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Après un long sommeil, qui pour nous se compte en millénaires, Zeus, le Dieu suprême dans la mythologie grecque, le Dieu des Dieux, décide de nous raconter son histoire.
Une histoire qui est aussi la nôtre car, ne nous y trompons pas, l'apparition du Dieu unique qui l'a ravalé, lui et les siens, au rang de mythe n'est qu'un battement de cil, un simple soupir dans l'histoire de l'Homme. Zeus, lui, nous contemple, depuis le fond de nos siècles.
Grâce à la plume magique de Maurice Druon, vous allez entendre la voix d'un être suprême qui a, par le biais du souffle, de la matière, du nombre, de l'infiniment petit et de l'infiniment grand, créé l'Homme.
Une voix qui a la mémoire des ans. Une voix étrangement familière, tantôt pateline, tantôt railleuse, tantôt mélancolique. La voix d'un vieux sage à qui on ne la fait plus.
Comme nous ressemblons à Zeus, avec nos pulsions désordonnées, nos conflits familiaux, nos doutes, nos erreurs, nos colères, nos tromperies, nos petites bassesses, nos regrets, mais aussi nos petits matins bleus, nos générosités, nos triomphes, nos espérances, et nos amours qui ne nous font plus toucher terre.
Les amours de Zeus, justement, parlons-en ! Des amours cosmiques, dans la voie lactée, dans les cieux chargés de nuées, dans le souffle du vent, dans l'écume de mer, ou dans les profondeurs sombres et paisibles d'une grotte… D'innombrables couchailleries avec des déesses à la beauté envoutante, des demi-déesse, des nymphes, des sirènes, des naïades, des mortelles, des immortelles, j'en passe… J'ai vite perdu le compte de son abondante et grouillante descendance.
Parmi tous ses enfants, je retiendrai le claudiquant Héphaïstos, Hadès le non voyant, Hermès le messager, la sage et solide Athéna, l'excessif Dionysos, Prométhée le voleur de feu, et Alexandre le conquérant… Et puis moi, issu, tout comme vous, de la sixième race des hommes et de sa lointaine semence, même si, pour la sauvegarde de mon quartier, je n'ai pas encore osé me lancer dans le maniement de la foudre et du trident.
Comme j'ai aimé Zeus, un Dieu qui avoue se tromper, qui hésite, biaise, qui « si c'était à refaire »… Un Dieu sans vérité révélée, à la différence de tous nos grands gourous laïques ou religieux…
Le vrai Dieu des Hommes, en quelque sorte !

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"Il y a une tradition que je suis à même de rapporter, une tradition de l'Antiquité. Or, la vérité, c'est elle, l'Antiquité, qui la connaissait : si nous pouvions, par nous-mêmes, la découvrir, nous soucierons-nous encore de ce qu'a cru l'humanité ?"
(Platon, "Phèdre")

En parcourant les livres de la dernière masse critique, je suis tombée sur "L'Incroyable Histoire de la mythologie grecque", qui nous apprend, entre autres, que Narcisse n'était pas narcissique (hm ?) et que Thésée a inventé la coupe mulet. Maurice Druon ne va pas, hélas, aussi loin dans les exquis détails mythologiques, mais si le sujet vous intéresse et si vous voulez mettre un peu d'ordre dans les méandres tordus de la cosmogonie grecque, "Les mémoires de Zeus" valent tout de même leur pesant d'or de Colchide.
Le livre trainait pourtant longtemps au fond de ma pile : primo, j'avais le mauvais pressentiment qu'il lui sera difficile de surpasser l'éclat homérique des "Rois Maudits", et secundo, je pensais être suffisamment calée en mythologie grecque pour que le roman me passionne vraiment.
Les deux suppositions étaient fausses.

