J'ai emprunté ce roman pour ados à la médiathèque parce que j'aime beaucoup les textes de cet auteur. J'ai été un peu surprise de découvrir une histoire de science-fiction bien que ce soit surtout une histoire de guerre dont la science-fiction tente de mettre un peu à distance l'horreur de ce qu'elle révèle. le résultat est puissant mais pas très réjouissant... C'est un livre-choc qui doit secouer la personne qui le lit.
Bizarrement on y retrouve la même puissance évocatrice des horreurs des opérations militaires qui sont évoquées dans de nombreux films que ce soit « Cheval de guerre », « Tu ne tueras point » ou « Appocalyspe Now ». le contexte, ça se passe dans les plaines bleues qui sont des champs de plantes devenues une énergie aussi recherchée que le pétrole aujourd'hui, l'Euroconfed affronte « l'ennemi » asiatique (PanAsia) dans une ambiance moite évoquant la guerre du Vietnam.
Les armes sont sophistiquées et technologiquement futuristes mais elles blessent, mutilent, déchiquettent les corps sous des camouflages stratégiques aussi sournois que dans n'importe quel conflit.
Le langage est assez cru mais je m'y suis habituée et j'ai aimé voir évoluer la relation entre le jeune soldat volontaire van Dyck, fraîchement sorti de formation avec assurance, rigidité et idéaux et Tiziano, le chef expérimenté, rodé aux opérations de terrain, et complètement désabusé. Il méprise la jeune recrue dès le départ mais va finir par apprécier sa valeur en le voyant faire ses preuves.
C'est le récit d'un jeune militaire plein de belles idées et de bonnes intentions qui découvre la réalité de la guerre sur le terrain... qui n'est jamais exposée pendant la formation.
A faire lire !
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Les enfants, réjouissez-vous, vous allez apprendre quelque chose. En période de guerre, quel est le mot-clé ? Le mensonge. LE MENSONGE. Et comme je suis très gentil aujourd'hui, vous allez avoir droit en plus à une confidence. je vous le chuchote, hein, parce que bon, c'est un secret, normalement : vous êtes tous là pour vous faire enculer. Rassurez-vous. Il ne va pas vous falloir beaucoup de temps pour vous prendre la réalité en pleine gueule. (p.21)
La veille encore, j'eusse obéi à cet homme sans me poser la moindre question, avec la sensation de me soumettre à plus intelligent, plus fort, plus digne que moi. Mais depuis la conversation que j'avais surprise, je considérais le capitaine d'un œil neuf. Et je découvris qu'il n'est pas facile d'obéir sans broncher à un homme qu'on ne respecte plus. (p.48-49)
C'est ça qui cloche, en fait, mon capitaine. C'est qu'en bon soldat j'ai tout accepté, toujours, mais qu'en vieillissant et avec les cadavres qui s'accumulent, j'ai de plus en plus de mal à accepter d'être commandé par des lâches. (p.44)
"Tu vois, Van Dick, ça, c'est un mantra.
- Qu'est-ce que tu racontes encore comme connerie, Azedine ?
- Un mantra. Une formule auto-hypnotique : ils nous font répéter "je tue, je tue", pour nous habituer à la transgression, à... (p.16)
Ici, c'est plus : "Je tue, je tue", c'est : "Je me fais pas tuer, je me fais pas tuer". Clair ? Vous pouvez comprendre ça ? Un soldat mort ne tue plus personne. Pourquoi vous pensez qu'on m'oblige à m'occuper des morveux dans votre genre, qui nous arrivent tout frais des U.A.E. ? Parce qu'autrement y en a tellement qui se font bousiller qu'on dirait qu'ils sont là pour servir de cibles d'entraînement aux gars d'en face. (p.26-27)
"La sorcière et les Manananggals" - Présentation par Jean-François Chabas