Lecture Jeune, n°131 - septembre 2009 - Qu'une résidence d'artiste dans un musée de la céramique galloromaine inspire un album de science-fiction, voilà une belle surprise ! Claire Cantais part du principe même de la poterie, produite en série dans l'Antiquité. Seulement, ce ne sont pas des objets mais des hommes qu'on clone dans son livre, Parfaiteville. Un matin de l'« an 21 de l'Ère Parfaite », son héros, Léon, reçoit une « Invitation Parfaite à devenir citoyen de Parfaiteville ». Une fois les barrières franchies, il découvre le monde gris et oppressant d'une ville totalitaire, à l'horizon barré par la perspective des immeubles et les slogans incessants des haut-parleurs. Et surtout le travail qu'on lui réserve : fabriquer Parfaits et Parfaites, ces robots qui ont remplacé les hommes en ville. Aidé d'une jeune fille rousse au discours politique bien rôdé, Eulalie, et d'un petit chien hirsute, Léon déglingue cet univers aliénant, libère animaux et humains, tandis que la couleur ravive les dernières pages.
La fable n'est pas nouvelle, on le voit, mais elle tire toute sa force de la puissance graphique de l'album et du mélange des techniques et des références. Claire Cantais a retenu les leçons de l'avant-garde russe et utilise avec une belle rigueur quelques formes géométriques - le rectangle, le cercle, le triangle -, les lignes de force et les perspectives, pour créer cette architecture angoissante. L'uniformisation de cet univers artificiel, découpé dans du papier Canson, des journaux, des photos publicitaires, est bouleversée par le dessin : d'un trait de crayon surgissent des personnages aux visages étonnants, que Claire Cantais est allée chercher, bien loin de la beauté lisse des mannequins de vitrines de notre société de consommation, sur les étagères d'un musée et qui, deux mille ans plus tard, suscitent toujours notre intérêt et notre émotion. Charlotte Plat
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Fête du livre - Interview de Claire Cantais