Prologue : Lan vit désormais à Paris, c'est une vieille dame « ravissante à faire désirer de vieillir toutes les filles du monde ».
Bien des années plus tôt, en 1947 elle résidait déjà dans la capitale française, venue pour y faire des études de droit mais surtout pour tenter d'oublier Vinh qui oeuvre au sein du Front de Libération.
1949 – Minh, son père est assassiné, elle rentre à Saigon pour les obsèques. Son père, pétri de culture et d'idéaux français, aurait eu des velléités de rejoindre le Front. La Sûreté française serait donc responsable du meurtre, plus particulièrement, son chef Jacques Maurier, un cévenol, dont la femme Lydie, a été tuée, dans des conditions atroces, en septembre 45 lors de la chasse aux Blancs déclenchée par le Vietminh, qui fit de nombreuses victimes dans la Cité Heyraud, quartier européen de Saigon. Lui est accroc à l'opium, aime ce pays et n'envisage aucunement de le quitter.
L'action du roman se situe à Cholon, banlieue interlope de Saigon, au Grand Monde, un établissement réputé dans le monde entier pour ses salons de jeux, de fumerie d'opium, ses gros trafics (prostitution de luxe et marchandises en tous genres) .
Dans une guerre il y a les utopistes, les opportunistes, les défaitistes, les idéalistes, les fanatiques et toujours beaucoup de mafieux et de « salauds », pas toujours du côté où on les imagine les voir sévir.
Un huis-clos, où, peu à peu, la vérité se dévoile.
Lecture intéressante, instructive qui permet un plongeon dans la Guerre d'Indochine, la découverte du quotidien oppressant, bouillonnant de cette ville affligée par la guerre.
Ce roman est inspiré des souvenirs de Raymond Adam, natif d'Hué, ancienne capitale impériale du Vietnam. Il couvrit la guerre pour le magazine télévisé « Cinq colonnes à la une ».
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La plupart de ces patrouilles étaient composées de soldats de la Coloniale ; quatre hommes emmenés par un sergent ou un caporal-chef, en tenue de sortie pour bien montrer qu’on n’était pas des sauvages, ni des débraillés. Les pantalons bien repassés, les brodequins bien cirés, les boutons de laiton brillants frappés de l’ancre marine, les fourragères à l’épaule balançant leurs tresses, jaunes et vertes, bleu sourd et rouges, uniment rouges, distinctions régimentaires jalousés, souvenirs d’exploits proches ou lointains des armées de la République, homologués par les experts en homologations militaires.
Un dragon de toile porté par des acrobates danse au rythme d’un orchestre de cymbales et de gongs. Le tonnerre d’un tambour géant installé sur un chariot commande la cadence. Le dragon s’arête devant une vitrine de curiosités asiatiques, bientôt secoué dune transe violente, expression d’extase suprême à la vue des bibelots. Il penche trois fois la tête énorme en signe de fascination. (Le patron de la boutique a payé un bon prix cet arrêt promotionnel).
Dans le delta, la nuit était peut- être au Vietminh ; à Saigon, elle restait à la République.
Eric Deschodt. Biographie sur Attila.