que j'ai tout dévoilé y compris Marie.^^

Avant que mes ami(e)s s'en aillent, j'ai donc envie, une fois n'est pas coutume, de leur faire une petite séance de dédicaces. (Oui je peux)
D1 Tu as lu les contes de Grimm, tu aimeras l'ambiance. Tu as eu le courage de lire Gargantua en entier, cette lecture te sera légère. Tu trouves en général la littérature contemporaine, trop mièvre, trop sirupeuse, voilà du bien rustique sans langue de bois. Ce livre te mystifiera.
D2 Tu aimes la sonorité des mots crus et la poésie qui vient des corps à corps. Même si Grossbart n'a ni d à la place du b ni "ni" avant le b, tout dans l'écriture te plaira : "C'est juste une enculerie de façon de parler comme merde, pisse, cul, tout c'que tu veux; c'est juste encore pire, parce que même si il y avait un patelin qui s'appelait Merde, il serait toujours mieux qu'Enkuleburg ! [...] Quand tu l'utilises, ça veut dire que tu galèjes pas comme un enculé, ou alors t'utiliserais pas ce genre d'enculetterie." p.197
D3 Tu rêvais juste de Liberté, tu as été une bikeuse. Avant d'être sage tu dis que tu as eu ta période bad girl. Eh bien ! Les frères Grossbart sont deux bad boys épris de liberté, qui pourraient chanter Faut qu'je road.
D4 Tu aimes les fées mais aussi les thrillers sanglants dont un auteur qui t'envoie systématiquement en clinique, du sang il y en aura en veux-tu en voilà et puis des monstres et des sorcières. Tout pour te plaire !!!!
D5 Tu aimes l'humour des garçons et la complicité de tes frères. Tu apprécieras l'humour et les clins d'oeil de ces deux "Ostrogots" , ils ne sont que deux mais mangent comme quatre, la moyenne y est.
D6 Tu as créé l'année du rat avant de quitter le navire, dommage que tu ne me liras pas car de rat il est question aussi et de leur rôle dans le transport de puces véhiculant la peste noire...

Et aussi pour tous ceux et celles qui ont envie une fois de lire quelque chose de différent, comment ne pas être envoûté (car d'envoûtement il est question aussi, je sais y a répétition mais il en est vraiment beaucoup question LOL alors on fini forcémment par être envoûté^^) par cette introduction : "Dire des frères Grossbart qu'ils étaient des crapules cruelles et sans coeur serait une insulte au plus ignoble des bandits de grand chemin ; et dire qu'ils étaient des pourceaux meurtriers reviendrait à conspuer le plus répugnant des verrats. Ils étaient des Grossbart jusqu'au bout des ongles, en vérité, et dans certaines contrées ce patronyme a encore quelque poids. [...] le sang peut tourner en l'espace d'une seule génération, cependant il peut aussi distiller à travers les âges pour donner naissance à quelque chose de particulièrement vil, et c'était le cas de ces deux abominables jumeaux, Hegel et Manfried."
Truculent et jubilatoire ! Quelques longueurs dans ces élucubrations, mais quelle imagination et quel babil !!!

Interpellant aussi, et comme nous sommes entre amis, je me permets de vous confier ce qui m'a le plus touché chez ces jumeaux. Au-delà de leur ignominie, car ignobles ils le sont et particulièrement, et de leurs défauts, bien plus nombreux que tous mes doigts et orteils réunis, toujours ils reviennent à une complicité de coeur renforcée par leurs tours pendables, leurs divergences et les dangers encourus ; au-delà des mots durs, des jurons, des engueulades et des coups -car coups il y a et nombreux et souvent- qui provoquent fâcherie et bouderie, ces deux dernières se dissipent toujours comme si seule une brise légère avait fait frissonner mais sans jamais la refroidir leur fraternité. Ces deux-là peuvent tout se dire, tout encaisser, rien ne semble pouvoir un jour les séparer et de continuer à se parler. C'est aussi comme cela que je conçois l'amitié et par ailleurs vous ne m'en voudrez pas de conclure sur ce petit message perso après les dédicaces.