Le livre dévoile une autre facette de Druon, qui réveille le roi de l'Olympe d'un long sommeil de deux millénaires, en le laissant raconter son histoire. le récit est un hommage à la Grèce, à la culture antique, mais aussi aux études classiques qui sont lentement en train de disparaître. Un hommage au monde qui n'est plus, où les dieux multiples se superposaient à la Nature, et leur destin était étroitement lié à celui de l'Homme, issu de cette même nature. Où rien n'était entrepris sans une consultation d'oracle, où les demi-dieux légendaires parcouraient la terre, et où on se battait pour un tas de raisons, mais jamais pour les abstraits concepts religieux.
La pensée de l'académicien Druon s'enchâsse dans la narration du roi des dieux, pour philosopher de façon à la fois critique et bienveillante sur les relations entre les hommes, leur rapport au divin, et sur le long chemin parcouru depuis la première race, disparue avec l'Atlantide engloutie. Les mythes millénaires racontés dans un style agréablement moderne ponctué de réflexions intéressantes, sans que l'auteur ne ressente le besoin d'inventer ou changer quoi que ce soit. La civilisation grecque a déjà parfaitement fait le travail, en créant une fascinante mythologie extrêmement enchevêtrée que Druon démêle et file adroitement tout le long de ce pavé, avec la rigueur et la patience des trois Parques... ou plutôt des trois Moires, car il préfère (et c'est une bonne chose) la version grecque des noms propres.

Le récit commence aux premiers âges de la Terre et au Chaos primordial qui a donné naissance à la race des Titans, enfants de Gaïa et d'Ouranos, le génie créateur du monde vivant. Depuis toujours, les hommes se posent des questions sur les origines du monde et sur le sens de leur existence, et il est d'ailleurs assez étonnant de constater à quel point ces mythes archaïques s'accordent, avec un peu d'imagination, aux théories scientifiques modernes. Vient ensuite le règne de Cronos, castrateur de son propre père, dévoreur de tous ses enfants - à l'exception de Zeus, sauvé grâce à la ruse de sa mère Rhéa. Et le seul survivant attend patiemment son heure de gloire...
Créer son propre panthéon sur l'Olympe, combattre les Titans révoltés, instaurer l'ordre... telles sont ses tâches à accomplir, et le chemin est plus que généreusement parsemé d'épreuves et de difficultés. Même le maître de la foudre destructrice n'est pas omniscient, et ses doutes et hésitations sont souvent tout à fait humains ; comment s'étonner de ses colères, ses jalousies, ses passions et ses pardons ? Envers ses aïeux, ses enfants, mais aussi envers les hommes... car si les dieux immortels orchestrent le monde frêle des hommes, selon l'ancienne vérité aperçue par Platon, les hommes sont tout aussi nécessaires pour maintenir la subsistance et la mémoire de leurs dieux.
Or, comme le dit Léto, la déesse de la maternité, dans le livre : "les dieux eux-mêmes peuvent mourir, si le monde meurt".

Rien sur l'invention de la coupe mulet, donc, mais si vous voulez découvrir le panthéon grec au complet, si vous voulez savoir comment a été inventée la lyre, comment était fondé l'oracle de Delphes, pourquoi les dieux égyptiens prennent la forme d'animaux, qui a libéré Prométhée de ses chaînes, ou comment Zeus a rencontré Héra, courez à la librairie pour chercher le roman. Les dieux et les monstres légendaires - les Cyclopes, les Hécatonchires, les Cent-Bras, Ophion, Porphyrion, Otos, Ephialtès, Python et tous les autres - ne méritent pas de finir noyés dans l'Achéron de la mémoire !
4/5 pour un passionnant et précieux livre que j'ai trouvé paradoxalement presque trop riche. Avec ce projet ambitieux, Druon est obligé de passer très vite d'un événement à l'autre (chacun des courts chapitres mériterait tout un roman !), les noms défilent tout aussi vite, et il est impossible de tout retenir. Mais on peut toujours y revenir, pour admirer les beaux ouvrages d'Héphaïstos, réfléchir sur les origines du théâtre avec Dionysos, ou faire renaître la race humaine après le déluge avec Deucalion et Pyrrha...



