AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,96

sur 1974 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
- Hello Fils, aujourd'hui je vais te présenter un ouvrage de science-fiction contemporaine : « la zone du dehors » écrit par Damasio, un des rares écrivains français ayant une certaine notoriété. Ici c'est son premier ouvrage, sorti en 1998 et retravaillé par la suite lors de rééditions.
- Et ? Quel est le sujet ?
- Suite à une guerre sur terre, dont nous n'entendrons pas plus parler, un groupe d'hommes s'est installé sur un satellite de Saturne et a fondé Cerclon. Ils sont 7 millions au début de cette histoire. le sujet est avant tout politique au sens noble (vie de la polis). En effet cette société est démocratique au sens où chacun vote, elle offre à tout citoyen une vie confortable et la sécurité. La mobilité sociale est effective puisque tous les deux ans il y a le clastre où chacun va se voir attribuer un nouveau rang en fonction de sa productivité, de l'appréciation de son entourage et de son comportement. Ce rang est manifesté par un nom comprenant 1 lettre pour les dirigeants (A est le premier) et 5 lettres pour le bas de l'échelle sociale. de nombreuses décisions sont prises par des référendums et l'essentiel de la population est globalement satisfait de son sort.
- Par certains aspects cette société ressemble donc à la nôtre ?
- Oui, par la plupart à dire vrai puisque le but de Damasio est avant tout de critiquer avec virulence nos sociétés occidentales contemporaines.
- Qu'est ce qui lui déplaît ?
- Cet auteur, en s'inspirant de Nietzsche (ou plus exactement de Nietzsche relu par Deleuze) et de Foucault va proposer une critique radicale de nos sociétés à travers celle de Cerclon. Pour lui nos sociétés sont des sociétés de contrôle. le gouvernement mais aussi les multinationales, les technologies et les médias manipulent les individus et les opinions pour obtenir le consentement de chacun à une forme d'aliénation. L'individu devient normalisé et perd sa liberté. Il se soumet à une servitude volontaire, accepte une hiérarchie aliénante et finit anesthésié, paralysé dans une vie étriquée et triste. En ayant renoncé à une liberté effective en échange de la sécurité, d'un consumérisme de masse et d'une position sociale il finit en réalité seul et invertébré, malléable et éteint.
- Rien que cela ?! En même temps tu as dû adorer, toi qui ne cesses de critiquer l'abandon des libertés individuelles effectives, le marché de dupes qu'est le consumérisme de masse et le côté invasif et infantilisant de l'État lorsque, par exemple, il impose des étiquettes sur le tabac mais aussi sur les aliments gras. Je sais que tu revendiques le fait que chacun puisse faire ses choix et assumer ses risques en toute indépendance. Tu n'es pas non plus le dernier à dire que les sondages visent à manipuler l'opinion et que la démocratie masque souvent des rapports de forces et une grande brutalité, à déplorer l'absence d'initiative des individus et je pourrais poursuivre. Enfin je te sais passionné par Nietzsche, Deleuze voire Foucault. Damasio est donc ton auteur fétiche du moment ?
- Pas du tout ! À dire vrai j'ai lu ce livre car je n'avais pas aimé du tout « La horde du contrevent », adulé par tout un lectorat et ai aussi peu apprécié celui-ci, pour des raisons voisines.
- Ah ?
- Oui, mais j'en reviens à l'histoire dans un premier temps. Nous suivons un mouvement qui s'oppose à cette forme de consensus mou : la Volte. Il est dirigé par 5 personnes qui forment le Bosquet et que nous suivons durant tout l'ouvrage. Damasio fera d'ailleurs s'exprimer chacun, avec son style, ses préoccupations, sa voix propre durant le récit et c'est très agréable d'avoir des points de vue et un style différent selon la personne qui s'exprime. J'en profite pour dire que l'auteur a une très belle plume, un style soigné, une écriture inventive et organique. Les jeux de mots mais aussi de sonorité ou de sens sont en prime rarement gratuits et servent à rendre le propos à la fois clair et vivant. le personnage principal, car il y en a un, s'appelle Captp et enseigne la philosophie à l'université, ce qui permet à Damasio de le faire disserter et, donc, de développer ses points de vue. Différents lecteurs sont critiques quant à des passages qu'ils trouvent lents et théoriques, complexes parfois aussi, je ne suis pas de cet avis. Ils sont sans doute maladroits mais c'est une oeuvre de jeunesse et ils concourent à la clarté d'exposition de l'ensemble.
- Je comprends de moins en moins tes critiques.
- J'y arrive. Cette Volte va s'opposer aux dirigeants de Cerclon mais aussi à la population pour tenter de la secouer, de la pousser à évoluer, non à se révolter mais à pratiquer une « volition » et à vivre autrement, de façon plus libre. Pour se faire il y aura des actions de plus en plus violentes, des morts et une forme d'apologie d'actions brutales pouvant être associées à une forme de terrorisme. Même si cet ouvrage prétend réfléchir à la question cet auteur, dans la lignée de ses positionnements « anarchistes et à la gauche de toute gauche » (je cite Damasio) revendique clairement le fait que la fin justifie à peu près tous les moyens.
