Ils surgissent dans l'esprit.
Et dans l'esprit ils s'engloutissent.
Milarespa.
Là était le secret. Tous les personnages qui s’agitaient dans la fresque étaient des prisonniers incapables de trouver la porte de leur prison.
Les choses sont mues par les propriétés inhérentes à la substance qui les composent. Le monde et les êtres qui le constituent se meuvent, aussi, selon leurs lois propres et celui qui croit diriger leur organisation et leur mouvement s’abuse, ne voyant pas que lui-même est pris dans le jeu inéluctable des éléments divers formant le monde parce que lui-même est un de ces éléments. Le sage sait cela et « en se mouvant, il reste immobile; en agissant, il n’agit pas.
Le monde n’était qu’une fresque peinte sur le vide…
-En lui, lle avait surtout vu un libérateur qui la sortait d'un esclavage pénible...
-"Le monde n'était qu'une fresque peinte sur le vide..."
Il se réjouissait et regardait l’avenir avec confiance car, pour un Tibétain, manger copieusement est le but principal de la vie.
Quelle qu’ait pu être l’ouverture qui avait permis son passage, elle pouvait avoir deux fins : servir à entrer et servir à sortir. La seule difficulté consistait à la trouver. On l’avait franchie dans un état d’inconscience, ensuite on ne parvenait pas à la distinguer dans le décor environnant. Là était le secret. Tous les personnages qui s’agitaient dans la fresque étaient des prisonniers incapables de trouver la porte de leur prison.
Elle n’était aucunement sentimentale, reléguait la sensualité en marge de ses occupations « sérieuses », comme une sorte de divertissement bon à occuper les moments de loisirs, mais qui ne devait pas distraire une femme raisonnable comme elle de la poursuite du seul but important qui soit au monde : s’enrichir.
Elle se transmettait de Maître à disciple lorsquee Maître touchait à ses derniers moments,et,avec elle,c'était probablement la vie même que le mourant transférait au disciple choisi pour lui succéder. Oui,il devait en être ainsi,se disait Munpa,la
turquoise, jadis apportée dans notre monde par un nâga contenait "la vie"des Odzérs successifs.Cependant, le dernier d'entre eux ne l 'avait pas transmise volontairement en renonçant à la vie dans son enveloppe corporelle vieillie : on la lui avait arrachée.
Le Maître est plongé dans une profonde tingnédzine, pensa Munpa. Il avait été assez souvent témoin de cet état de profonde concentration d’esprit pendant lequel, pour de longues périodes de temps, Odzér devenait insensible à tout contact extérieur. Évitant de faire du bruit, il se prosterna devant l’anachorète, rangea son sac à l’entrée de l’ermitage et s’assit les jambes croisées, en posture de méditation, s’efforçant de diriger ses pensées vers les sommets sur lesquels planait l’esprit de son Maître immobile.