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Célèbre pour sa saga « Les rois maudits », Maurice Druon s'est également essayé dans les années 1960 à l'écriture d'un roman consacré à la mythologie grecque. le temps est venu pour le roi des dieux de rafraichir la mémoire des hommes qui, plus de vingt siècles après la disparition des divinités olympiennes, ont oublié presque tout ce qu'elles avaient pu leur apprendre. Avec ces « Mémoires de Zeus », Maurice Druon nous propose un véritable retour au source des principaux mythes grecs : la naissance du monde et l'union de Gaïa et Ouranos, la mort de Cronos et l'accession de Zeus au pouvoir, la révolte des Titans, le châtiment de Prométhée... Avec un luxe de détails, preuves de son indéniable érudition, l'auteur nous dresse ainsi un portrait complet et parfois surprenant de tous les dieux ou héros majeurs du panthéon grec. On y découvre Zeus accablé par le poids de ses responsabilités, Héra aussi jalouse que ce qui décrit la légende, mais aussi Hermès, de loin le plus ingénieux de tous les dieux, Aphrodite, aveuglée par l'amour qu'elle se porte  elle-même, Hécate, loin d'être la divinité malveillante et terrifiante à laquelle on aurait pu s'attendre... Certaines anecdotes sont célèbres et parleront aussi bien aux néophytes qu'aux passionnés (Dionysos né de la cuisse de Zeus, les travaux d'Hercule, le supplice de Tantale...), mais d'autres possèdent l'attrait de la nouveauté et témoignent de la réflexion poussée de l'auteur sur le sujet. Chacun des éléments qui caractérisent les différentes divinités sont ainsi minutieusement analysés, de leur nom à leur attribut en passant par leur sphère d'intervention, leur caractère..., le tout dans le but de donner au lecteur la vision la plus claire possible de la nature de chacun et de la raison pour laquelle ils revêtent une importance particulière pour les hommes.

Il serait cela dit erroné de ne voir en cet ouvrage qu'un rappel à un lointain passé, totalement éloigné de nos préoccupations actuelles. « Tout est utile à l'homme, et surtout ses souvenirs, lorsqu'il est livré au péril des forces inconnues et de ses propres désordres. Les mythes constituent la mémoire collective de l'humanité. Parmi les questions que l'avenir nous pose, il en est certainement auxquelles le passé a déjà répondu. » A travers la voix de Zeus, Maurice Druon entend ainsi surtout fournir une analyse la plus pertinente possible de nos inquiétudes et de nos modes de vie contemporains, et ce par le prisme de la mythologie. Peur de la mort, éloignement de toute forme de spiritualité, propension à l'autodestruction..., autant de thèmes d'actualité sur lesquels l'auteur nous livre des remarques aussi lucides que passionnantes. Vous l'aurez donc compris, au-delà de celle des dieux, c'est avant tout l'histoire des hommes qui nous est ici narrée. de la Préhistoire aux glorieuses cités grecques antiques, de la découverte du feu au déluge, de la boite de Pandore à la naissance de demi-dieux tels qu'Herackles, Achille ou encore Alexandre le Grand, Druon revient sur tous les événements marquants consacrés à l'humanité dans les mythes grecs. le seul reproche que l'on pourrait formuler concernant l'ouvrage serait de parfois trop se rapprocher sur la forme d'un article d'encyclopédie et d'ainsi risquer de lasser certains lecteurs qui ne seraient pas à cent pour-cent passionnés de mythologie grecque.

Avec ces « Mémoires de Zeus », Maurice Druon apporte la preuve qu'il est aussi doué pour relater les luttes de pouvoir entre les grands familles du Moyen Age que les aventures des divinités antiques. le regard acéré qu'il pose sur nos sociétés contemporaines aussi bien que la minutie de ses recherches et la pertinence de son analyse permettent de brosser un portrait très net de l'ensemble de la structure mythologique grecque dont on ne peut qu'admirer à la fois la complexité et la cohérence. Incontournable pour tous les amateurs d'histoire ancienne ! (d'autant plus que l'ouvrage vient de bénéficier d'une réédition chez Bragelonne et est donc aujourd'hui disponible au petit prix de 10 euros).
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La réédition des Mémoires de Zeus chez Bragelonne est pour moi l'occasion d'enfin découvrir la plume de Maurice Druon, célèbre auteur de la saga des Rois Maudits.

