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Critiques filtrées sur 3 étoiles  
Hans Fallada appartient à ce que le monde de la critique littéraire allemand a appelé la Trummerliteratur ,littéralement la littérature des ruines .Dans le Cauchemar, il décrit le difficile après-guerre que traverse le Docteur Doll, écrivain de son état , qui est désigné par l'occupant russe comme maire par intérim de son village .Alma, son épouse, et lui-même sont contraints de fuir vers Berlin , ville dévastée , en proie à la désorganisation, au marché noir, livrée à la règle du chacun pour soi.

Ce roman, qui fait souvent penser au Voyage au bout de la nuit de Céline, par ses descriptions de la souffrance humaine en milieu hospitalier et par la détresse de ses personnages, en proie à une grande déréliction morale, pose les grandes questions auxquelles l'Allemagne eut à répondre après la guerre. Celle de la culpabilité, évoquée par le philosophe Karl Jaspers dans son ouvrage die Schuldfrage, bien improprement traduit par La culpabilité allemande, tient une place essentielle dans le roman :
« Lui, Doll, était un Allemand, et il savait, du moins en théorie, que depuis la prise du pouvoir par les nazis, que depuis la persécution des Juifs, ce nom d'Allemagne avait de jour en jour perdu de son éclat et de sa réputation ! On ne nous le pardonnera jamais ! Pour cela, nous devrons tous payer un jour ! »
Les séquelles que provoquent les douze années d'un pouvoir totalitaire et barbare sur l'état moral du peuple allemand sont très bien évoquées quant à leur conséquence sur la vie individuelle des citoyens allemands : « Ils allaient devoir rester vides et nus, et avec les mensonges qu'on leur avait serinés une vie durant comme les plus profondes vérités et les plus grandes sagesses, disparaîtrait aussi ce qu'ils possédaient encor d'amour et de haine, de souvenirs et d'estime d'eux-mêmes de dignité ? »

Même s'il apparaît en retrait de Seul dans Berlin, un peu plus marqué par quelque longueur, le Cauchemar mérite d'être découvert comme un roman important de l'après-guerre, n'ayant pas été disponible depuis plus de soixante ans, selon les indications de l'éditeur.

STEPHANE BRET
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Hans Fallada, pseudonyme de l'écrivain allemand Rudolf Ditzen (1893-1947), naît dans une famille aisée mais a des relations conflictuelles avec elle. En 1911 suite à une sombre affaire de suicide d'un de ses amis, maquillé en duel dans lequel il est gravement blessé, Fallada est inculpé de meurtre et interné dans une clinique psychiatrique à Iéna pour une courte durée. Il abandonne ses études secondaires sans diplôme et fait un apprentissage agricole. de 1913 à 1928, il occupe des emplois divers dans ce secteur, sans être requis plus de quelques jours pendant la Première Guerre mondiale. de 1917 à 1919, il suit plusieurs cures de désintoxication (alcool et morphine) et par la suite il est à plusieurs reprises mis en prison. En 1929, il se marie et aura trois enfants, époque à partir de laquelle il travaille dans les secteurs de l'édition et du journalisme, jusqu'à ce qu'il puisse vivre de ses droits d'auteur. Hospitalisé en raison de ses problèmes d'addiction, Hans Fallada meurt d'un arrêt cardiaque le 5 février 1947.
Le cauchemar, roman de 1946 qui vient d'être réédité en poche, est autobiographique et très proche de ce qu'on peut lire de la vie de l'écrivain sur sa fiche Wikipédia.
Le roman débute en 1945, dans un petit village allemand où les Doll ont une résidence secondaire. Lui est écrivain, Alma sa seconde épouse veuve d'un premier mariage, beaucoup plus jeune tranche dans le décor. Les Russes de l'Armée Rouge approchent et presque tout le monde fuit sauf eux, dans l'attente « des libérateurs si longtemps attendus » et Doll de se retrouver désigné maire temporaire par le commandant Russe, au grand déplaisir des locaux. Epuisés par la mesquinerie et la bassesse des habitants, les Doll décident d'abandonner le village pour retrouver leur appartement à Berlin. Mais la ville est en ruines, le couvre-feu régit les déplacements, leur appartement a été réquisitionné et Alma blessée à une jambe doit aller à l'hôpital. La guerre est finie mais la descente aux Enfers continue…
Les galères vont succéder aux galères, la bureaucratie qui leur refuse le droit de récupérer leur appartement et sans logement pas de carte d'approvisionnement d'où marché noir et dépenses en conséquence. Hôpital pour elle et sa septicémie à sa jambe, sanatorium pour lui, la morphine fait des merveilles… Autour d'eux outre les ruines de la ville, les gens sont cupides, mesquins, cramponnés à leur misère où la faim et le froid font leur loi. Si Alma réside à l'hôpital, lui réussit à se dégotter un cagibi dans son ancien logement. Elle, jeunesse oblige, conserve son exubérance optimiste mais Doll sombre dans le pessimisme le plus noir : pessimisme sur leur avenir propre et, plus général, sur le peuple Allemand, « ce peuple de vaincus », où aujourd'hui encore, après avoir enduré le nazisme, il constatait « que le mal triomphait encore et toujours, que tout ce qui existait ne faisait que régresser ». Avanies, humiliations et souffrances se succèdent, espoirs déçus…
Le dernier chapitre montre pourtant une embellie, un écrivain célèbre et un éditeur offrent leur aide à Doll, il obtient un logement correct et recommence à écrire un roman qui ressemble à celui-ci (mise en abîme), l'optimisme est de retour avec la pensée positive « Continuer à vivre et travailler ! Voilà le mot d'ordre ! ». Mais nous sommes alors en été 1946 et si Doll va mieux, Hans Fallada décédera quelques mois plus tard, début 1947.
J'aime beaucoup cet écrivain dont j'ai déjà chroniqué plusieurs ouvrages et ce roman ne fait pas exception, il est très bon.
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