Je reviens tout juste d'un voyage littéraire parmi les favelas brésiliennes, à la rencontre de quinze nouvelles, comme autant d'histoires écrites par
Conceição Evaristo, une auteure afro-brésilienne qui, elle-même, a grandi au coeur d'une favela, à Belo Horizonte.
La première d'entre elles, qui donne son titre au recueil, est un hommage empli de poésie à sa mère. Maissi l'écriture reste très belle, dès la deuxième nouvelle nous plongeons à deux pieds joints dans l'extrême précarité, avec sa faim qui ronge, le sexe et la violence qui, de manière plus ou moins explicite, seront le fil conducteur tout au long de notre lecture.
Ana Davenga, Duzu-Querença, Maria, Natalina, Salinda, Luamanda, Cida, Zaíta, di Lixão, Lumbiá, Kimbá, Ardoca, Dorvi, Bica, Ayoluwa… A chaque fois, c'est un autre personnage, une autre histoire, avec le point commun que, pour la plupart d'entre eux, ils sont descendants d'esclaves, et semblent encore en subir les conséquences. Ils sont en tout cas tous afro-brésiliens, et, en empruntant des chemins qui leur sont propres, tentent, chacun, de s'évader,
sortir, quitter cette noirceur qui est leur quotidien.
Ce fut une lecture tout en contraste, à la fois bercée par les mots et la prose poétique de l'auteure (même si je n'ai pas lu ce livre en version originale et ne peux donc pas l'affirmer de manière sûre, je pense que le travail de traduction effectué par
Izabella Borges a également toute son importance dans la beauté du texte), et à la fois malmenée par la violence, les décès,
la misère profonde, qui émaillent tour à tour les différentes nouvelles. La fatalité semble être la norme, et le caractère sombre qui plane au fur et à mesure des pages fait prendre conscience de la brièveté et de la fragilité de la vie lorsqu'on n'a pas la chance de grandir au bon endroit.
Tout mon respect en tout cas à
Conceição Evaristo pour le travail de mise en lumière et de mémoire, en ce qui concerne l'esclavagisme au Brésil et ses conséquences toujours si fortes actuellement. C'est une rencontre que je retiendrai.