Avec ce roman, Maurice Druon réussit le pari à la limite de l'insurmontable de nous raconter l'histoire de Zeus. Entre les différents événements qui ont jalonné la vie de ce roi des Dieux, notre Zeus a une vie sentimentale (disons plus sexuelle pour le coup) bien complète qui aura donné lieu à une petite trentaine d'enfants d'après le roman. le travail documentaire autour de la rédaction de l'ouvrage doit être colossale et l'auteur nous fournit en résultat une chronologie plutôt crédible des différents mythes. On y rencontrera une ribambelle de personnages plus ou moins connus ce qui fait de ces mémoires fictifs une véritable bible de la mythologie greco-romaine.

Les Mémoires de Zeus est un roman vraiment enrichissant portée par une plume passionnée et passionnante. A lire pour tous les curieux !
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Quand on voit le nombre de dieux, demi-dieux, Titans, Géants, Hécatonchires et Cyclopes que comptent la mythologie grecque, ça a de quoi impressionner pour partir à sa découverte. Surtout si, comme moi, vous faites référence à cette mythologie seulement pour balancer du "Comme disait Bacchus : lâchez-moi la grappe !". Et là, certains relèvent l'étendue de mon ignorance initiale puisque Bacchus est la version latine de Dyonisos.
Mais revenons chez les Grecs.
Il m'aura fallu voir le nom de Maurice Druon, conteur hors pair, pour me lancer dans une lecture concernant ce vaste mythe.
Et effectivement, ici, je n'ai pas été noyée et j'ai été prise dans l'histoire. J'ai même été chercher plus d'informations sur ce passage plein d'espoir de l'Ère des Poissons "cet âge de flottement, de noyade de l'esprit, de cécité dans les eaux glauques de l'inconscience, de cruauté" à l'Ère du Verseau "où triomphent l'air et la lumière, vous promet la découverte, les aventures de l'intelligence, le vol dans les espaces, la recherche de l'au-delà des choses, la réconciliation par la compréhension, et la mutuelle fécondation des esprits mâles." Pour vous dire...
En revanche, je ne sais pas si cette version s'écarte trop ou pas assez d'autres versions. Je peux juste vous dire que, pour vivre avec un pointilleux de la mythologie grecque, vous pourriez comme lui vous demander "Comment ça, c'est pas dit que Pégase est sorti du sang de Méduse qui a eu la tête tranchée par Persée ?!"
De toutes façons, ce n'est pas très grave puisque de ces mémoires de Zeus, chacun en fera ce qu'il voudra. du conte à la croyance en passant par la philosophie, n'oublions pas que Promothée nous a offert le libre-arbitre.
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Nom de Zeus, quelle famille !

Je n'en suis à vrai dire pas vraiment surpris. J'avais connu une ouverture à cette fantasmagorie qu'est la mythologie avec l'excellent ouvrage d'Edith Hamilton : La mythologie, ses dieux, ses héros, ses légendes. Une conviction s'ancre désormais en moi à la lecture des Mémoires de Zeus de Maurice Druon. Elle me fait regretter que le monothéisme nous ait fait perdre tant de volupté dans nos rapports avec Qui préside désormais à nos destinées. Car disons-le tout net, au regard de ce qu'ont pu connaître nos ascendants des première jusqu'à la quatrième race de mortels, puisque nous autres sapiens du XXIème siècle sommes les descendants de la cinquième race, Celui qui s'est arrogé l'exclusivité de nos dévotions, toutes confessions confondues, est bougrement rébarbatif. D'autant que Ses manifestations à notre attention sont pour le moins discrètes et nous obligent à la croyance.