- Oui, tu apprécies peu cette forme de radicalité.
- C'est exact. Je considère que, si chacun doit pouvoir vivre comme il l'entend, cela vaut pour tous, justement, et que nul n'a à dire à autrui comment il doit vivre, encore moins en le tuant. La liberté individuelle peut et doit trouver d'autres voies d'expression. Mais, au-delà, je reproche à Damasio, d'avoir une lecture pauvre et caricaturale de Nietzsche, guère plus juste que celle que voulaient en avoir les nazis en leur temps. Ce philosophe défend bien par exemple la notion de surhomme ou la volonté de puissance mais il parle des idées et de la vie de l'esprit. Et il ne cache pas son mépris pour qui veut enrôler des disciples. Plus généralement les passages où Damasio expose ses idées ne valent guère plus qu'une médiocre dissertation de terminale. Vouloir en faire un écrivain intellectuel me semble abusif, au moins pour le second terme car, je le répète, il a une belle plume.
Au-delà de ce reproche quant à la maîtrise profonde des « grands noms », invoqués plus qu'évoqués, et qui ne sauraient, selon moi, servir de caution intellectuelle à ce roman je vois aussi deux autres points faibles principaux.
Le premier a été relevé par la critique de PdB et elle est que cet écrivain donne aux femmes un rôle de second plan. Elles sont en effet avant tout des objets sexuels ou des mères ou des repos du guerrier. Elles n'ont en tous les cas pas un statut équivalent à celui des hommes. C'est d'ailleurs surprenant pour cette mouvance politique, habituellement dénuée de sexisme. Dommage pour un modèle social se voulant idéal.
Le second, plus général, est que Damasio propose comme modèle alternatif à nos sociétés démocratiques, ici comme dans « La horde du contrevent » d'ailleurs, la constitution d'une micro société associant quelques individus différents et complémentaires qui luttent toujours contre un ennemi dont ils ont d'ailleurs besoin pour assurer leur cohésion. Ici c'est un pouvoir détesté, dans l'autre ouvrage c'est un vent omniprésent. Ce « modèle » repose aussi beaucoup sur la sexualité en dehors du combat, sur des amitiés et inimitiés et sur des liens sociaux forts entre un petit nombre de personnes. L'individu existe aussi avant tout dans l'acte, l'action et pas dans la réflexion. de ceci doit naître la joie, un feu, un « jouir ». C'est un peu court et donne largement l'impression que l'auteur, en réalité, peine à appréhender ce qu'il veut dénoncer à savoir les organisations collectives complexes unissant des millions d'individus et propose un retour à un modèle somme toute très proche d'une tribu idéalisée de chasseurs-cueilleurs confrontés à une nature hostile. Sans doute conscient de cette limite Damasio insiste, dans les sociétés se voulant porteuses de sens de la fin de l'ouvrage, sur l'importance de l'art, de la création, sur le fait de repousser les frontières, mais c'est peu convaincant. Son "modèle" ne semble à dire vrai pouvoir correspondre qu'à quelques mâles jeunes, avec des convictions anarchistes, un penchant pour l'action, la fête, le sexe, des relations sociales peu nombreuses et denses, affectionnant les rapports de force et l'adrénaline voire la violence et abhorrant l'autorité, le consensus et toute organisation où ils ne sont pas dominants... Cela ne fait pas une société mais représente au plus certaines aspirations d'un petit groupe de personnes. Faire société est justement réussir à faire coexister des êtres infiniment plus différents dans ce qu'ils sont mais aussi dans ce qu'ils aspirent à faire, à être, à vivre, à partager.
- Papa tu deviens bavard. Et si tu devais, pour une fois, proposer une synthèse en quelques lignes de cet ouvrage que dirais-tu ?
- Ce livre est l'oeuvre d'un individu de sexe masculin, fort jeune et marqué par un refus épidermique de la social-démocratie. Ces caractéristiques pèsent lourdement sur ce roman qui se veut une critique radicale de nos sociétés et peine à convaincre. C'est encore bien pire lorsque Damasio propose un modèle alternatif qui se voudrait à large portée ou tente de s'appuyer sur des philosophes qu'il caricature. En revanche la plume est belle et souvent inventive, les scènes d'action sont plaisantes et rythmées et l'ensemble se laisse découvrir sans déplaisir à condition de ne pas en attendre trop. Ce peut donc être une lecture agréable pour qui renonce à son esprit critique et se laisse charmer. Pour qui recherche en revanche une réelle réflexion sur ce type d'idées il faut lire Nietzsche, Deleuze Foucault mais aussi Harari ou Stiegler. le lien que j'indique pour conclure, tout en restant d'un accès facile, est bien plus concis, complet et riche qu'un ouvrage de Damasio. Ce peut être une bonne introduction pour une réflexion sur ces concepts.
Commenter  J’apprécie          425
Science-fiction à saveur philosophique sur un satellite de Saturne.