P.S. Pour celles et ceux qui pensent avoir découvert à qui s'adresse l'une des dédicaces, qu'ils n'hésitent pas à lui envoyer un petit MP (pas military police mais message perso. LOL) cela leur fera sans doute plaisir, ne dit-on pas que les petits messages renforcent l'amitié ?
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En premier lieu, je te remercie RosenDero pour ce conseil de lecture. Il s'agit d'un roman très spécial dans son genre. Que l'on aime ou pas, au final il ne laissera personne indifférent.

On suit le périple extraordinaire de deux frères absolument détestables, bêtes, immoraux, violents, vulgaires, sales, mais tellement attachants tout de même. Et pourtant, l'auteur ne fait rien pour qu'on les aime, c'est même le contraire avec un début absolument atroce en termes de crimes sanglants et sans aucune once de remord ou de pitié. Et pendant toute l'histoire, on aurait été animé par ce désagréable sentiment d'injustice, si les deux héros ne s'en prenaient tout de même pas autant dans la gueule. Et ils le méritent amplement croyez-moi.
C'est drôle, écoeurant, rafraichissant et savoureux par moments, lourds par d'autres, effrayants et stressants encore à travers certains passages, et malheureusement quelques fois, et notamment dans le dernier tiers, un peu trop long.
J'ai hésité avec une notation moindre justement à cause de ce sentiment de longueur, et de séquences qui, à mon sens, auraient pu être supprimées tout simplement, mais les idées, la trame générale et l'originalité d'une telle oeuvre, nécessitent tout de même mes 4,5 étoiles.

Je vous conseille donc ce livre, mais évitez le si votre âme est sensible, ou si les paroles "enculement" hérétiques font en général saigner vos chastes oreilles !!!

Mention spéciale tout de même pour cette multitude de dialogues géniaux qui m'ont constamment fait penser au grandiose cinéma de Tarantino.
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C'est con, c'est jouissif, c'est bon.

Hegel et Manfried Grossbart, deux gros empaffés, deux ordures au grand coeur trouble, jumeaux à la piété discutable et à la foi variante et déviante, sont la vraie et unique pépite de ce livre.
Viles, veules. Egoïstes. Seul le sort des Grossbart intéresse les Grossbart. Et ils ont déjà du mal à s'y tenir.

Pourtant, ils vont avoir fort à faire au vu du bestiaire maléfique qui va croiser leur chemin dans une Europe Médiévale en totale déliquescence. Des monstres, des sorcières, des loups-garous et j'en passe pour vous laisser la surprise. D'autant qu'ils sont pas très courageux les Grossbart. de fieffés lâches :

"Leur seule chance de s'en sortir vivant était d'affronter la créature au sol. S'ils parvenaient à maîtriser leurs nerfs, ils pourraient accomplir ensemble ce qui aurait été impossible pour un homme seul. (...). Faute d'options, ils allaient devoir se battre.
Ils s'enfuirent. En hurlant. Dans des directions opposées."

À mourir de rire. Vite, avant qu'ils ne vous étripent.
Les dialogues sont monstrueux. Comme si Audiard avait avalé Jacquouille. Un mélange de patois et de vieux français.
Chapeau au traducteur by the way, il a accompli un travail remarquable et ça n'a pas dû être facile tous les jours. Les deux frangins passent leur temps à s'insulter et à insulter tout leur entourage, bons comme vilains.

Mais y a-t-il vraiment des bons dans le roman de Jesse Bullington ? Probablement pas. Des canailles, des filous, des fous, des voleurs, des assassins, des tueurs d'enfants, des prêtres hérétiques...