Parce que les Dieux grecs pour ce qui les concerne, relayés par leurs alias romains, n'avançaient pas à visage masqué; ils faisaient preuve auprès de leurs oyes de manifestations pour le moins démonstratives et avaient de bons gros défauts comme on les aime, de nature à affranchir les pauvres mortels de tout scrupule quant à leur propres écarts de conduite. Car pour ce qui est du Seul que l'on révère en nos cathédrales, mosquées, synagogues et autres pagodes de nos jours, et revendique donc la majuscule, son appropriation monomaniaque et anti concurrentielle des consciences laisse planer le doute quant à notre filiation. On ne se reconnaît en réalité que peu d'affinité avec sa rigueur dogmatique tant nous avons de la fidélité une notion élargie et de la vertu un arrière goût amer. Les défauts sont de notre nature. Mais n'est-ce pas Lui qui nous a faits ? Aussi, pourquoi voudrait-Il désormais nous en culpabiliser.

Le seul reproche que l'on pourrait faire aux Dieux de l'Olympe est le malin plaisir qu'ils se sont donné à nous compliquer la vie à nous autres pauvres mortels, à force de tarabiscoter l'arbre généalogique de leur fantaisie familiale, obsédés que nous sommes désormais à vouloir tout rationaliser, tout étiqueter et codifier. Et c'est grand mérite à Maurice Druon de tenter de nous effeuiller dans cet ouvrage l'arbre de Zeus dont les racines font de curieuses connexions en boucle avec les branches aux pouces les plus tendres. Il faut dire que le bougre ne craignait nullement la consanguinité pour faire commerce, comme on dit avec une pudeur toute littéraire, avec ascendance et descendance, pourvu que le plaisir soit à la clé. Bien qu'il connût quand même quelques manifestations de jalousie de sa légitime Héra. Sa justification d'honorer les mortels de la semence divine était argument fallacieux aux yeux de celle-ci. Allez comprendre pourquoi. Car figurez-vous que nos ancêtres de ces temps reculés pouvaient recevoir des dieux des preuves caressantes et culbutantes pourvu qu'ils fussent disposés à les accueillir en leur giron, et augmenter par là une ramure aux bourgeons déjà nombreux et ainsi mieux nous perdre en sa canopée.

Oui Zeus était volage. Maurice Druon n'omet aucune de ses nombreuses maîtresses, divines ou mortelles. Et bien que roi des dieux, il ne se sentait nullement une vocation d'exemple auprès de ses administrés. Car en cette époque bénie des dieux les comportements n'étaient ni louables ni blâmables, ils étaient tout simplement divins. Mais patience divine a ses limites et lorsque Héra, sa légitime, se fit trop intrusive pour surveiller ses errements, il n'hésita pas à la pendre par les cheveux, une enclume accrochée aux pieds. Quelle époque vivons-nous en ce siècle pour que notre code pénal trouve à redire à pareille manifestation d'autorité ?

"Si des esprits aussi chagrins que mal informés vous ont conté, chers mortels, que vous descendiez des singes, ne les croyez pas." C'est Ouranos, le grand-père de Zeus "qui créa l'homme qu'il tenait pour son chef-d'oeuvre", à condition toutefois que sa vie ait une fin. Les Parques ayant mission de veiller à tous cela, en particulier Atropos chargée de couper le fil. Voilà donc un podium pour renforcer notre orgueil et un tombeau pour l'étouffer. Mais en toute occasion remercions Dionysos, plus connu sous son alias de Bacchus, le turbulent rejeton de Zeus, d'avoir couvert nos collines ensoleillées de la divine grappe afin de nous réjouir du succès et oublier le péril.

