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Qui s'y frotte s'y pique ! Je ne parle pas ici du hérisson mais d'Éric Chevillard, en effet en plus de ma dose quotidienne d'Autofictif, il me faut en plus de temps en temps un volume entier de l'auteur, c'est grave docteur ?

Nous le savons bien ; nous avons chacun mille vies potentielles mais une seule à vivre réellement. E. Chevillard ne s'y résout pas, il écrit des autobiographies à tire-larigot, et puis, déçu de leurs contenus il les brûle. Cette fois-ci, un hérisson naïf et globuleux l'empêche de mener à bien son nouveau manuscrit de confessions. Il se prélasse sur son bureau, comment est-il arrivé là ? Il lui bouffe sa gomme (l'unique moyen de s'en débarrasser). Bref, il s'impose et s'attache à lui.

C'est une performance d'écrire sa vie avec un hérisson, là, devant soi, aussi naïf et globuleux soit-il ; une véritable prouesse. Chez Chevillard l'imagination est reine et il pratique la digression à outrance. Mais aussi la poésie, une forme de poésie inédite et bien à lui. Pourtant dans cette autobiographie, se glisse parfois en soupçon de vécu, on l'entrevoit, ici et là. L'auteur malmène la syntaxe par des césures bluffantes mais qui toujours tombe à point. Y-a-t-il dans cette écriture si singulière des contraintes oulipiennes ? En tous les cas ce hérisson est un prétexte, j'en suis sûr

à lire entre les lignes (moi aussi je sais en faire des césures pertinentes ;-) et à y découvrir une ironie et un charme piquant. Allez, salut.
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Je découvre Eric Chevillard par cette histoire étrange d'un auteur assis devant sa table de travail, empêché d'écrire son oeuvre phare, celle qui fera date dans l'histoire littéraire, au titre impossible, "Vacuum extractor", par l'apparition étrange d'un hérisson naïf et globuleux. Une obsession absurde mais réjouissante qui libère la parole d'un écrivain qui s'apparente assez logiquement avec ce petit animal nocturne et replié sur lui-même.
Cette lecture a fait écho à "La Main Coupée" de Blaise Cendrars, dans un passage où les soldats de la Grande Guerre, terrés et caparaçonnés dans les tranchées, se retrouvent à vivre avec un hérisson, une sorte de double, où chacun fait la boule pour résister aux violences du réel.
Belle découverte!
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N°1780– Septembre 2023

Du hérissonEric Chevillard – Les éditions de Minuit.

L'écrivain veut écrire sa propre biographie. Pourquoi pas, et on n'est jamais mieux servi que par soi-même et on peut régler ainsi ses propres comptes et formuler ses propres explications à ses nombreuses contradictions, formuler ses confessions, dire des choses intimes jusque là jalousement cachées...Il a même déjà le titre « Vacuum extractor » et pas mal de notes. C'est important. Il s'installe donc à son bureau avec tous les outils traditionnels nécessaires à l'écriture... et avec un hérisson « naïf et globuleux » suivant sa propre expression. Que fait-il là et surtout comment est-il arrivé là; Là aussi pourquoi pas si cet improbable animal favorise sa démarche comme d'autres ont besoin d'un chat pour aiguillonner leur inspiration. Sauf que ce n'est pas exactement ce qui se produit et ce hérisson va perturber la démarche créatrice de l'écrivain en bouleversant son univers immédiat au point que ce dernier va brûler ses notes et laisser cette bête manger sa gomme (mais pas ses crayons) au point de ne nous parler que de ce hérisson, de sa naissance, sa vie amoureuse, son régime alimentaire, son quotidien, de ses prédateurs, de sa mort… mais d'autobiographie, rien, à part quelques rares réminiscences.

