Citations sur Au soleil redouté (106)
Il se redresse fièrement.Sacrée prise ! Malgré ses vingt ans de métier sur son chalutier à pêcher le thon, les bonites et les raies à dard ,jamais il n'a dû ramener ça dans son filet : un flic en short et quatre nanas plutôt mignonnes, chacune dans son genre, la bourge, la pète-sec, la romantique et l'énergique, debout dans la cabane au-dessus du port.
Allez savoir ? Les lecteurs aiment les intrigues étranges. Et surtout…
J’ai fait ma fière avec mon introduction à tiroirs, mais une boule acide bloque ma gorge.
Un jeu, inventé par Pierre-Yves ?
J’ignore tout de ce qu’il attend de nous.
Ce qu’il pense de nous.
Ce qu’il va faire de nous.
Pierre Yves François, au contraire, a plutôt tendance à fasciner, voire hypnotiser, ses lectrices, qui notent fébrilement chacune de ses phrases, comme s’il ne s’exprimait qu’en alexandrins ou en haïkus, et que chaque mot qu’il prononçait composait une sorte de poésie perpétuelle qu’il serait sacrilège de laisser se perdre dans les courants d’air. Une sorte d’énergie créative renouvelable, d’inspiration solaire, si vous voyez....Moi j’y vois surtout du vent, capable de faire tourner dans l’archipel une bonne centaine d’éoliennes.
- Ecoute-moi bien, Maïma, on appelle cet archipel la terre des hommes, Fenua Enata, mais on a tort. Ici les femmes règlent leurs affaires seules. Ne l'oublie jamais ! Ne laisse jamais aucun homme te voler ta vie. Nous sommes des princesses, Maïma. Nous sommes des reines. Nous sommes les Marquises !
Un peu plus loin, dans un cadre en compagnie de Maddly, sa dernière amoureuse, Brel sourit toutes dents en avant, un sourire de poney, pas étonnant qu'il se soit si bien acclimaté. D'après lui, les hommes prudents sont des infirmes. Et les femmes ? vieux misogynes ! Pas étonnant non plus que tu te sois plu sur la terre des hommes ! C'est si facile de parler de l'enfance avec des mots de poète ou le pinceau d'un peintre, tout en laissant sa femme élever des gosses dans le plat pays à quinze mille kilomètres de là ! Brel et Gauguin, même combat !Cette île n'aurait pas dû s'appeler les Marquises mais les Marquis, les ducs, les petits rois à la noix de la principauté des cocoteraies.
Cette pension est un piège, une auberge rouge, tellement isolée que personne ne pourrait se douter. Rien que ce nom en est une preuve... Au soleil redouté. (p 336)
Maïma éclate d’un rire franc à faire s’envoler tous les oiseaux de la forêt. Elle me tire par la manche, excitée.
— Il y a cinq tikis de la taille de celui-ci, entre Taaoa et Atuona. D’après Tanaé, personne ne sait qui les a sculptés. Les Marquisiens les ont découverts, plantés entre les deux villages, il y a deux mois.
Le tatouage n’est pas un signe de reconnaissance pour rappeurs des cités, ou pour personnaliser un tee-shirt de triathlète, une planche de surf ou une marque de baskets. Le tatouage est un acte sacré, sexuel, un rite social total. Le tatouage, c’est le mana !
On pardonne à ceux qui deviennent des génies, les enfants de Gauguin et de Brel ont pardonné à leur père, on pardonne parfois aux pères de tout quitter.
Jamais aux mères.
On a failli mourir, mais on renaît petit à petit, à notre manière, en luttant de toutes nos forces contre les grands hôtels, les grandes croisières. C'est l'avantage d'avoir tout perdu, il n'y a plus rien à piller. Être qui reste, on le cache. Pour le trouver, il faut avoir la politesse de nous le demander.