Soit le récit du marathon des JO de Rome de 1960, du point de vue d'Abebe Bikila, son vainqueur.
Sylvain Coher s'essaie à l'exercice sous forme d'un long monologue (entrecoupé régulièrement par des extraits des commentaires radio de l'époque) à la fois pour évoquer le déroulement de la course bien sûr, mais aussi les pensées du vainqueur et le contexte historique sous-jacent qui fit que ce marathon reste encore à ce jour le plus célèbre des Jeux Olympiques.
Le défi littéraire était passionnant par sa forme inhabituelle et on sent que
Sylvain Coher s'est beaucoup documenté, aussi bien sur le parcours, le déroulement de la course, la préparation minutieuse d'Abebe Bikila ou la portée tant sportive que politique de cette victoire. Vous y saurez même, pour l'anecdote et ceux qui l'ignorait, pourquoi les courses se font toujours dans le sens anti-horaire. C'est dire...
Seulement voilà, on déchante très vite : la plume très littéraire de l'auteur qui parsème de son monologue de multiples citations et références ne colle malheureusement pas du tout au sujet. Car enfin, imagine-t-on un jeune caporal de l'armée éthiopienne penser en citant, au hasard,
Faulkner,
Dostoïevski ou… la Bible ? A trop vouloir soigner la forme,
Sylvain Coher ne réussit qu'à nous tenir très éloigné de son personnage principal : on n'y croit pas un seul instant. de même, l'effort physique, la souffrance, le dépassement de soi qui sont l'apanage des coureurs de fond ne sont évoqués qu'à travers des termes très techniques. Ça ne sent pas la sueur, on ne « vit » jamais réellement cette course. Pire, on se surprend, à voir défiler les kilomètres et les chapitres à ressentir un certain ennui : peu de rythme dans ce récit sans suspense qui – pour filer la métaphore – s'essouffle très vite pour ne laisser, tout au bout qu'une forte déception là où l'exploit d'Abebe Bikila et sa portée symbolique presque unique auraient dû nous transporter.
Pas inintéressant, non, mais vraiment hors-sujet. le grand roman de celui qui devint le premier médaillé d'or d'Afrique Noire et qui parvint à gagner dans la capitale du pays qui avait envahi l'Éthiopie presque trente ans plus tôt reste encore à écrire...