AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations sur Anthologie de la poésie yiddish : Le miroir d'un peuple (152)

Comme sur une charrette on dérobe une pastèque
Je voudrais chiper la lune avant qu’il ne fasse jour,
L’emporter sous ma chemise et la sentir sur ma peau
Et vagabonder ainsi la main au fond de ma poche
Chantonnant et sifflotant - moi le luron lumineux.

Les ruelles, les marchés, les tavernes, les asiles
Écoutent comment mon corps joue et chante tout à coup.
Et jouant ma sérénade et chantant je le conduis
Par les rues comme le dit le Cantique des Cantiques,
Mais je suis tombé soudain parmi les veilleurs de nuits,
Ils m’ont cogné tour à tour, coups en pluie et coups en grêle,
M’ont fait saigner, m’ont blessé, battu à mort parce que

Comme sur une charrette on dérobe une pastèque
J’ai chipé la lune avant que le jour ne soit levé
L’emportant sous ma chemise à la chaleur de ma peau
Et vagabondant ainsi la main au fond de ma poche,
Chantonnant et sifflotant – moi le luron lumineux.

(Jacob Sternberg)
Commenter  J’apprécie          312
         
Dans une larme du temps
Comme il est dur
De sertir
Un sourire,
Une mélodie
Se couvre
De nuages
Le chemin
Du berceau.
Seul le bleu, ce bleu-là,
Galope
Sur un faon
Et veut percer de part en part
Le brouillard
Et le
Temps.
     
     
Rivka Basman Ben-Haim
née en 1925 à Ukmergué, Lituanie.
Commenter  J’apprécie          291
(Marc Chagall)

Je m’éveille dans la douleur
D’un nouveau jour, avec des espérances
Qui ne sont pas encore peintes,
Qui ne sont pas empreintes de couleurs.
Commenter  J’apprécie          256
ULTIME BILAN

Au moment où j'établis
L'ultime bilan,
Comptant et mesurant
Comme sur un échiquier le mouvement
De mon parcours sur les sentiers
Depuis le berceau jusqu'à l'instant présent,
Il me semble
Qu'à moi même
Je fus et suis restée aveugle,
J'ai cherché chez les autres les failles.
Je n'ai jamais assez
Aimé. Loué. Accordé ma confiance.
Entre le oui et le non
Je n'ai su construire aucun pont.
J'ai trop haï plutôt que de comprendre,
Et trop souvent je me suis tue
Lorsqu'il fallait jeter la pierre.
J'ai cru que chaque jour était un fruit
Succulent et mûr
La nuit une forteresse
Et le rêve un toit.
Je n'ai pas su
Que la vie - dur métier,
Il te faut en faire l'épreuve
Et l'exercer.

Dora Teitelboïm
Commenter  J’apprécie          180
Cherche l’amour

Cherche l’amour, mais n’en demande point mesure,
de lui n’exige point exactitude et loi.
La vague vient portant une averse d’écume
Elle te lave avec les astres et l’azur.

Cherche l’amour, mais ne rappelle point son nom
Au port dans le tumulte des navires,
Se gonflent les courants, flammes et tourbillons,
Mais dans les profondeurs les perles se retirent.

Cherche l’amour à la margelle des étoiles,
Au loin, là-bas où se nouent tant de voiles,
Où la mer sur le ciel déverse tout son sable
Et le tamise avec le tamis de la lune.

Cherche l'amour, mais ne l’attache point à l'ancre,
Prends à la mer un seul instant de bleu lustral
Et quand s'enfuit la vague — alors remercie-la
Et que la suive ton regard : deux calmes voiles.

Arie Shamri (1907-1978)
Commenter  J’apprécie          170
La vie a noué sa cravate…


La vie a noué sa cravate,
s’est aspergée d’eau de Cologne
et s’en est allée au théâtre.

Elle a chaussé ses lunettes
– la vie est un peu myope –
et s’est mise à observer la scène.

Au premier acte, sur le plateau,
c’était une fête exceptionnelle,
une fête comme elle n’en avait jamais vu.
Des amoureux apparaissaient
qui parlaient un langage tel que la vie, depuis qu’elle vit,
n’en avait jamais entendu.

Dieu, la vie ouït-elle jamais de pareils propos !
Au deuxième et au troisième acte survinrent des malheurs
si originaux que la vie dut ôter ses lunettes pour les essuyer.

Jamais, en nul lieu, en nul temps,
la vie n’avait vu des gens se comporter de cette façon.
Le rideau est tombé sur le dernier acte
et la vie a applaudi, crié bravo.