Après des catastrophes et des guerres terriennes, des populations ont trouvé refuge à Cerclon, une ville où tout est bien réglé. Les gens sont évalués annuellement et, selon leur performance, on leur donne un nouveau nom. le président aura la lettre A et les derniers auront un nom de cinq lettres commençant par QZ.

Le héros possède un nom à quatre lettres, CAPT, qui lui valent le surnom de capitaine. Il fait partie des meneurs de la Volte, un groupe qui veut un changement social. On ne cherche pas la Ré-volution, ni même l'È-volution, seulement la « volution », le mouvement. On veut sortir du cadre, avoir la liberté d'explorer la zone du dehors, bouger, créer et jouir de la vie. Mais le système résiste et les affrontements sont inévitables…

CAPT est aussi un professeur d'université, il aime le discours et la réflexion philosophique. Il abreuve donc généreusement le lecteur de longues pages de ses enseignements. C'est un peu lassant à mon avis et c'est bien dommage, car ce monde inventé par Damasio est complexe, cohérent et foisonnant d'imagination. de plus, l'écriture est de qualité et l'histoire, pleine de rebondissements.

Un excellent roman, si on lui pardonne ses quelques longueurs.
Commenter  J’apprécie          380
Mon avis sur cette fameuse "zone du dehors" étant très proche de celui de fnitter (sa critique est facile à trouver : c'est la plus appréciée!), je me permets, une fois n'est pas coutume, de renvoyer à la sienne, en y ajoutant juste ces quelques points :
- ce qui m'a poussée vers ce livre, outre la personnalité de Damasio dont j'apprécie la fougue et les rugosités, est cette sorte d'exégèse que j'en avais lu, "le dehors de toutes choses" qui est composée d'une part du texte d'une pièce sous forme de long monologue condensant le propos du livre, et d'autre part d'un long commentaire de l'auteur. L'imprécation qui nous y est faite de trouver en soi son propre dehors, sa propre 'volte' dans l'univers médiocratisé, technologisé et aliénant dans lequel nous vivons y était extrêmement salutaire sous ce format court
- il y a dans ce livre quelques scènes qui méritent vraiment le détour : la scène introductive surtout, dans laquelle Capt met littéralement en oeuvre cette libération de soi en explorant le 'dehors', hostile mais libre, de Cerklon; celle également , hallucinée et brutale, où Capt fait son chemin dans le cube; celle enfin qui le met face au Président de Cerklon, propre à vous remettre les pendules politiques à l'heure.
Une lecture certes un peu longue et enflée, mais vivifiante et salutaire à l'heure de la démocratie vieillissante et de la technologie intrusive.
Commenter  J’apprécie          271
La zone du dehors, c'est d'abord un livre avec une couverture très stylée mais difficile à lire... Cela ressemble aux talons aiguilles, ça plait à la gente masculine mais c'est hyper désagréable à porter. Enfin je m'égare.