Après l'histoire, l'histoire, l'histoire... Ce n'est absolument pas l'intérêt de ce bouquin, il faut bien l'avouer.
Tout au long du livre, nous allons suivre la quête des frères G. pour atteindre l'Egypte.
L'histoire se traine, l'histoire est répétitive. L'histoire ne mène nulle part. Un bouquin à ne pas lire d'une traite mais chapitre après chapitre, le live procure jouissances malsaines et plaisirs coupables.
Un peu dégueu, un poil gore, sublimement écrit, Jesse Bullington manie sa plume comme une hache et ne fait pas de quartiers.
L'éditeur définit le livre comme un croisement de Rabelais et de Tarantino et c'est assez juste. À la fois bavard et sanglant. Un conte de Grimm pour adultes, encore que vous n'y trouverez ni féerie ni enchantement. À ne pas conseiller à tout le monde encore que cette expérience de lecture assez inédite vaut le détour.

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Suite au conseil judicieux de Krout (merci!), j'ai suivi avec plaisir l'épopée des 2 frères Grossbart.

Deux jumeaux complètement barrés, criminels sanguinaires, débiles à leurs heures, priant la vierge marie plus vraiment vierge, qui vont s'enfuir vers l'Egypte. Ces deux gars sont des pilleurs de tombes mais lors de leur pélérinage ils vont croiser la route d'êtres étranges, parfois plus malfaisants qu'eux-même.

En plus de personnages vraiment atypiques, il faut avouer que l'humour de l'auteur est truculent.

Un roman hors-normes mais super jouissif.

J'oubliais de préciser que je suis complètement fan de la couverture trompe l'oeil de ce bouquin... très représentative du roman en lui même.
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La couverture de ce livre m'a attiré au premier coup d'oeil, et qu'importe le pavé pourvu qu'on ait livresse (sans apostrophe ?).

Qui sont ces types ?
Pourquoi leur histoire est-elle "triste" ?
Est-ce un récit historique ? Un conte ou une légende ?
Va-t-on y trouver des éléments fantastiques ?

La maigre quatrième de couverture suffit à entretenir le mystère et laisser planer le doute. Et c'est tant mieux. Et même si je ne prête guère attention aux accroches du style "Tarantino au moyen-âge" ou "Plus noir que les contes de Grimm", je dois avouer que les comparaisons ne sont pas volées.

Mais la triste histoire des frères Grossbart, c'est avant tout un pied de nez aux contes classiques et une ode aux légendes, mythes et folklores.
On sent bien l'intérêt de l'auteur pour ce pan de la culture. Mais on ressent également deux choses prégnantes : l'horreur due aux actions de certains humains (et tout ce qui va avec) et l'humour né de l'absurde comportement de certains humains... Tout ça dans cette fin de moyen-âge, dans un Saint Empire Romain Germanique nimbé de croyances, de superstition et de violence (on se croirait dans Warhammer ^^).

La triste histoire des frères Grossbart, c'est une odyssée macabre en forme de road trip illuminé. Détails :

Les personnages principaux du récit sont deux frères jumeaux. Les deux ont de grosssssses barbes (Grossbart... nomen est omen) et font partie d'une lignée de pilleurs de tombes germains habitués à violer des sépultures pour y rafler les objets enfermés. Si l'un est un fanatique ne jurant que par Marie, l'autre possède un sixième sens infaillible leur permettant de prévoir les coups fourrés. Les deux sont violents, incultes, illettrés et superstitieux. Et tout bascule le jour où il dépassent les bornes, tuent, brûlent et humilient. de là, ils prendront leurs cliques et leurs claques, fuyant leurs poursuivants, et direction "la Gypte" sur les traces de leurs aïeux pilleurs de tombes. le problème, c'est que les deux bonhommes se croient dans leur bon droit, et se persuadent l'un l'autre.

En chemin, il tomberont sur une multitude de personnages secondaires, tous plus mémorables les uns que les autres (du prêtre défroqué au mendiant mythomane, en passant par le chevalier français, la sorcière revancharde ou le capitaine de navire marabouté), et subiront des péripéties multiples et variées (glauques, gores, comiques ou horrifiantes).

