Alors tu me quittes aussi papa ? Non. Mais oui, un peu, tu as raison. Je t'aime, Edouard. Mais on quitte pas les gens qu'on aime, papa. Il freina brusquement. Nous étions arrivés devant la gare. Il tendit le bras, ouvrit la portière. Cours, tu as cinquante secondes pour l'attraper.
Je courus de toutes mes forces. En grimpant à bord du wagon je sus que ceux qui disent je t'aime sont des menteurs.
on est si laide quand on n'a plus de papa.
(En parlant des parents nés pendant la guerre et ayant vécu la guerre d'Algérie) Et ils goûtèrent a tout, euphoriques. L'infidélité, l'insolence, la dépression, la psychanalyse, les drogues douces, le rock n roll, la réussite, l'échec, le divorce ; ils n'eurent plus leur de la mort. Ils comprirent que l'amour n'était pas une nécessité mais un mot parmi d'autres. On pouvait vivre sans aimer.
Ce n'était pas l'amour qui les avait sauvés, c'était la lâcheté.
Alors ils s'accouplèrent joyeusement et peu importe qu'ils s'aimassent ou non, ils firent plus tard quelques enfants et leur confièrent le soin de les guérir. De remettre le monde en ordre. Et nous arrivâmes, investis de leur rêve d'enfant abandonnés là-bas, sous les rachats des abris, la ferraille de la honte, le sable de la Sebkha.
Est-ce que le silence ça veut dire qu'on ne s'aime plus ?
Alors tu me quittes aussi papa? Non. Mais oui, un peu, tu as raison. Je t'aime, Edouard. Mais on ne quitte pas les gens qu'on aime, papa.
Nous fûmes des fruits, soudain nous étions des arbres.
Quand on est très petit, la longueur des bras permet juste d’atteindre le cœur de ceux qui nous embrassent. Quand on est grand, de les maintenir à distance.
Si tu as besoin de mon aide pour tes livres, je serais très honoré de t'aider.
L'amante me regarda. Un grand sourire illuminait son visage, elle était heureuse. Elle m'offrait un père. Un auteur. Un correcteur. Un guide.
Ma mère ne parlait plus parce qu'elle gardait ses mots pour son analyste...Mon père se taisait parce qu'il savait que si les mots peuvent guérir, ils peuvent aussi blesser, détruire.
C’était ça être votre maman, dit-elle, vous empêcher de vous envoler et vous rattraper si vous vous envoliez. C’était ça et c’était bien.
Elle rêvait d’un dernier moment de joie avant le matin cruel, celui où les pelleteuses du nouveau propriétaire viendraient définitivement raser l’histoire d’une famille dont le grand œuvre fut édifié en 1830, offrants brocarts, dentelles perlées, feutrines, jacquards, taffetas et autres wax hollandais aux coquettes d’alors ; un grand magasin qui avait sut résister aux bombes de deux guerres mondiales, aux pavés de 68, à l’arrivée de l’informatique mais pas à celle des grandes surfaces et de leurs robes toutes faites, sans grâce ni doublure, dans des tissus médiocres, cousues par des enfants au bout du monde.