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Citations sur L'embaumeur (80)

Oui, je l'admets : je rêvais fréquemment au trépas de la Pâqueline. Je ne détestais point l'idée d'embaumer ma propre mère ; avec une délectation honteuse et malsaine, je me voyais fort bien ôter son cœur , le peser et constater que, conformément aux écritures antiques, le boyau pesait moins qu'une demi-livre de grains à poules faute de s'être gonflé des vertus et des bonheurs que les bonnes personnes unissent et sentent battre très fort dans leur poitrine. Et dans ce songe exquis, j'engloutissais un poêlon de riz au lait, je buvais un flacon de cidre attablé sur le gras de son ventre, je calais mon fromage entre ses seins et lui plantais un bouquet de jonquilles dans la bouche. Ma mère devenait un meuble. Une console. Une table de fête.
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J'allais donc périr, sans avoir jamais réalisé le moindre rêve. Tout le monde a des rêves, non ? Vous tous ici, vous êtes bien nourris d'espoirs extravagants qui paraissent dérisoires à d'autres, n'est ce pas ? S'élever dans la nacelle d'une montgolfière, par exemple, et contempler la ville par-dessus ses forêts de cheminées, ou porter une montre Lépine à la boutonnière de votre gilet... que sais-je ? Mes regrets et mes rêves étaient modestes, et cela me rendit encore plus triste car ils étaient parfaitement réalisables ; je m'étais juré de capturer un poisson à mains nues, de m'enfouir dans les cotillons d'une fille, traire une brebis, me torcher le cul de coton ou de mousse verte, pareil à Louis XIV, et ainsi boucher le cabinet de ma mère. J'ambitionnais de connaître les astres, lire l'avenir dans les étoiles, devenir riche ou célèbre en me distinguant par une brillante action, d'approcher la mer, dont on dit que les courants sont plus rapides qu'un étalon au galop, me saouler d'un vin rare et cher, puis goûter une curiosité laiteuse et puante que l'on nomme camembert...
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"L'index tendu vers le ciel, le pasteur transpirait et bavait un peu. La novice pour laquelle on avait organisé la sainte cérémonie apparut enfin, vêtue d'une robe blanche ornée d'un col montant et raide, nimbé d'un long voile qui cachait ses cheveux, puisque nous sommes convaincus que, pétris de jalousie, les anges jettent de mauvais sorts aux femmes qui portent d'admirables chevelures." p.80
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Une fois débarrassé du corps de la vieille dame, dont je n'avais même pas écrit le nom sur le registre de mon maître, j'ouvris le fenestron aux petits oiseaux nettoyeurs et m'octroyai quelques instants de repos ; au hasard, je tournai les pages du carnet de mon père .

Imbert de Beaupré : de l'eau bénite pour sécher ses boutons de puceau et des menottes contre ses vilaines manies nocturnes. Le vice aristocratique n'a pas fini de bidonner le voisinage. On devrait ficeler des clochettes aux branleurs.
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(Victor ayant réussi à avoir quelques sous pour emmener Angélique au théâtre)
Les seules places accessibles à ma maigre bourse dénonçaient l'indigence de notre rang ; nous étions assis au centre de la salle basse, un peu enfoncés vers les parois des balcons, exactement sous les lustres chargés de bougies qui dégoulinaient sur nos têtes.
.......
Pour finir de chagriner ma compagne, nous reçûmes à l'entracte quelques légères éclaboussures d'un vase de nuit. Nous ne fûmes pas les seuls à recueillir cette pluie de pisse, à en juger par les hurlements et les sifflets que nos voisins adressèrent en direction des balcons meublés de femmes riches qui se soulageaient fréquemment dans le pot glissé sous leur siège .
Au premier coup d’œil, je saisi que notre porteur de sel était mort depuis longtemps. Un corps abandonné cinq jours au soleil produit le même effet qu’un autre exposé dix jours en automne : les ballonnements, les jaspures, la bigarrure des veines et l’affaissement de l’épiderme sont identiques. Le ventre du malheureux était cloqué comme celui d’un bouffon qui se force à péter : une semaine de plus dans la nature et nous n’aurions retrouvé que ses os dégarnis de chair. (p. 322, coll. Points)
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La pluie menaçait au-dessus de nos têtes, je déployai mon parapluie.
- Ah, non ! s'écria mon maître. Replie-moi ton engin qui révélerait que nous sommes pauvres.
- Mais comment la vue d'un parapluie signerait-elle notre indigence puisqu'il est du dernier goût ?
- Ma parole, Victor, il te manque un tiroir ! s'amusa-t-il. Nigaud que tu es ! Ceux qui marchent ont des parapluies parce qu'ils n'ont pas d'équipage ! Et s'ils n'ont pas d'équipage, c'est parce qu'ils sont nécessiteux !
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Les jours de pluie, de vieux paroissiens acariâtres et sans famille meublaient le salon de mes parents, aménagé dans une ancienne remise pourvue d'une vaste cheminée de pierre blanche. On priait les visiteurs d'apporter leur sucre et quelques potins dont mon père raffolait, qu'il notait dans un calepin, entre deux musiques, ; mon unique distraction consistait à promener le plateau de biscuits - rances de la semaine passée - en feignant de ne jamais écouter les conversations.
- Je déteste les enfants bien élevés dans les salons, bougonnait une vieille bique toujours vêtue de noir.
- Vous les préférez insupportables ? s'étonnait mon père.
- Oui, parce qu' on les envoie jouer dehors !
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Même devenu riche, je n’ai cessé d’avoir peur. On croit que l’abondance des biens nous guérit, mais c’est un leurre. En dégustant ma richesse, j’ai goûté une nouvelle crainte : celle de tout perdre.
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Comment messieurs ? Pourquoi m'interdiriez vous de l'embrasser alors que les condamnés ont droit à une dernière requête ? D'aucuns réclament une bonne pipe avant l'échafaud, et personne n'oserait leur refuser cette ultime bouffarde ! Quoique ... Il faut s'entendre sur la nature de la pipe, hein ? Ma pipe à moi, ce serait la bonne, la robuste et sincère poignée de main de mon Toussaint.
Mesdames, messieurs, voyez cet homme discret, au dernier rang : la couleur de sa peau est inverse à celle de son âme. Pareil à vous tous, ici : vous êtes blancs, mais vos esprits sont noirs.
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