Autant avouer, j'ai mis plusieurs mois à finir ce roman. C'était un cadeau. C'est un écrivain lyonnais donc autant de raisons de le lire. Oui mais voilà après avoir lu les premiers chapitres, j'ai calé. En effet dans les premiers chapitres, on suit le personnage principal qui rencontre sa petite amie. Et figurez vous qu'il lui dévoile tous ses secrets sur l'oreiller dès les premières nuits... Autant dire que vous y croyez moyen au chef de résistance qui lâche tous ses secrets ainsi,

Enfin, après quelques semaines, je me décide à le reprendre ce roman. Et bien m'en a pris car la suite était bien plus intéressante. Et ce monde sous surveillance au consensus mou, ressemble au notre. Normal, l'auteur est lyonnais... A noter la référence à l'Ukraine qui est le signal de la fin pour un roman écrit en 2006, qui fait peur / réfléchir en 2022...






Commenter  J’apprécie          225
Après mon immense coup de coeur pour la Horde du Contrevent, me voilà partie visiter la Zone du Dehors.
Pas évident forcément de passer après un tel coup de foudre.

La Zone du Dehors est un roman d'anticipation qui fait écho à 1984: sur Cerclon, les humains sont venus se réfugier car la Terre est devenue invivable. Ici la vie est douce et facile, le pouvoir s'exerce de manière démocratique et consensuelle. A force de confort et de facilité les citoyens s'amollissent et perdent leur identité. Pourtant, au coeur de cette société dévitalisée, des rebelles, des combattants tentent d'exercer leur liberté et de faire bouger les lignes.

La Zone du Dehors est un livre dense, exigeant, qui renferme une poésie indéniable (avec des néologismes qui sont une vrais douceur à la lecture) mais aussi une réflexion poussée sur la démocratie contrôlante et les pouvoirs "doux" auxquels nos sociétés sont soumises.
Le revers de la médaille est que certains passages sont un peu longs, voire abscons. Damasio va au bout de sa pensée, c'est développé et intelligent même si sur certains passages, j'avoue que j'ai ressenti le besoin de survoler et même si je trouve la vision de l'auteur beaucoup trop anarchiste (et idéaliste) à mon goût.

Il n'en reste pas moins que le génie de Damasio est de pointer le doigt là où ça fait mal, sur la difficulté de lever la tête et de s'indigner dans des sociétés qui infantilisent et endorment parfois le citoyen dans une douce torpeur, à coup de consommation et d'uniformisation.

Ne me reste plus maintenant qu'à découvrir Les Fugitifs (avec impatience).
Commenter  J’apprécie          181
J'ai adoré et été fasciné par la horde du contrevent qui reste à ce jour ma lecture la plus intense (lue 6 fois).
La zone du dehors quant à elle m'a procuré d'autres sensations, elle m'a projeté dans des abîmes de réflexions.
Pour ces deux expériences je tiens à remercier Mr Damasio pour ce qu'il m'a apporté.
Ici je ne peux pas dire que j'ai été subjugué par le style ou l'histoire, même si le contexte et la hiérarchisation des individus apportent une certaine originalité.
La critique de boudicca est si bien écrite que je me contenterai pour ma part d'évoquer les deux "scènes" de l'histoire qui m'ont profondément impressionné (sans vous spolier rassurez-vous).
Tout d'abord, les échanges entre les révolutionnaires modérés et les ultras pour décider des modes d'actions et des conséquences qui en découleront, les argumentations des deux camps sont d'une telle justesse que l'on en vient à se dire que tout est justifiable en fin de compte, on comprend à ce moment que rien ne saurait être simple, on comprend aussi la notion de spirale, c'est assez fascinant.
Ensuite le "tête à tête" entre le chef du gouvernement et le chef des révolutionnaires ; là encore les argumentations et les justifications sont troublantes, quelle rhétorique ! A la fin on ne sait plus quoi penser car on se rend compte qu'on ne voit qu'une faible partie de la problématique qui justifie la manipulation, ça fait mal à la tête (c'est le but non ?).
Ce livre parle forcément un peu (beaucoup) de politique, le cynisme qu'il véhicule est évident et j'ai mieux compris après cette lecture, plus qu'avec beaucoup d'autres en fait, pourquoi le monde actuel est ce qu'il est aujourd'hui...
Commenter  J’apprécie          161
Alain Damasio s'est imposé dans le paysage littéraire française grâce à l'exigence de son écriture et la grande originalité de son univers. Lire "La zone du dehors", premier roman réécrit, est donc un retour aux sources et une découverte des premières inspirations de l'écrivain.

