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Critique de Fandol


Quel livre d'Histoire ! Quel roman, comme il est noté sur la couverture !
Encore une fois, Sorj Chalandon, mon écrivain préféré, m'a captivé et beaucoup appris ou rappelé avec Enfant de salaud, titre terrible.
Cet auteur m'a régalé à chaque fois avec Une promesse, Mon traitre, La légende de nos pères, Retour à Killybegs, le Quatrième Mur, Profession du père, le jour d'avant et Une joie féroce.
Dans Enfant de salaud, il se confronte au passé de son père. Tout se passe en 1987, d'avril à juillet. Ce qui aurait pu n'être qu'une sordide histoire familiale m'a replongé dans les affres de l'Occupation et du nazisme. Avant d'aborder le côté familial de son récit, Sorj Chalandon rappelle, avec une délicatesse infinie, le drame des enfants d'Izieu, déportés par Klaus Barbie. L'auteur est là, sur les lieux, quarante-trois ans après, là où quarante-quatre enfants et sept adultes qui pensaient être en sûreté, ont été embarqués sans ménagement, après dénonciation. Seule Léa Feldblum est revenue, libérée par l'Armée Rouge, en janvier 1945.
Sorj Chalandon aurait aimé avoir son père avec lui afin de tenter une explication permettant de comprendre pourquoi son grand-père lui a dit, un jour – il avait 10 ans - qu'il était un Enfant de salaud
Remontent alors à la surface des souvenirs d'enfance, des récits extraordinaires de son père se faisant passer pour un héros. La quête de ce fils va être terrible, angoissante, émouvante et dramatique face à ce père qui ment, ce salaud qui a trahi son enfant.
Voilà qu'en cette année 1987, se tient à Lyon, le procès Barbie, le grand chef de la Gestapo dans la Capitale des Gaules. Sorj Chalandon y assiste en tant que journaliste, chroniqueur judiciaire pour Libération, journal dans lequel il a écrit pendant trente-quatre ans.
En écrivain confirmé, l'auteur réussit à faire revivre ce procès hors-normes tout en détaillant sa quête pour mettre au jour la véritable histoire de son père durant la seconde guerre mondiale.
Voilà que cet homme qui fut condamné le 18 août 1945 à un an de prison et à cinq ans de dégradation nationale parce que nuisible à la défense nationale, se met en tête d'assister au procès qui débute le 11 mai 1987 !
Depuis, le temps a passé. J'ai vu cette grande salle des pas perdus qui avait été spécialement aménagée pour le procès, visité le Centre d'Histoire de la Résistance et de la Déportation, à Lyon. D'ailleurs, cet important espace de mémoire a été aménagé dans l'ancienne école de Santé Militaire, là où Klaus Barbie sévissait, ce qui ajoute un intérêt supplémentaire à la visite. Même si j'ai vu le film diffusant des extraits du procès, le temps passe et la mémoire se dilue. Alors, j'ai particulièrement apprécié ce rappel, ces précisions, ces indications jamais rébarbatives sur ce qui s'est passé dans ce tribunal, jusqu'au verdict prononcé dans la nuit du 3 au 4 juillet 1987.
Sorj Chalandon cite les noms des témoins et remet en avant les victimes de la barbarie nazie. Son père était là et l'auteur réussit petit à petit à réunir les preuves de son imposture allant jusqu'à la folie. Ce dossier complet qu'il a pu récupérer récemment, il s'en sert pour tenter une confrontation désespérée avec celui qui l'a trahi, faisant bien ici oeuvre de romancier avec ce talent que j'apprécie tant.
Au fil de ma lecture, j'ai été ému, angoissé espérant toujours une réconciliation entre ce père et ce fils, la mère étant très effacée et ne pouvant rien devant un homme prêt à tout pour se faire passer pour un héros.
Doublement axé sur un procès pour l'Histoire et sur l'imposture de ce père qu'il aime, avec qui il voudrait enfin s'expliquer, Enfant de salaud m'a beaucoup marqué.
J'ajoute un petit clin d'oeil au passage car j'ai relevé à au moins deux reprises l'expression « porter un sac de pierres », expression qu'adore Sorj Chalandon pour faire sentir une quantité de souffrances très dures à supporter comme ce que ce fils a vécu face à ce père incapable d'assumer sa vérité.

Lien : https://notre-jardin-des-liv..
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