Il parait que "peu importe la destination, c'est le voyage qui importe". C'est bien le cas ici. Et plusieurs des évènements de ce récits m'ont assez marqué pour rester (espérons-le) dans ma mémoire (et mes petites idées de MJ^^).

Le pire ? C'est que rien n'est manichéen, et que même les deux brutes épaisses et dégénérées qui servent de héros et que l'on voudrait voir pendues aux premières pages du roman, parviennent finalement à rendre leurs actions justifiables, justes, ou simplement compréhensibles. Des lueurs de raisonnement éclairés éructent parfois entre la bile et les insultes qui jaillissent de l'orifice ornant la barbe de Manfried et Hegel Grossbart.

Pour public averti, et au coeur bien accroché.
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Voilà un roman bien atypique que cette « Triste histoire des frères Grossbart » de l'américain Jesse Bullington qui, pour son premier roman, opte pour un pari plutôt osé. Nous voilà donc plongé dans une Europe médiévale en tout point similaire à la nôtre, à ceci près que sorcières, démons et autres créatures malfaisantes y sont monnaie courante. C'est dans cet univers sombre et inquiétant que le lecteur fait connaissance avec les deux protagonistes, Hegel et Manfried Grossbart, jumeaux issus d'une longue lignée de pilleurs de sépultures en quête de ce qui, dans leur milieu, passe pour le must du must : les célèbres tombeaux d'Égypte. Violents, coléreux, crédules, parfois un peu sots, voleurs, assassins..., bref, les frères Grossbart ne sont pas spécialement le genre de personnages que l'on envisage de suivre avec intérêt ou affection pendant plus de quatre-cents pages. Et pourtant, c'est presque malgré nous que l'on se laisse embarquer dans les aventures rocambolesques de ces jumeaux peu ordinaires qui s'estiment toujours dans leur bon droit et vouent curieusement un culte fervent à la Vierge Marie. L'un des principaux atouts du roman est donc, vous l'aurez compris, le soin apporté au traitement des deux protagonistes, personnages hauts en couleur bien éloignés de ceux que l'on a l'habitude de voir.

L'intrigue pour sa part n'est peut-être pas des plus complexe mais est parvenue sans mal à m'embarquer tant les rebondissements s'enchaînent à une grande vitesse, même si la lassitude m'a hélas un peu gagnée sur la fin. Il faut dire qu'entre leurs combats contre une manticore ou un loup garou, leurs confrontations avec des sorcières et des sirènes, sans compter tous les ennuis et les ennemis rencontrés en route, les frères Grossbart n'ont guère le temps de s'ennuyer, et nous nous plus ! Les amateurs de folklore médiéval (dont je fais partie) ne manqueront ainsi sûrement pas d'être ravis par les nombreuses références de l'auteur au bestiaire fantastique relatif à cette période ainsi que par l'ambiance très particulière qui se dégage de ce roman. Parmi les autres points forts on peut enfin saluer le très beau travail de traduction de Laurent Philibert-Caillat qui parvient efficacement à retranscrire le parlé très spécial des Grossbart dont certaines tournures de phrases ou expressions valent franchement le détour. A noter qu'au roman suit une bibliographie succincte ainsi qu'un bref entretien avec l'auteur qui nous explique en quelques lignes l'origine de sa démarche et nous dévoile ses principales sources d'inspiration.