Quel bonheur en tout cas, dans l'attente du coup de ciseau fatal, de combler quelques heures entre les mains des Parques avec cet ouvrage de Maurice Druon dont je soulignerai respectueusement la qualité de la langue. Ouvrage ciselé, à la documentation exubérante, nous livrant à la compagnie de tant de noms célèbres mais inconnus de nous parce qu'interceptés trop furtivement au gré d'indiscrétions instruites, évoquant au passage les trois Grâces, les Muses, les Saisons, les Hespérides. Et tant d'autres dans le fourmillement d'une parentèle innombrable convoquée en ces pages par l'érudition de notre académicien.

Notre chronologie n'ayant rien de divine et désormais livrée en les mains d'Un seul, Lequel nous rend coupable dès la naissance puisque nous affublant du péché originel, coupable de naître donc, il me faut mettre un terme à ce propos et vous rendre à vos auteurs qui piaffent jalousement de savoir vos yeux rivés à ces lignes, lesquelles vous font l'éloge d'une biographie du roi des Dieux, qui pourrait donc durer ce que durent les dieux, éternellement.

Nom de Zeus, le temps nous est compté. Nous ne sommes plus au temps de l'Âge d'or.
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Quel régal !
Je suis retombée en enfance quand j'adorais lire les "contes et légendes" De Grèce et d'ailleurs, j'avais quasi toute la collection !
Bien sûr, c'est un cran au dessus, le style de M. Druon étant particulier (je ne connaissais pas du tout), voire parfois ampoulé, il peut ne pas convenir à tout le monde, mais quel régal pour moi quand même !

Ce Zeus trop humain est attachant, et les occasions pour l'auteur de placer quelques petites remarques et avertissements bien sentis sur nos pires défauts, travers, ombres et autres déconnades trop nombreuses, individuelles ou collectives, sont bien exploitées et tout cela est très juste dans l'ensemble, même si je ne partage pas son avis sur tout !

C'est un délicieux rappel de la naissance du monde et des dieux selon la mythologie grecque, j'ai adoré.
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A l'issue d'un long sommeil, Zeus ouvre les yeux sur notre temps. Il entreprend alors de nous compter sa longue autobiographie.

Ecrit dans les années 60, Les Mémoires de Zeus évoque des sujets d'actualité. D'un ton sarcastique, Zeus remet les hommes à leur place, enfin celle qu'il estime être la leur. Il prend le lecteur à témoin et fait des parallèles entre notre vie moderne et les leçons que la mythologie nous a enseignées et que parfois nous avons oubliées.
Ainsi, Zeus s'étend sur l'origine de notre univers, sa propre naissance et le combat qu'il a mené pour renverser son père, Chronos. Il évoque les femmes qui l'ont soutenu ou trahi. le récit est divisé en parties qui relatent chacune un épisode particulier de la mythologie grecque, toujours en parallèle avec des sujets de notre actualité.
Les épisodes célèbres parleront sans doute plus au lecteur mais certaines anecdotes moins connues contribuent à alimenter l'intérêt pour l'ouvrage.

J'ai trouvé lassant d'être sans arrêt prise à partie comme une petite fille qu'il faudrait gronder et lui rappeler sa constante stupidité. le mythe de Zeus est ici bien arrangé. On ne parlera pas des viols qu'il a commis puisque d'après lui les femmes étaient toujours consentantes. Il évoquera avec pudeur certaines erreurs mais se gargarisera de ses victoires. Je me suis souvent demandé au fil de cette lecture si l'hybris est finalement celui des hommes ?

Le style est quant-à-lui très ampoulé. C'est très bien écrit quoique pompeux, mais la vanité et le sarcasme prévalant sur le reste, je me suis assez ennuyée pendant cette lecture.
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Maurice Druon est mondialement connu pour sa saga historique Les Rois Maudits, mais bien évidemment l'Académicien a écrit d'autres oeuvres (dont le Chant des Partisans avec son oncle Joseph Kessel).

