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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Corneille a écrit Mélite ou les fausses lettres en 1625, soit à 19 ans à peine ; la pièce sera jouée la première fois en 1629. Je suis impressionné par la maîtrise des ressorts de la comédie alors qu'il est encore si jeune. Car pour sa première pièce, l'auteur assure.

L'argument, comme on dit, est évidemment une variation sur les complications amoureuses. « Évidemment », en fait cela ne va pas de soi chronologiquement parlant. Dans l'article Wikipédia consacré à la pièce, il est dit que Corneille crée un nouveau genre théâtral : la comédie de moeurs. C'est donc la première en son genre.
Amours compliquées donc. Quelle idée aussi de la part d'Éraste, qui cherche à séduire Mélite sans succès depuis deux ans, d'aller la présenter à son ami Tirsis, juste pour lui prouver que même être un indifférent à l'amour comme lui peut craquer ?
Évidemment, Tirsis craque et c'est réciproque. Il se trouve que les deux jeunes ont un point commun : ils s'estiment au-dessus des émotions amoureuses. Ils vont donc se jouer le jeu du « tu vois, je te fréquente, mais je ne t'aime pas vraiment hein » jusqu'à ce que ces faux semblant cèdent.

Éraste n'apprécie pas et devient mauvais. Il écrit de fausses lettres où Mélite s'épanche sur son amour infini pour Philandre, l'amant de Cloris, la soeur de Tirsis. Philandre les reçoit, résiste, mais finit par céder et se convaincre qu'il est amoureux aussi. L'information fuite. Cloris se fâche contre Philandre et Tirsis veut le défier en duel. La réputation de Mélite, qui n'y comprend rien, en prend un coup.

Il s'agit d'une comédie, donc tout finira bien. Un long passage assez hors sol montre Éraste qui pète les plombs quand il apprend que Tirsis et Mélite ont « passé l'arme à gauche ». Corneille se lâche dans ses longues déclamations. le gars a l'air aussi dingue que Hamlet. J'ai quand même un peu tiqué à la clémence dont font preuve Mélite et Tirsis envers lui (clémence facile que Corneille réutilisera dans Clitandre), même si, déconfit, il vient leur offrir sa vie à genoux. En revanche, le sort de Philandre, que Cloris envoie balader, est tout à fait justifié. Il faut dire que les personnages féminins ont une étonnante force de caractère, même la nourrice qui parvient à sortir Éraste de sa folie passagère.

Corneille s'y connaissait donc en comédie, j'en suis convaincu. Aurait-il été l'auteur caché de certaines pièces attribuées à Molière ? Vérité ou fake news ? Franck Ferrand y croit, Francis Huster trouve l'idée odieuse. le débat ressort de temps en temps dans l'actualité, comme pour la localisation d'Alésia.
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Trois amants qui sont eux-mêmes amis, deux maîtresses. Cela pourrait être une comédie sentimentale en chassé-croisé, un peu comme la Place Royale. Mais l'un - Tircis, prétend ne rechercher que la richesse de la dot d'une prétendante. L'une, Mélite, se dit elle aussi insensible à l'amour ; j'ai bien aimé les premières scènes de ce personnage, car elle affirme clairement ne pas aimer faire l'amour au sens classique de parler d'amour, elle se moquer ouvertement de celui qui s'affiche comme son prétendant. Oui, cela pourrait être une comédie légère de jeunes qui changent rapidement d'affection.
Mais l'acte IV est à part pour sa noirceur, évoquant - sans le présenter un duel entre deux prétendants, une amante mourant de désespoir, une victime innocente prise dans toutes ces machinations, et un trompeur qui devient fou. J'ai particulièrement apprécié cette rupture de ton, l'irruption de la tragédie. Eraste dans sa folie pourrait annoncer et précéder Oreste et "ces serpents qui sifflent sur nos têtes", avec son insistance pour les Euménides et ses descriptions des Enfers...
L'acte V est moins fort à côté, les couples se refont, les amoureux sont contents. La comédie revient, puisqu'une troisième femme apparaît, la Nourrice, pour être offerte en consolation à l'amant délaissé...
Inégale mais intéressante donc, pour son basculement des genres.
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