Le titre lui-même est archaïque (Du hérisson) et ressemble à ceux usités jadis pour parler d'une étude scientifique ou philosophique, mais ce livre est annoncé comme un roman, c'est à dire qu'il est du domaine de l'imaginaire et donc apparemment à l'opposé d'une biographie, ce qui peut dérouter le lecteur désireux d'en apprendre davantage sur un auteur quasiment inconnu. Il y a bien des confidences et même de douloureux secrets, parfois inattendues comme le viol du narrateur alors enfant par un prêtre, mais cela donne tout de suite dans l'absurde et donc dans le non crédible. Pourtant ce texte, par ailleurs assez déconcertant (mais avec Chevillard nous commençons à avoir l'habitude), me paraît personnellement révélateur de ce qu'est le phénomène créatif. Au départ l'auteur a un projet mais, rapidement et sans qu'il sache pourquoi, les choses ne s'articulent pas comme il en avait le projet et le texte part dans un autre sens, le personnage principal (le hérisson) s'impose dans un contexte différent.. Ici le hérisson qui dévore les pages symbolise, à mon avis, ce phénomène qui brouille la démarche créatrice et transforme le projet initial, la biographie, en quelque chose d'impossible à écrire et qui échappe à l'auteur. Il y a vraiment là de quoi le perturber, et accessoirement le lecteur, et explique, peut-être, ses nombreuses et néanmoins coutumières divagations et vaticinations qui, plus souvent qu'on ne le croit, polluent l'écriture, C'est un peu comme si ce hérisson était toujours resté tapi dans l'inconscient de l'auteur et, profitant de cette envie qu'il a d'écrire sa propre biographie se manifeste d'une manière à bousculer ce projet et d'imposer sa présence. C'est de lui qu'il faut parler et pas d'autre chose ; du coup l'auteur se demande si d'autres hérissons n'ont pas existé.auparavant mais ne sont pas morts à cause du défaut de volonté de l'auteur, de son manque de disponibilité au regard de l'écriture. Je me trompe peut-être mais c'est comme cela que je vois les choses, à moins que ce ne soit tout simplement son imagination débordante. :.

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L'écrivain seul et industrieux à sa table de travail, prêt à l'abdication de son ambition littéraire, est sur le point de démarrer l'écriture d'un roman réaliste et autobiographique - sous le savoureux titre de Vacuum extractor - dans lequel il dévoilera tous ses petits secrets. Alors il aperçoit, dans l'angle de cette même table, un hérisson naïf et globuleux.

Et donc tout en brûlant ses manuscrits inédits dans l'antre de sa cheminée, au lieu de suivre son projet initial, Éric Chevillard nous sert du hérisson, petit animal forcément affublé des adjectifs naïf et globuleux. Et donc le hérisson naïf et globuleux, objet et pensée perturbatrice, et l'histoire personnelle que l'auteur voulait écrire, se disputent l'énergie de l'écrivain et l'espace de la page, dans un texte d'une intelligence, d'une fantaisie et d'une drôlerie sans limites, où l'ensemble du monde tout à coup se mesure, à l'aulne d'un hérisson naïf et globuleux.

« Mon hérisson naïf et globuleux me regarde sans peur. On connait mal sa tête. C'est dommage. Comme si on ne le voyait que de dos, ou de haut. Les Celtes le nommaient l'affreux (gráineóg). Tant pis pour eux. Son histoire est celle de Peau d'Âne. Sous la pelisse grossière se trémousse une belette souple et fluette. L'homme fait sans cesse affront à l'animal, ainsi par exemple au crabe, nettoyeur des plages, multiple comme une main de coiffeur dans la frange de la mer, pacifique habitant des eaux calmes

devenu le symbole du cancer. On me permettra aussi de déplorer que le virus de l'immunodéficience humaine affecte plus ou moins dans nos représentations la forme du hérisson naïf et globuleux. Certes, ce dernier aspire à se rendre effrayant et cette modélisation prouve qu'il y parvient au-delà de ses espérances. Mais ne symboliserait-il pas mieux encore la santé, le triomphe d'un système défensif et immunitaire à toute épreuve ? C'est à peine si le venin de la vipère trouble son sang. Il faut le frapper avec une pelle pour le contusionner et si l'on ne disposait pas de témoignages, fort peu nombreux au demeurant, émanant de chauffeurs de poids lourds, on pourrait croire qu'il ne saigne jamais du nez. »

Le hérisson est tour à tour petite chose, forteresse et titan, fantaisie métaphysique et rempart infranchissable contre le réalisme et l'ennui d'une oeuvre littéraire qui raconterait une vie vide de sens.

