Les gens urbains

Alban et Hugo, deux amis, discutent à la terrasse d'un café. Pas peu fier de son nouveau coup pour attraper les gonzesses, Alban explique à son copain qu'il leur offre sa montre clinquante, leur faisant croire qu'elle coûte très cher alors qu'il ne l'a achetée qu'un euro. Son plan infaillible, comme il le croit, risque bien de tomber à l'eau le jour où Alban essayera de faire la même chose... sur une fille que Hugo aura tenté d'appâter...
Dans un cyber-café, Jean-Marc attend Sylvie, sa dernière conquête qu'il a rencontré via internet. Mais bien loin de la photo de Julia Roberts qu'elle a utilisée pour se décrire, c'est une jeune grassouillette qui se présente devant lui... Comment lui faire comprendre gentiment qu'elle n'est pas son genre?
Et c'est aussi les histoires de Ludivine qui veut s'inscrire à des cours de gym mais qui trouve déplacés les gestes du professeur, de Fred dont la maman a vendu sa voiture sans le prévenir et qu'il tentera de récupérer, de Sylvie (la même) qui retente sa chance sur internet et décide pour cela de commencer un régime et d'Alban qui a trouvé un nouveau moyen d'arnaquer, cette fois, ses propres amis...

Les gens urbains est un recueil de petites histoires toutes aussi drôles, cyniques, agaçantes, piquantes ou sympathiques de jeunes personnes trentenaires qui s'amusent de l'autre. Faites de petites indélicatesses, de moqueries, d'absurdités ou de goujateries, ces saynètes reflètent, non sans un certain humour, les entourloupes et les déviances de notre société en quête de reconnaissance ou d'amour. Quant au dessin subtilement minimaliste, Maud Millecamps a réussi à merveille à retranscrire cette société en mal d'inspiration. Au trait anguleux et direct, aux couleurs vives et pimpantes, cet album, à prendre au second degré, étonne, énerve ou surprend le lecteur.

Les gens urbains... ouf, j'habite en campagne!

Les gens urbains sont-ils tous détestables au plus haut point ? Il y a là toute la mesquinerie humaine sous le couvert de la séduction. Je ne sais pas si cela se voulait drôle mais je n'ai pas franchement apprécié les aventures superficielles et les déboires sentimentaux de ces citadins ordinaires. le trait, la colorisation, les décors urbains sont quant à eux plutôt réussis.

Les auteurs voulaient-ils délibéremment une oeuvre moderne et cynique à la fois ? Je ne sais pas et je dois bien avouer que je m'en fiche un peu. Ce n'est pas mon genre. Je pense d'ailleurs que cela ne doit pas être le genre de la majorité des lecteurs à moins de baigner dans un tel milieu nombriliste où la gougaterie règne en maître absolu. On passera son chemin sans équivoque possible.

Cet album regroupe quelques nouvelles dessinées peu ou prou sous la forme de la "ronde", c'est à dire que chaque nouvelle voit apparaître un nouveau personnage jusqu'à reproduire, dans la dernière, le schéma de la première. Il met en scène quelques histoires d'amour, ou plutôt de drague dans un décor bruxellois plutôt bien restitué. On pourra au choix s'agacer d'un certain cynisme des personnages qui ne visent globalement qu'à satisfaire leurs pulsions, ou s'esbaudir de leur sans-gêne et de leur franc-parler. le plus remarquable cependant de cet album publié en 2011, apparemment sans trop de succès, réside à mon avis dans son aspect antropo ou archéologique. Ces dialogues dans un monde où le numérique existe déjà mais n'est pas encore omniprésent me semblent assez fascinants, j'ai repensé en le lisant au film "Bancs publics" de Podalydès (qui lui n'est pas simplement distrayant, mais un véritable chef-d'oeuvre).