Des faits, des noms, des dates, des chiffres. le 2 août 1980, à 10 h 25, une bombe explose à la gare de Bologne. Quatre-vingt-cinq morts et deux cent dix huit blessés. L'une des attaques terroristes les plus meurtrières du XXe siècle, perpétrée dans ces années de plomb par les néofascistes des NAR – Noyaux Armés Révolutionnaires.
Diana Vivarelli, alors blessée, se souvient. Il aura fallu trente ans à cette auteure, comédienne et metteure en scène installée à Nantes pour parvenir à écrire cette pièce, à ne plus taire sa mémoire.
Le contexte historique et politique du « massacre de Bologne », par les voix des personnages ou de leurs fantômes, morts ou vivants, est ici très didactiquement exposé, et jusqu'aux années Berlusconi, dans cette république où les fascistes siègent au gouvernement (« même mort, Mussolini gouverne l'Italie ») : implications de la mafia, des Services secrets et de la Loge P2, liens occultes... Avec le plus parfait cynisme, l'enquête sera brouillée, la déstabilisation orchestrée, les fausses pistes ouvertes, les structures politiques infiltrées (« Mon fils est mort et l'État savait, savait tout. »).
Diana Vivarelli ne s'en laisse pas conter pour analyser et dénoncer les manipulations, les machinations ou les complicités, y compris de la presse et de la télévision ; encore, pour dire les post-traumatismes, au travers de confidences rapportant hallucinations, cauchemars, phobies, insomnies, crises de panique, sentiments de culpabilité : « Je me sens vivante par hasard, par erreur [...]. Les terroristes nous ont volé notre futur. [...] Si j'utilise une perceuse je la vois entrer dans mon ventre et m'ouvrir un immense trou rouge, si je suis à table j'ai peur qu'explose le réfrigérateur, si je cuisine je vois voler en éclats la gazinière. »
Diana Vivarelli fait parler plus de quarante protagonistes, les terroristes Valerio Fioravanti et Francesco Mambro, un officier des services secrets, une journaliste, des policiers, le président de la Cour de cassation, l'avocate de la partie civile, etc. pour finir (en voix off) par la litanie déchirante, obsédante, d'une dizaine de victimes seulement identifiées, comme dans la réalité, par des numéros.
Au terme de cette lecture sur le papier, on pourra s'interroger sur l'abondance et la précision des didascalies qui pourraient brider la libre imagination d'un metteur en scène autre que l'auteure, lequel devra encore surmonter les écueils du pathos, du manichéisme et de la caricature.
Plusieurs fois primée et sélectionnée, "
Explosion" a donné lieu à de nombreuses lectures-spectacles.
Chronique parue dans "Encres de Loire" n° 62, hiver 2012-2013
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