Les oracles et les prophètes peuvent se tromper, Astréa, dit-il. Mais la poésie, je le sais maintenant, parle à l’âme sa langue natale.
La planète qui avait été le berceau verdoyant de l'humanité, puis son triste dépotoir, devint son tombeau ardent.
Le moment est venu d’écouter la fin des hommes. Là où s’achève leur longue histoire, commence le dernier de leurs chants. Un hymne guerrier, mais, aussi, une chanson douce. Un gémissement de détresse, mais, derrière, un bruissement d’espoir. Une oraison funèbre, mais, surtout, un cri d’amour.
Parfois, quand parlaient les yeux et chantaient les coeurs, les langues pouvaient se taire.
" A quoi sert de vivre, puisque nous reproduisons toujours les erreurs du passé ? "
Décimés par des canicules à répétition sur les plateaux continentaux, asphyxiés par le manque d'oxygène et de nutriments au fond des mers, les organismes vivants se sont mis à mourir par milliards.
Les plantes et les animaux que les hommes n'avaient pas encore exterminés avec leur pollution et leurs pesticides ont été frappés de plein fouet.
Au bout de quelques secondes, le guichet coulissa dans un crissement sec.
« Que Notre Mère renaisse de votre mort…, fit la voix d’Astréa.
— … et que ses enfants animaux revivent de votre vie, répondit une voix éraillée. Mais des bénédictions ne suffiront pas à payer votre passage. En quelle monnaie comptez-vous régler ?
— En deniers viridiens, répondit Sépien.
Tant pis pour lui ! Vultur fera céder Tourbeuse comme tant d’autres cités du Nord avant elle, dans la fureur et dans le sang. Komodor et ses gens finiront esclaves de la cité rouge – ou pire.
À présent, il évoluait seul dans un couloir trois fois plus large que celui du cercle intérieur, aux murs garnis de portes trois fois plus nombreuses. Derrière chacune se trouvait la chambre d'un crachant ou d'un saignant. Il eut l'impression d'un monstre aux cent yeux clos ; il suffisait qu'une seule de ses paupières s'entrouvre, il le savait, pour que sa tentative de fuite soit repérée...
L’un utilisait ses connaissances pour soigner ; l’autre pour détruire. L’un cherchait dans sa lecture une meilleure compréhension de l’univers ; l’autre y traquait les moyens les plus efficaces d’asservir le monde.