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Citations sur Léna (76)

Quand nous coulerons, reprit-il, les gens à l'Ouest se réjouiront. Ils le feront sincèrement. Ils ne penseront pas au prix que nous allons payer cette liberté. Avec la façon de faire qui est la nôtre, on peut imaginer le pire. La faillite de l'État, les salaires qui ne seront plus payés, les vieux et les faibles abandonnés à la misère et mourant par millions. Une catastrophe sans nom inaugurée dans la liesse mondiale.
Ils ne verront pas non plus venir la vague souterraine qui les atteindra ensuite. Quand il faudra vivre dans un monde sans illusions ni idéal où l'homme étant définitivement irrécupérable, la seule lutte à proposer consistera à tenter d'encadrer ses méfaits. Quelle violence nouvelle sortira alors d'un tel vide d'espoir ?
Page 169-170, Albin Michel 2011
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Expliqué de cette façon, il ne savait plus que dire. Il n'aimait pas la voir peinée. À un moment ou un autre, la discussion se heurtait à un obstacle infranchissable pour lui : les souffrances d'une génération qui avait effectivement construit de ses mains, à un coût insensé, cet immense État soviétique qui aujourd'hui était là, de guingois peut-être mais debout, grâce à eux. Malgré les tâches noires de ce passé, il aurait fallu une cruauté qu'il ne possédait pas pour piétiner ce morceau d'histoire, renvoyer ceux qui l'avait vécu à l'oubli et au non-sens, ôter à Varia l'espoir que les souffrances humaines vont quelque part, que sa vie de dureté avait servi à quelque chose et aplani la route, au moins un peu, pour les petits drilles à venir.
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L'espace est du domaine du mystère, Léna. Pour l'approcher, c'est un peuple de rêveurs et de fous comme le nôtre qu'il fallait. Nous avons rempli le récit de noms secrets et de personnages fantastiques, nous en avons fait une légende. Et si on me propose de déposer un tout petit mot sur l'une des pages, tu crois que je pourrais refuser ? Nous appartenons à cette histoire, c'est elle qui nous choisit. Ecoute-la si tu cherches des réponses.
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Je ne sais si Tolstoï a raison. Peut-être que les familles heureuses n'ont pas d'histoire. Il a omis d'ajouter que le malheur absolu n'en a pas non plus.
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Je savais bien qu'il voulait la lune, mais je croyais pouvoir l'être pour lui puisqu'il l'était pour moi. Je la connais aussi la ligne d'horizon, je l'ai aimée autant que lui. (...) Mais je n'ai jamais voulu l'attraper ni la posséder ! Il me suffit qu'elle existe. Que vais-je dire à Macha et aux autres ? Que je suis jalouse de l'univers ? Qu'il me trompe avec les étoiles ? Je vais tout perdre. J'ai déjà perdu la paix. Il y a en moi des sentiments que j'ignorais auparavant et que je hais. La colère par exemple, c'est une sensation affreuse, c'est noir et tordu avec des pointes qui dépassent et cela enlaidit tout. L'angoisse. L'angoisse est terrible parce qu'elle fait bouger. On se lève, on marche en rond dans la pièce mû par un besoin sans objet qui ne peut être assouvi. Il n'y a plus d'immobilité possible avec elle.
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C'est pas un nom pour mourir ça, Königsberg. Ca vous racle la gorge, on dirait un crachat puis un rot s'ensuivant. Je suis bien reconnaissante à Staline qu'il a rebaptisé ça Kaliningrad par la suite. Maintenant c'est à Kaliningrad qu'il est mort mon Victor, ça sonne quand même plus joli, non ? Kaliningrad... on dirait des clochettes d'enfant qui résonnent dans la forêt. On doit y reposer tranquille et en douceur, il me semble...
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Quitte-t-on jamais la toundra ? Souvent il s’était demandé quelle trace avait laissé en Léna sa filiation avec les Seigneurs de l’hiver. Que lui racontait sa mère qui s’était arrêtée un jour au village de Salekhard pour épouser un Russe, mais avait toujours regretté sa vie d’avant la tente ? Peut-être avait-elle gardé pour toujours dans le regard la nostalgie de ces images que lui-même, simple passant, n’avait pu oublier. Que lui chantait-elle ? Le sifflement du lasso dans l’air brillant, le ciel s’illuminant dans la nuit profonde de l’hiver quand s’allument les aurores boréales et leur ballet de lumière… Ou le cortège des traîneaux en marche sur la neige étincelante, et l’immensité blanche de l’espace droit devant soi abolissant la durée… Est-ce pour cette raison qu’en Léna le temps ne semble pas s’écouler ? Est-ce cela qui l’a rendue bizarre cette petite ?
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Ah mes enfants ! Pour les gueux de cette sorte, figurez-vous qu'il fut le bienvenu le turbulent, le retentissant Octobre 17 : Point besoin de peser à l'once près, on avait bien su vers qui tourner les fusils quand elles sont arrivées au grand galop les années flamboyantes, les filles d'Octobre, en leurs atours et tintamarre, en leurs habits rouge sang ! Rouges les étendards et les bâtiments, rouges les pavés et les ruisseaux, rouge la bourrasque de désirs... Un vent puissant s'était mis à souffler sur la Russie, en tourbillons qui emportent tout ! Nous les guenilleux, on avait ouvert à deux battants la grande porte du futur. On crachait dans nos mains, on se penchait dessus pour y découvrir le visage de l'avenir. Car c'était là qu'il était tracé, dans ces cals et ces crevasses ! Allons dis camarade, que vois-tu ?
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Perestroïka... Reconstruction, ça veut dire. C'est gentil, remarquez, ça part d'une bonne intention. Seulement les gens de mon âge, c'est nous qu'on l'a construite entièrement l'Union soviétique telle qu'elle est là. Je vous dis pas qu'elle est parfaite au bout du compte, mais vaille que vaille on pouvait s'en arranger. Ben non, maintenant paraît qu'elle est mal fichue, qu'on a fait ça de guingois... Si ça se trouve, ils vont nous faire tout recommencer depuis le début. Ils ne pouvaient pas attendre quelques années qu'on soit morts pour nous annoncer ça ? Franchement ? Faire reconstruire un peu les autres parce-que nous on est fatigués à cette heure.
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Paraît que ça existe le scorbut des âmes. Quand on s'étiole, par manque de subsistance à l'intérieur.
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