Citations sur Tout ce qui meurt (50)
Sur la côte de la Casuarina, dans la région du delta d'Irian, en Nouvelle- Guinée indonésienne, vit une tribu appelée les Asmats. Forte de vingt mille hommes, elle est la terreur de toutes les tribus avoisinantes. Dans leur langue, Asmats signifie "le peuple -- les êtres humains". Ils se définissent comme les seuls humains, tous les autres étant relégués au statut non-humains, avec tout ce que cela suppose. Les Asmats ont un mot pour désigner les autres : ils les appellent les manowe. Ce qui veut dire "ceux que l'on peut manger".
Mais faut toujours qu'il y ait un con qui se croit immortel parce qu'il n'est pas encore mort.
- Je songe à prendre ma retraite, me dit Walter. Je n'ai plus envie de regarder la mort. J'ai lu Sir Thomas Browne. Tu as déjà lu Thomas Browne ?
- Non.
- Morale chrétienne : " Ne contemple pas les têtes de mort au point de ne plus les voir, ni ne dédaigne les objets mortifères au point de les négliger. " ( il me tournait le dos, mais je distinguais le reflet de son visage dans la vitre, et son regard semblait se perdre dans le lointain. ) J'ai passé trop de temps à regarder la mort. Je ne veux plus me forcer à regarder.
Mon grand-père disait toujours que le bruit le plus terrifiant du monde est celui d'une cartouche qu'on engage dans la chambre d'un fusil à pompe, une cartouche qui vous est destinée.
- Pourquoi le Diable a-t-il été banni du paradis ?
- Pour son orgueil, dit Angel. Je me souviens que soeur Agnes nous en a parlé. ...
... Les "Fils de Dieu" étaient les anges, qui cédèrent au désir sexuel contre la volonté de Dieu. Le chef des anges pécheurs, le Diable, fut jeté dans un gouffre de ténèbres au coeur du désert et ses complices livrés aux flammes. Leur descendance, "les esprits du mal sur terre", les accompagna. Le martyr Justin croyait que les enfants nés de l'union des anges et des femmes humaines étaient responsables de tout le mal sur terre, y compris le meurtre.
"En d'autres termes, le péché du Diable était l'envie. L'envie d'humanité, cette "faiblesse de notre genre"".
Et je savais également qu'une vie comme celle de Walter Cole - une vie presque banale, qui se nourrissait de petits bonheurs et cultivait la beauté du familier, mais en même temps se distinguait par la valeur qu'elle accordait à ces moments de simplicité - était une vie enviable.
Nous ne croyons plus au mal, mais nous croyons aux actes diaboliques, que la science de l'esprit nous permet toujours d'expliquer. Le mal n'existe pas ; y croire relève de la superstition, comme de regarder sous le lit, le soir, ou d'avoir peur du noir. Et pourtant, il est des hommes pour lesquels nous ne possédons pas vraiment de réponse, des hommes qui commettent le mal parce qu'il est dans leur nature, parce qu'ils sont maléfiques.
Même dans l'obscurité, je sais où les trouver et elles, de leur côté, peuvent me trouver.
Parfois, elles viennent à moi, dans ce court intervalle qui sépare le sommeil de l'éveil, lorsque les rues livrées à la nuit sont encore silencieuses, ou quand l'aube s'insinue entre les rideaux pour répandre dans la pièce un semblant de clarté. Elles viennent à moi et je distingue leurs silhouettes dans la pénombre, ma femme et ma fille, ensemble, qui m'observent sans un bruit, empourprées du sang de leur mort brutale. Elles viennent à moi, et leur haleine accompagne le vent léger qui glisse sur ma joue, et leurs doigts se mêlent aux branches d'arbres qui frappent à ma fenêtre. Elles viennent à moi, et je ne suis plus seul.
Nous ne croyons plus au mal, mais nous croyons aux actes diaboliques, que la science de l'esprit nous permet toujours d'expliquer. Le mal n'existe pas; y croire relève de la superstition, comme de regarder sous le lit, le soir, ou d'avoir peur du noir. Et pourtant, il est des hommes pour lesquels nous ne possédons pas vraiment de réponse, des hommes qui commettent le mal parce qu'il est de leur nature, parce qu'ils sont maléfiques.
Les hommes comme Johnny Friday et ses semblables choisissent pour proies celles et ceux qui vivent à la marge de la société, celles et ceux qui se sont égarés. Il est facile de se perdre dans les ténèbres qui règnent à la lisière de la vie moderne, et là, une fois qu'on est seul et perdu, des choses nous guettent. Les superstitions de nos ancêtres étaient fondées: il y a des raisons d'avoir peur du noir.
(p.170)
Quelqu'un a écrit, un jour: " la justice nous sera donnée dans notre prochaine vie. Dans celle-ci, nous avons la loi."