Ici, on nous propose une société dystopique, non pas policière, mais avec une sorte de ventre mou démocratique où les citoyens sont contraints à une forme de conformisme. Mais on retrouve beaucoup d'éléments traditionnels : une hiérarchisation des citoyens suivant des règles opaques, un groupe de rebelles, des chefs manipulateurs et cynique, la disparitions des noms au profit de séries de lettres imprononçables... On reste en territoire connu mais tout de même réinterprété de manière originale, ce qui est plaisant.

L'écriture d'Alain Damasio est toujours efficace, avec des jeux de la langue française qui nous proposent des passages ludiques et prouvent le talent de l'écrivain dans le domaine. le contrepoids, c'est que le livre est parfois très bavard. On perd le côté romanesque pour entrer dans des discours de philosophie politique. L'auteur fera beaucoup référence à Nietszche ou Foucault. Ce n'est pas désagréable et c'est très bien écrit, mais c'est parfois un poil trop long ou bavard.

Mais c'est aussi pour construire une pensée critique forte : celle d'une société qui est capable de manipuler ses citoyens sans en avoir l'air, en les transformant en leurs propres bourreaux, des avocats d'une cause qui les aliène. Les discours du Pouvoir en place sont d'ailleurs de vrais trésors de rhétorique : ils mettent constamment en avant des valeurs comme le respect, la solidarité, la bonne entente, l'ordre social... pour mieux stigmatiser les éléments moins dociles. Une sorte de "Diviser pour régner", pourrait-on dire.

J'ai beaucoup apprécié la construction narrative du récit. L'auteur a choisi une alternance de points de vue, une structure qu'il approfondira dans "La Horde du contrevent". Il maîtrise très bien cet exercice, qui lui permet de mettre à profit son talent stylistique, car chaque personnage est très reconnaissable. C'est un réel tour de force. Ensuite, cela permet d'approfondir son univers en proposant d'autres visions de l'action qui a cours, par exemple lors de la rencontre en Capt et P, joute verbale où chaque personnage partage ses pensées sur l'autre menée avec une aisance proche de la perfection.

Les personnages sont de manière globale convaincants. On a droit pour chacun à un tour dans leur psyché, ce qui les rend très attachants et crédibles. Il y a juste un manque de représentation dans les personnages féminins qui peut être assez gênant. La seule est Boule de Chat, une jeune femme qui sert plus faire-valoir à Capt, ce qui stoppe vite ce qu'elle commence à développer comme personnalité.

Un roman intéressant par sa structure et son propos. On y voit poindre les premiers marqueurs du style Damasio : une écriture créative et exigeante, une vision engagée de l'imaginaire et un parti pris narratif qui ne tombe pas dans la facilité. Malgré ses quelques défauts (une tendance à se montrer trop bavard ou des personnages féminins absents), le roman est à lire pour aussi découvrir un point de vue éclairant sur la manipulation politique.
Lien : https://lageekosophe.com/
Commenter  J’apprécie          131
J'ai mis du temps à commencer ce roman, sûrement parce que j'ai lu les avis partagés des babéliotes et j'avais peur d'être déçue, « la Horde du Contrevent » étant un de mes romans préférés. « La zone du dehors » est un livre étonnant et ambitieux par les idées qu'il véhicule. Je dois avouer que j'ai été complètement envoutée pas l'histoire, mais j'ai aussi décroché (parfois) à d'autres moments, trop philosophique, trop politique.

La Terre a été dévastée aux trois quarts par une quatrième guerre mondiale bactériologique. Les Européens ont fui les territoires contaminés dans lesquels il n'est plus possible de vivre. Certains ont émigré en Afrique, d'autres ont quitté la planète pour coloniser d'autres planètes.
L'histoire commence en 2084 sur une des lunes de Saturne. Sous les apparences d'une démocratie, les habitants de Cerclon sont manipulés, contrôlés, et disciplinés, anesthésiés dans le confort et les plaisirs immédiats. « Une aliénation optimum sous les apparences d'une liberté totale. » Cette société basée sur l'ordre, la méritocratie et la délation exclut une partie de la population qui se retrouve marginalisée et déchue d'une partie de ses droits.

