Mourir au monde

La vie religieuse est une tempête. Les courants se mêlent, le vent vient des quatre coins du monde. Ce que vous prenez pour une éclaircie est peut-être le signe d'un orage. La foudre est peut-être votre délivrance. Et surtout, votre foi est mise à l'épreuve. Toujours. La paix vient avec le temps mais ne s'acquiert jamais tout à fait.

Vous répondez à un appel en vous oubliant, Jeanne. Si vous dites Oui au Christ, vous ne vous appartenez plus. Vous perdez votre bue. Ce n'est pas un sacrifice dont vous devez vous enorgueillir. C'est une promesse.
Il n'y a pas de gloire à en tirer. La vie religieuse sonne une fin.
C'est mourir au monde.

" Vous répondez à un appel en vous oubliant Jeanne. Si vous dites oui au Christ, vous ne vous appartenez plus. Vous perdez votre vie. Ce n'est pas un sacrifice dont vous devez vous enorgueillir. C'est une promesse."

Il n'y a pas de gloire à en tirer. La vie religieuse sonne une fin.

"C'est mourir au monde."

Il y a ensuite une renaissance.

" Vous vivez, mue par un amour rédempteur. Vous acceptez d'être détruite en vue d'être créée à nouveau."

Face à la candeur de sa postulante, Sœur Anne croule sous le poids de son orgueil. Elle qui se croyait martyre. Elle était une parjure, enfermée dans une spirale de souffrance qui, croyait-elle, justifiait son choix de vie. Mais sa vocation est devenue un trou noir. Devant la joie béate de Jeanne, elle ne peut s’empêcher de se poser une question : a-t-elle déjà été aussi heureuse, même au tout début ?

Ni l’une ni l’autre ne réfléchissent à la nature de leur lien. Il est unique, et peut-être même d’un autre monde.[…] Bientôt, Jeanne comprend qu’elles n’ont pas le même coeur. Le sien est capable de tout quand celui de Soeur Anne a été surpris par une douleur qu’elle croyait inexistante. La perte, la déception, l’horrible impression d’avoir été déplacée et rangée au mauvais endroit. De ne plus exister. Il y a des choses, craint Jeanne, que même l’amour ne peut soigner.

Ma vie religieuse m’a appris ceci : aimer ne revient pas à voler la vie de l’autre.

Votre foi fortifie la mienne. Le monde a la couleur de votre espérance, il est éclatant et je le redécouvre avec enchantement. Si je pleure, je pleure le sourire aux lèvres.

L'orgueil de toujours croire qu'on a quelque chose de plus beau à dire que le soleil qui se couche.

Je ne veux pas retourner à ma vie d'avant,celle où vous n'existiez pas.Alors ,je préfère poursuivre mon chemin,espérer vous rencontrer à nouveau.J'aurai sans doute besoin de ce sourire que vous avez et dans lequel j'aperçois un bonheur mystérieux.Il est si difficile de croire en Dieu à mesure que les années passent.Il y a des nuits, je vous l'assure ,où l'on hurle que tout est un mensonge. Il m'a suffi de vous écouter pour savoir que je faisais erreur.J'aurai voulu rester auprès de vous jusqu'à la mort pour attraper un peu de votre lumière. Vous avez été assez généreuse pour la transformer en musique. Vous m'avez offert une mélodie que je n'oublierai pas.Je vous y retrouverai.Je vous attendrai.
À bientôt, trésor.
Soeur Anne.(Page 156).

Le ciel que vous avez connu est mort. Il faut en créer un autre.