Au final, « La triste histoire des frères Grossbart » se révèle être une découverte aussi originale que sympathique qui vous fera sans nul doute passer un bon moment de lecture. On peut une nouvelle fois se féliciter du retour du label Éclipse chez Panini qui a donné lieu début 2013 a plusieurs rééditions bienvenues, à commencer par ce roman de Jesse Bullington dont le parallèle effectué par certains avec Rabelais ou encore Tarantino me semble tout à fait approprié.
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Tout d'abord, commençons par la couverture du livre : Ce tortueux trompe l'oeil, est bien à l'image du roman et de ses protagonistes.
Les jumeaux Grossbart, Hegel et Manfried, sont des personnages tout à fait atypiques, pilleurs de tombes de leur état, dotés d'une morale et d'une dévotion à la sainte Vierge bien à eux, ils parcourent l'Allemagne médiévale dans une quête d'un genre particulier.
Leur but ? La "Gypte" (l'Egypte) qui regorge de tombeaux fabuleux qui n'attendent que des pillards entreprenants de leur espèce.
Mais la route est longue et le voyage mouvementé, les mauvaises rencontres ne manquent pas; Sorcière et son démon, brigands, prêtre illuminé, jusqu'à une sirène..!
Bien sûr, ceux qui croisent les deux frères ne sont guère plus chanceux, comme ce modeste cultivateur, qui ira très loin dans son désir de vengeance à l'encontre des Grossbart...
Les frangins parviendront t'ils à rejoindre leur "eldorado" oriental ?
Je me garderais bien de vous dévoiler le terme du périple fantastico-picaresque, mais sachez que la fin, est savoureuse dans son ironie qui conclut bien ce roman immoral, mais jubilatoire !

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« On n'est pas des voleurs, on n'est pas des assassins ; on est juste de gens de bien à qui on a fait du mal ». C'est une excellente entrée en matière pour ce conte moyenâgeux qui en retourne les rouages et fait la part belle à la cruauté sans fausse pudeur de cette époque. Jesse Bullington y introduit la fantasy et l'horreur avec des monstres connus, mais plus sales hors des clichés du fantastique commun. Au contraire des contes, ne cherchons pas de morale, les paroles sont grasses, les rires sont cruels et les actes irrévérencieux et souvent irréfléchis. Finalement, ce roman est peut-être un reflet sans concession de notre société actuelle.

Hegel et Manfried sont jumeaux, ils n'ont pas eu une enfance facile dans l'Europe du XIVe siècle. Entre famines, épidémies et pillards, nombreux sont ceux qui décèdent plutôt jeunes. Leur force réside dans leur volonté de traverser le continent et de s'embarquer pour l'Egypte et piller les tombeaux des rois. Pieux mais cruels, ils vont sur les chemins du sud laissant derrière eux une trainée sanglante issue de corps d'hommes, de femmes et de monstres.

La piste sanglante que laissent les frères Grossbart à travers l'Europe permet à l'auteur de faire une analyse des moeurs et des superstitions de cette époque. Une période tourmentée au cours de laquelle les peuples créent des figures démoniaques et y croient. Jesse Bullington ne fait que rendre vivants ces monstres, sorcières, manticores, démons,… Pourtant, aucun d'eux ne pourra rivaliser, en horreur, avec les jumeaux meurtriers.

❓Connaissez-vous des romans que l'on ne peut pas mettre entre toutes les mains ?

Lien : https://jmgruissan.wixsite.c..
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Manfried et Hegel Grossbart. Quel duo détonnant ! Deux malades !

Un phrasé captivant pour coucher une scène d'introduction macabre. Un massacre pour asseoir la détermination de jumeaux froids et redoutables au cas où une main inconsciente se lèverait pour les arrêter au fil de leur épopée. Ils veulent juste atteindre la « Gypte » comme ils affectionnent de le répéter. Quitter le Saint-Empire de la nation germanique en 1364, pour joindre l'autre côté de la méditerranée, la terre des tombeaux égyptiens où la fortune leur sourira, à eux, les audacieux. Même s'ils surveillent leurs arrières avec des tours de garde obligatoires chaque nuit parce qu'ils sont traqués. Attention, ils ne fuient pas. Nuance ! Ils quittent leur pays pour poursuivre un rêve.