Face à ce gouvernement hypocrite et autoritaire, un mouvement contestataire se lève, la Volte, menée par Brihx, Obffs, Slift, Captp, Kamio, nom de code, le Bosquet. Ils ont un idéal : en proposant des idées novatrices, construire un monde libre où la vie aurait un sens.
La Zone du dehors, c'est l'histoire de ses révoltés et de leur mouvement.


J'aime beaucoup l'écriture d'Alain Damasio, à la fois inventive, poétique et tranchante. La zone du dehors est un roman engagé, subversif, une critique acerbe de notre société moderne individualiste qui nous invite à la réflexion et à l'introspection. Un hymne à la liberté et à la vie.
Mais rentrer dans cet univers demande des efforts, car ce n'est pas une lecture facile, mais s'engager dans cette dystopie vaut le coup. J'ai beaucoup aimé ce roman et je vous le recommande chaleureusement.


Commenter  J’apprécie          110
Difficile de décrire ce livre et d'en apporter une critique. Damasio a un style unique, bien à lui, extrêmement construit, parfois en développement, parfois en fulgurance. Dans ce livre est exploité ce formidable désir qu'est la soif de liberté. Parfois un tantinet long, ce roman n'en reste pas moins extrêmement efficace, un véritable distributeur de claques.
Commenter  J’apprécie          111
Alain Damasio peut se décomposer en deux personnes : Docteur Volte et Mister Horde. “La Horde du Contrevent” comme je l'ai déjà dit ici, est un monument de la littérature de l'imaginaire. “La Zone du Dehors” - écrit avant mais réédité après - est encore une fois à la croisée de plusieurs genres : en partant de la SF, Damasio a fait un bouquin de réflexion politique anarchiste. Inutile de dire que les sarkozistes ne finiront pas le livre.

Sur Cerclon, un astéroïde de Saturne colonisé suite à la quatrième guerre mondiale qui a ravagé l'Europe, tout est très bien organisé. le Clastre vous indique votre position dans la société: tout les deux ans vous changez de nom. Tout en haut de l'échelle, les 1-lettrés, avec A qui gouverne. Tout en bas les 5-lettrés, dont Qzaac, élevé au rang de star par les médias.
La société de Cerlon est à quelque années de la notre. Tout est lisse, lissé, policé. Les médias nous dirigent, dirigent le gouvernement - et vice versa.
Tout le monde rentre dans le moule, mène sa petite vie constitue de routines, véritables programmes informatiques sans les bugs.
Sauf les Voltés. Ce groupe de révolutionnaires, dont certains ont connu la Terre, ne veulent plus de cette pseudo vie. Ils veulent avoir le droit. Droit aux erreurs, droit aux coups de folie, droit à l'inhabituel. Droit à la liberté sans surveillance, tout simplement.
Leur chef, Captp, est un orateur, professeur d'université, élevé aux philosophies de Nietzche, Foucault et Deleuze. Ses harangues éclairées séduisent les jeunes, dont la belle Bdcht, alias Boule de Chat. Kamio, son comparse artiste peintre, est plus modéré que le fougueux Slift, dit le Snake: il veut de l'action. Obffs et Brihx complètent le quintet qui forme le Bosquet : ils dirigent la Volte, grand ennemi - ce sont des terroristes pour les médias - du Gouvernement.

Quand Slift décide que les discussions, ça commence à bien faire, et qu'il faut passer à l'action, la Volte de scinde: Les Moltés la quittent, ne restent que les vrais Voltés. Et ils vont en effet passer à l'action, de plus en plus ambitieuses, jusqu'à la capture de l'Immeuble TV, saint parmi les saints…

Mon avis totalement subjectif est à suivre sur mon site, suivez le lien...
Lien : http://www.bibliazzy.com/la-..
Commenter  J’apprécie          100




Lecteurs (5230) Voir plus



Quiz Voir plus

La Zone du Dehors

En quelle année se déroule l'histoire ?

3084
2789
2084
2114

14 questions
86 lecteurs ont répondu
Thème : La zone du dehors de Alain DamasioCréer un quiz sur ce livre

{* *}