Quand la vie a quitté la représentation, il était déjà tard.
Elle a comparé ce qu’elle avait vu au théâtre
et en a conclu que la vie ne sait pas du tout vivre.
Qu’il lui faudrait, de temps à autre, faire un saut au théâtre
pour apprendre comment les gens se comportent,
afin de savoir quoi faire en des circonstances analogues.

Et, depuis lors, la vie va régulièrement au théâtre,
et la vie devient chaque jour plus intéressante,
meilleure, plus raffinée, plus dramatique.


//Moshe Nadir
Commenter  J’apprécie          150
Laisse-moi me taire (Hirsh Glik)

Laisse-moi, laisse-moi me taire,
Que cessent les mots.
Laisse-moi dire une prière
Tout bas, les yeux clos.
Nul ne peut, ni gardes en armes
Grille ou barbelés,
Nul ne peut interdire aux larmes
Tout bas de couler.

Pareils aux arbres de silence,
Vent, ne nous évite,
Mais qu’avec toi nos vœux s’élancent
Vers d’autres zéniths.
Va ton chemin, brise légère,
Va sans trop flâner
Pour porter à ma vieille mère
Mes tendres pensées.

Parmi les yeux de millions d’êtres,
Ceux de ma maman,
Tu sauras bien les reconnaître :
Ils sont différents.
Nul vent ne sèche la rosée
À ses yeux brûlants,
Elle pleure, martyrisée,
Son fils, dans un camp.

Va vite, vent, je lui envoie
Un signe d’amour,
Que ses yeux malades revoient
Son fils, de retour.
Et le vent murmure : est-ce un rire
Ou, secret, un pleur ?
De ma fin déjà, veut-il dire
Qu’ici sonne l’heure ?

Écoute encore, vent, écoute,
Au cœur un sanglot.
Mais le vent a fui sur la route
Et plus un écho.
Maintenant laisse-moi me taire,
Que cessent les mots.
Laisse-moi dire une prière,
Tout bas, les yeux clos.

(p. 563-564)
Commenter  J’apprécie          141
TOUS LES DEUX


Moi et la mouche – tous les deux
Notre tête cogne aux fenêtres
Moi et – la mouche.

Moi et le lion – tous les deux
Nous hurlons à travers les grilles
Moi et – le lion.

Moi et le monde – tous les deux
Nous nous étreignons par les yeux
Moi et – le monde.


//Moshe Nadir
Commenter  J’apprécie          140
Je t’ai cherché

Je t’ai cherché, mon bien-aimé, dans tous les espaces secrets,
Dans la forêt de laine blanche des nuages
Suspendus au matin tels les fruits bleus du gel.
Là le vent est un Dieu sur la fin de notre âge,
Il joue avec des astres morts et des naines de neige.
Là le vent boréal accroche ses cloches d’argent
Parmi d’aveugles ouragans, et son souffle secoue
Les bivouacs de la nuit, disperse à l’aube les étoiles.
Là, sur tous les chemins du temps, les convois infinis et bleus
Où dansent des spectres de feu transpercés d’éclats du soleil,
Là où scintillent les photons nouveau-nés, là
Où rougeoient les cœurs mystérieux des Céphéides,
J’ai cherché ta trace, partout, et j’avais les yeux de la foudre,
Du tonnerre j’avais la voix, t’appelant durant tant d’années,
Je chantais ton nom dans la nuit comme jadis les troubadours,
J’étais folle de nostalgie et j’étais malade d’amour.

Dora Teitelboïm (1914-1992)
Commenter  J’apprécie          140
Ton appel

Je ne sais pas si j’ai vécu. Je ne sais pas
Si je vis. Je regarde le ciel
Et ne reconnais pas le monde.

Mon corps s’en va vers la nuit,
L’amour, les fleurs des images
D’un sens à l’autre sens m’appellent.

Ne laisse pas ma main privée de bougie
Quand ma chambre s’obscurcira.
Comment dans la blancheur verrai-je ton éclat?

Ton appel comment l’entendrai-je
Quand je resterai seul sur min lit
Quand mon corps connaîtra le silence et le froid?

Marc Chagall (1887-1985)
Commenter  J’apprécie          130






    Lecteurs (49) Voir plus



    Quiz Voir plus

    Testez vos connaissances en poésie ! (niveau difficile)

    Dans quelle ville Verlaine tira-t-il sur Rimbaud, le blessant légèrement au poignet ?

    Paris
    Marseille
    Bruxelles
    Londres

    10 questions
    1228 lecteurs ont répondu
    Thèmes : poésie , poèmes , poètesCréer un quiz sur ce livre

    {* *}