Ces gaillards bourrus et vulgaires palabrent à propos de choses et d'autres comme si rien ne les perturbait. Citons par exemple leur croyance, leur dévotion passionnée envers Marie, la Sainte Vierge. Vous remarquerez, non sans plaisir, que leur lucidité se réduit à une théologie simplifiée, celle-ci est une part majeure de leur condition en plus de leur agilité et leur efficacité au combat : la vierge les soutient, car ils sont des durs, elle a fait de Jésus une « choupette » pour se venger du seigneur qui a forcé le passage… Il y a aussi cette hilarante image qui dit qu'un cannibale est un hérétique, car il mange les autres et non le corps du christ à l'église… Cela démontre la limite intellectuelle des sosies. Mais ils sont frères inséparables, ils ne font rien de mal, sauf si on les empêche d'atteindre leur but. Ils tuent et ils pillent. Que faire d'autre au Moyen Âge ? Il n'y avait pas internet à ce moment-là. Ils auraient pu s'adonner au combat sur le célèbre jeu « world of warcraft » et épargner des vies...

Voici donc les aventures de deux âmes brouillées façonnées à l'image du père et du grand-père pilleurs de tombes, d'une mère alcoolique haineuse et violente. Vous l'aurez deviné, les mots clés de leur éducation sont meurtre de masse, faim, soif, rejet et débrouillardise. Une fine équipe, un double corsé… Ils n'ont rien dès le départ et se servent au besoin. Peu importe l'avis du propriétaire du bien qui n'a d'autres choix que de se soumettre ou finir sa vie sur le champ. La bourse ou la vie, direz-vous. Oh non, c'est bien trop facile. C'est pire que cela. Il n'y a pas de choix possible. Ils improvisent au fil de la traversée des montagnes, de la mer. Ils sont naïfs… D'ailleurs, c'est à se demander s'ils arriveront au bout de leur périple à ce rythme, avec un tel niveau de préparation, sur un chemin tellement incertain.

Des surprises ? Oh que oui les surprises existent. Que diable, il y en aura à foison. de quoi effrayer les plus aguerris. Elles embellissent le récit fantastique... Ils rencontrent une « manticore » (espèce d'homme guépard), une sorcière qui les déstabilise un instant, une autre femme silencieuse et magnifique dans un chariot, un moine, des homoncules (créatures immondes)...

Des contes et des légendes s'entrecroisent. Une époque horrible et féroce où ce qui est bon n'appartient pas à l'histoire, où ce qui est « Saint » ne suffit pas. Félicité soit qui mal y pense… dans un Saint-Empire, quel paradoxe amusant. Il n'y a absolument rien de sain, ni de « Saint » à part la vierge dans ce périple. Une manière de tourner au ridicule l'inquisition.

L'auteur a réussi son pari quand il affirme : « Je voulais toutefois bouleverser certaines conventions du fantastique “mainstream” (= tendance, grand public, courant principal), si bien que le résultat aura peut-être ses partisans et ses détracteurs, finalement. Ce que j'aime le plus dans le fantastique, l'horreur, l'aventure et la fiction historique est souvent l'inverse de ce qui est populaire dans ces genres, et ce roman le reflète sans doute. »

Concernant le « mainstream » que l'auteur défend, c'est peut-être vrai si l'ouvrage est comparé à de la bit-lit qui cartonne depuis « Twilight ». Par contre, comparé à un « Salem » de SK ou la trilogie « Manitou » de G. Masterton qui criait déjà présent dans le domaine en 1975, l'affirmation est moins vraie pour la nouveauté. Jesse Bullington est du même gabarit de toute façon. La différence perspicace dans son approche, c'est ce mélange apporté à l'époque du Moyen-Âge. Là, c'est fort, il pioche dans le thriller historique habituel et très documenté (difficulté principale), il y ajoute les contes et légendes fantastiques qui ne seront plus que des histoires de coin-de-feu, mais des récits avérés et d'une noirceur imbattable.

