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Citations sur Lettres de château (25)

Paul-Jean Toulet (en Béarn, on fait sonner le t final) appartient à la merveilleuse secte des écrivains dits mineurs. Mineurs parce qu’ils n’ont jamais atteint une large audience qui violerait l’intimisme de leur œuvre ou parce que les « Happy few, we band of brothers » de Shakespeare et les deux mille heureux que se souhaitait Stendhal jalousent cet élu et entendent le partager en famille, en famille seulement. Qu’on évoque son nom et il se trouve plus que souvent un membre de la secte ou même un extraterrestre pour murmurer :

Dans Arle, où sont les Aliscams,
Quand l’ombre est rouge, sous les roses,
Et clair le temps,

Prends garde à la douceur des choses.
Lorsque tu sens battre sans cause
Ton cœur trop lourd ;

Et que se taisent les colombes.
Parle tout bas, si c’est d’amour,
Au bord des tombes.
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J’ai vécu leurs œuvres. Je me suis baigné sur une plage de Corfou avec Ulysse et Nausicaa, j’ai marché dans Milan avec Stendhal, été à Guéthary avec Toulet, navigué en mer de Bengale avec Conrad, retrouvé Larbaud quelque part en Europe, médité avec Braque à Varenge-ville, passé une journée à Manosque chez Giono et Morand m’a suivi partout. Nicolas Poussin est dans mon Panthéon. Je leur dois bien quelques lettres de château.
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Longtemps le Poussin a dérouté les amateurs les plus passionnés. Une impression syncrétique ne permet pas de discerner au premier coup d’œil tout ce que dissimule le paysage rustico-poétique d’Orphée et Eurydice. Un deuxième regard découvre la naissance du drame. Les perceptions fragmentaires se fondent alors dans un ensemble où plus rien n’est gratuit, et la fable, dans sa désespérante fatalité, foudroie le contemplateur. La toile s’anime, du sang lui vient aux joues. Les ombres de la mort annoncée planent sur la scène. C’est la naissance d’une tragédie à laquelle on assiste impuissant, le cœur serré. Comme toujours, le Destin a choisi pour victime la plus innocente et la plus poétique des créatures. Nous pleurons Eurydice depuis des siècles. Voilà qui est bien éloigné de l’image du peintre froid et hautain que l’on a trop souvent cultivée.
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La grande peinture française atteint son apogée, une ère de rigueur, et son destin va de pair avec celui de la grande tragédie. Après la « Phèdre » de Racine, on ne peut plus écrire de drames en alexandrins respectant les trois unités, comme après le Poussin il ne peut plus y avoir de grande peinture classique.
Un sommet a été atteint. Il y a d’autres sommets à conquérir, mais l’auteur dramatique et le peintre ont fermé la voie royale.
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Borys Conrad survécut à la bataille de la Somme aux 500000 morts, l’été même où parut « La ligne d’ombre ». Le père et le fils pouvaient se regarder sans honte dans un miroir. Les épreuves, à trente ans d’intervalle, les sacraient hommes parmi les hommes. Comme les survivants de l’équipage à qui Joseph Conrad dédia son livre avec ces mots admirables plus beaux que tous les communiqués :
DIGNES À JAMAIS DE MON RESPECT
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Sur la véracité des récits de Marlow que chaque apparition impose comme l’Homère de la Tamise, Conrad disait :
« Un des effets de perspective du souvenir est de faire paraître les choses plus grandes parce les points essentiels s’y trouvent isolés d’un entourage de menus faits quotidiens qui se sont naturellement effacés de l’esprit. »
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Éduqué en polonais et en français comme les enfants de la bonne société européenne de son époque, le XIXème siècle, Conrad apprit l’anglais à près de vingt-cinq ans pour passer ses examens d’officier au long cours. Avec cet anglais pratique, à l’immense vocabulaire spécialisé, il s’est élevé à la dignité d’écrivain presque universel, porteur d’une œuvre dont les amants de la mer et de l’imaginaire se passent, de génération en génération, le secret envoûtement. Pour un lecteur, aimer et choisir dans sa vie une telle œuvre, c’est comme entrer en religion. Les élus se sentent soudain des novices bientôt ordonnés, évangélistes le reste de leur existence.
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Du choix d’une langue pour un homme qui sent naître en lui une irrésistible vocation d ‘écrivain, je partage le sentiment de Simon Leys dans sa superbe anthologie des écrivains de la mer :
« L’anglais de Conrad est, certes, magistral, mais son raffinement ampoulé reflète la tension d’une plume qui se surveille. »
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Dans quelle cécité, dans quelle surdité sommes-nous enfermés avant qu’un bon magicien réveille nos sens ? Giono m’ouvrait la porte d’un paradis anthropomorphe : le coup d’épaule du fleuve ; l’eau comme du poil de chat ; les hennissements du gué ; la main qui écoute le chêne… Comment jusqu’à une telle lecture peut-on croire avoir vécu sur terre sans en avoir entendu la rumeur minérale et animale, la rumeur des hommes ?
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Giono
Nous l’écoutons comme s’il était là, à notre côté, le soir au coin du feu, le jour en marchant dans la forêt, la nuit en rêvant. Sa voix monte du fond des âges, raconte l’histoire trouble et magnifique des hommes en lutte contre leurs vices et leur mortel destin.
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