Lors d'une soirée magique à la librairie Charybde, Pierre Jourde qui officiait ce soir-là comme libraire invité, a parlé d'Eric Chevillard comme de l'écrivain absolu. Je veux donc rendre grâce à Pierre Jourde, qui au-delà de l'auto fictif m'a fait plonger avec jubilation dans le monde enchanté du langage de Chevillard.

«Écrire, je croyais que c'était cela

pourtant, précipiter le monde dans une formule, tenir le monde dans une formule, court-circuiter les hiérarchies, les généalogies, ce faisant produire des éclairs, recenser les analogies en refusant la comparaison trop facile du hérisson naïf et globuleux et de la châtaigne dans sa bogue malgré la tentation permanente et sa démangeaison insupportable, créer du réel ainsi en modifiant le rapport convenu entre les choses ou les êtres, élargir le champ de la conscience, en somme, au lieu de le restreindre à nos préoccupations d'amour et de mort ou comment se porte mon corps

ce matin ? Mais non, décidément, je suis seul sans doute à penser cela. Me serais-je trompé sur la nature et l'enjeu de la littérature ?»

Éric Chevillard n'est pas totalement seul mais ils sont tout de même assez peu nombreux, à refuser ainsi toute banalité, à faire preuve d'une exigence absolue, d'une telle puissance de la fantaisie et de l'imagination, et à nous donner une telle jubilation.
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Je n'avais jamais lu Eric Chevillard. Pour un premier roman, on peut dire que c'est déconcertant ! Cela ne ressemble à rien de connu.
Un écrivain s'apprête à écrire sa vie quand il est perturbé par l'apparition d'un "hérisson naïf et globuleux", installé sur sa table.
Commencent alors les interrogations sur ce hérisson inattendu, des digressions, des anecdotes, des informations sur les hérissons et du coup, le récit de sa vie n'avance pas.
Surprenant, drôle et réjouissant par moment mais plus à considérer comme un exercice de style brillant .
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Pauvre écrivain que notre héros, condamné à ne pas écrire l'oeuvre de sa vie à cause de l'apparition soudaine et inopportune d'un hérisson naïf et globuleux sur sa table de travail ! Imaginez. Vous vous installez pour la nuit à votre table de travail, avec votre crayon, votre gomme, et vos belles feuilles blanches, afin de coucher noir sur blanc l'histoire palpitante de votre vie, d'exposer vos tripes, vos douleurs et peines au monde entier, et voilà que sur votre bureau apparaît comme si de rien, un petit hérisson naïf et globuleux dont vous n'avez que faire, et qui, bien entendu, contrecarre tous vos plans de travail nocturne. Car quoi de plus perturbant qu'un hérisson naïf et globuleux sur une table de travail ?

Lire la suite sur mon site : http://chroniques.annev-blog.fr/2012/04/chronique-livre-du-herisson/
Lien : http://chroniques.annev-blog..
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Portée par l'enthousiasme amoureux que m'inspirait l'autofictif, j'ai approfondi ma connaissance de son oeuvre avec le hérisson.

L'animal, “ un sac à puces amateur de limaces et de charognes ”, “ petit goinfre nécrophage sale comme un peigne ” est décrit de manière fort réaliste et sans illusions sur sa personne. le naturaliste y trouvera son compte.

Ce texte improbable a une forme primesautière. Éric Chevillard exerce sa verve à toutes vapeurs. Il rebondit de mot en mot, cale une anecdote par-ci, un élément autobiographique par-là, saute du hérisson à la poire et de la poire aux omnivores. Éléphant, hirondelles, loir, autruche, pipistrelle, taupe et Dieu – dans ses déboires d'obsessionnel compulsif – s'invitent à la fête.

“ Quand je vois un lion rugir, c'est communicatif, je baille. ” (22)

Nous retiendrons l'idée d'un manteau en peau de hérisson permettant de se rouler en boule quand le besoin s'en fait sentir.

Fantaisiste et créatif.
Lien : http://versautrechose.fr/blo..
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Un livre en forme de hérisson. Ca c'est de l'autofiction au sens noble. Hilarant et virtuose comme d'habitude... Chevillard est un grand styliste décidément.
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