Les Mémoires de Zeus permettent à l'auteur de rassembler en un roman la destinée des dieux grecs, en entreprenant une fresque chronologique des anciennes divinités qui commence par la création de l'univers. Les férus de mythologies n'y apprendront probablement pas grand-chose, mais pour les autres lecteurs ce rappel de mythes fondateurs de notre culture est bienvenu. le lien est régulièrement fait avec la « vraie » histoire, celle des temps préhistoriques et celle des débuts de la Grèce Antique, même s'il s'agit parfois d'une histoire fantasmée. L'auteur se lance aussi dans des parallèles avec l'histoire du XXe siècle, notamment avec les thèmes de la guerre, des destructions massives, de la science ou encore de notre souhait de nous affranchir des contraintes de la nature.

Zeus nous parle — oui, il parle directement au lecteur — et il nous décrit ses relations tumultueuses avec sa nombreuse famille. Il nous fait part de ses décisions et de ses regrets, puis il nous invective. Parce que le Zeus de Maurice Druon s'adresse à l'homme moderne, en déclamant par delà les siècles ses leçons de sagesse. Mais autant le dire tout de suite : ce Zeus ne parle pas à la femme moderne. Il est (très) misogyne, et les déesses qui l'entourent restent des archétypes féminins dont peu gagnent son estime. Dans cette perspective, le livre est cohérent avec la société grecque de l'Antiquité.

Ce texte est évidemment très bien écrit, même si certaines syntaxes m'ont surprise, car nous ne les utilisons plus aujourd'hui. Les descriptions des divinités et des paysages sont fluides et plaisantes à lire. L'auteur a réussi à dépeindre simplement les aventures de ses personnages, tout en décryptant pour le lecteur la signification de certains mythes, et en tentant d'en moderniser la portée.

La forme de narration n'est toutefois pas celle d'un roman classique, mais il n'en reste pas moins que c'est un ouvrage intéressant pour sa culture générale.

Challenge Livres Historique 2019
Lien : https://feygirl.home.blog/20..
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La mythologie grecque racontée par Zeus lui-même !

Zeus a dormi pendant toute l'ère des Poissons, et s'éveille, à l'aube de l'avènement de l'ère du Verseau. Ils constate que les Hommes ont oublié bien des choses et vivent bien dangereusement, alors il entreprend de leur raconter son histoire, qui est aussi la leur, finalement.

Maurice Druon ne se contente pas de faire raconter au porteur de foudre les aventures et aleas de sa vie, il lui fait expliquer, au-delà des anecdotes, le sens profond, souvent caché, le symbolisme des événements. C'est très réussi, et percutant aussi.

Ainsi on comprend vraiment pourquoi la punition de Prométhée était importante, et indispensable. D'ailleurs, il a été libéré, au bout d'un temps, et cela aussi je l'ignorais. Héra aussi, m'a surprise, au début. On la voit classiquement comme une mégère, bon, effectivement, elle le devient, mais au début elle est plutôt fort sympathique, comme déesse. L'histoire d'Arès coincé dans sa marmite, je ne la connaissais pas non plus. D'ailleurs, lui m'est devenu presque aussi antipathique qu'Artemis et Apollon, dont j'avais pourtant bonne opinion, avant de lire Druon. Mes préférences vont, pour tout dire, hors Zeus lui-même, à Hermès, Héphaïstos, Hadès et Thémis.

Ce qui m'a vraiment plu et séduite, dans ces Mémoires de Zeus, ce sont toutes les explications qui sont données, les parallèles, les jeux de miroir entre ce qui arrive aux Dieux et ce qui arrive aux Hommes, la succession des différentes races d'Hommes, depuis les premiers Atlantes, forgés de la main d'Ouranos, à nous autres, tous issus de la lignée Prométhéenne...

J'étais loin de m'imaginer qu'il y avait autant de profondeur dans tous ces mythes, et je suis à la fois très reconnaissante à Maurice Druon pour cette oeuvre vraiment originale et fouillée, et aussi à mon cousin, qui me l'a prêté, en me disant juste :"Lis le, tu vas aimer !".

En vérité, je n'ai pas aimé, j'ai adoré !
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