Pour l'intrigue, c'est un périple classique avec quelques obstacles. L'avantage, c'est d'abord l'enrobage de cet univers démoniaque dans un milieu déjà hostile à la base, et c'est aussi la consistance de la relation entre les deux frères. Leur langage proche du bourrin, amusant et d'époque. Râler en langage moyenâgeux offre quelques pépites (pensez « Les visiteurs », le film culte de Jean-Marie Poiré en 1993). La conclusion est, pour qui a bien suivi, inévitable et de ce fait prévisible. Rien d'alarmant et sans répercutions sur l'intégralité du travail. La triste histoire des frères Grossbart, est triste, oui, mais pas à l'eau de rose où par compassion on tendrait le mouchoir aux frangins.

Très intéressante, belle approche, c'est du fantastique. Laissez-vous guider par l'imagination débordante de Mr Bullington, par sa mise en scène de légendes dans une époque tristement célèbre. le style précis et glauque de l'oeuvre est une réussite dans le genre, les 4 pages de bibliographie sont impressionnantes et a donné une sacrée histoire qui respecte l'atmosphère que suscite l'époque ainsi que ses us et ses coutumes. le dernier 1/3 du livre semble précipité par rapport à l'intensité de la progression qui le précède. Jesse B lance du solide et malgré une scène d'apothéose obligatoire sur la fin — bien que le lecteur ne s'attende évidemment pas à une conclusion romantique — un sentiment d'inachevé persiste. le lecteur attend tel un fan de NFL (National Football League) que le « running backs » traverse le terrain en courant le ballon ovale sous le bras et plonge sur la goal line (ligne de but) pour marquer le point ; un tuchdown spectaculaire sous les acclamations d'un stade noir de monde en furie. Mais, bien que Jesse B ait parcouru une grosse partie de la surface de mots sans faille ; essoufflé sur la fin, il s'est contenté de ralentir sa course devant un public excité qui s'étonne de le voir marcher les derniers mètres pour juste déposer la balle.

Un public qui aurait aimé être surpris, ou étonné par un dénouement plus extraordinaire ne regrettera toutefois pas le billet dépensé. Car finalement c'est un livre des éditions Éclipse qui marque, tout de même, un beau point.
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Si vous aimez l'univers des frères Coen, mélangé à celui de Quentin Tarantino, saupoudré de fantastique et de dialogue qui sent bon le terroir, alors vous apprécierez ce livre.
L'histoire est celle des jumeaux Hegel et Manfried Grossbart, nés dans un village au fin fond de l'Allemagne, en pleine époque moyen-âgeuse. Ces deux pécores, élevés par une mère alcoolique à coups de triques, qui connaissent tout du métier de profanateurs de tombes, sont bien décidés à aller récupérer le butin de leur oncle, dissimulé dans quelque tombe en Gypte. Les voilà partis sur les routes, affrontant maints démons, sorcières et pauvres diables qui ont eu la malchance de se mettre en travers de leur route.
L'écriture est pas mal. Les trois quarts du livre se lisent avec curiosité et surprise, assez facilement. le dernier quart s'essouffle un peu et il nous tarde d'en finir. Cependant, ce livre gagne quand même à être lu, car il déroule l'histoire comme aucun autre, il est truffé de scènes truculentes, un peu gores pour certains peut-être, mais qui m'a changé de lectures parfois trop lisses. Il est parfois jouissif de se rouler dans la boue, de sauter dans les flaques pour tremper nos godasses et de se tordre de rire comme des bossus. Mais surtout d'en coller une au premier c*** venu ! Et bien ce livre a le mérite de provoquer cette sensation de liberté que l'on perd trop facilement dans nos sociétés policées. Et à travers ces deux anti-héros qui sont même pires que des anti-héros, nos désirs et envies primaires, nos pulsions violentes et animales ont libre cours. Et ça fait vraiment du bien.
Rien que pour (re)trouver cette sensation, à lire absolument ! Et vive les Grossbart !
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