La chasse est mon terrain de jeu.
Et il ne peut y avoir qu’un seul prédateur.
J'aimais le contact ferreux de mon scalpel, comme si la lame effilée était devenue le prolongement de moi-même. Sans lui, je me sens amputé, à l'instar d'un écrivain privé de sa plume.
Les murs tanguent autour de moi.
Ne pas lâcher prise.
Je focalise mon attention sur la bouteille de soda.
La réponse est sous mon nez, depuis le début.
Depuis mon premier repas…
Les concepteurs de ce jeu n’ont jamais eu l’intention de nous laisser vivre.
Nous étions perdus avant même d’entrer à Waverly Hills …
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La voix déshumanisée de notre hôte invisible me tire brusquement des profondeurs du passé en m'arrachant un grognement de fureur. Je serre les dents pour ne pas hurler. Il n'existe aucun sentiment plus redoutable que la frustration. Revivre certains épisodes de ma vie ravive l'excitation qui constitue ma part de ténèbres. Ca ne dure qu'un temps, bien sûr. Les sensations perdent en intensité au fil des jours et, lorsqu'elles ont définitivement disparu, il me faut repartir en chasse, cédant à des pulsions incontrôlables. Je suis ce que les criminologues qualifient de tueur organisé. Mais rien dans leur manuel ne saurait décrire avec exactitude ce que je ressens. Le milieu carcéral ne m'a jamais ôté ce besoin de tuer ; seule l'obligation de rester vingt-quatre heures sur vingt-quatre pour sauver ma peau a permis d'espacer les épisodes psychotiques.
Internet est dans l'air du temps. Le cannibalisme virtuel est un phénomène de mode qui attire de plus en plus d'adeptes, preuve -s'il en faut- du mal-être de notre société.
J'ai toujours joué au cavalier solitaire, jouissant égoïstement des sévices infligés à mes victimes. Les partager aurait engendré une rupture à ma psyché. Même la plus pure des folies ne saurait m'unir à quiconque.
Waverly Hill me met à l'épreuve. Quels que soient les secrets emprisonnés entre ces murs, aucun adversaire n'est à la hauteur de mes ambitions.
Rien ni personne ne peut plus m'arrêter dans l'escalade meurtrière que représente ma vie.
La domination n'est pas seulement affaire de pouvoir, mais de destruction de l'autre par l'humiliation.
Et n'oubliez pas, vous seuls serez juges de qui doit vivre ou... mourir !
Je suis un prédateur. Et si je suis désormais incapable de repartir en chasse, alors je m'immiscerai dans vos têtes et ravagerais toutes vos certitudes.Même mort, je viendrai vous hanter jusque dans vos rêves. Je resterai à jamais votre pire cauchemar.
Tant qu’une injonction officielle n’est pas prononcée, Criminal Loft continue. Les Américains raffolent de ce reality show ! L’audience a pulvérisé tous les records connus. Les connexions Internet se comptent par dizaines de milliers. Les lettres « pro-Criminal Loft » affluent par centaines chaque jour !