Citations sur Moi, Christiane F., 13 ans, droguée, prostituée... (90)
"J'aimerai crier mon mal-être, sortir cette violence qui m'étouffe, qui explose dans ma tête."
La seringue à usage unique, en plastique d'un blanc laiteux, est encore plantée dans la main gauche : Babette D. (quatorze ans), collégienne, est morte. La jeune fille - à se jour la plus jeune victime de la drogue- a été découverte inanimée dans un appartement de la Brotteroder Strass.
Mais notre amitié n'est en fin de compte qu'une amitié de toxicos.
Quand je lui ai raconté pourquoi j'étais dans un tel état, il [le médecin] m'a dit que quelques jours auparavant, une jeune fille venue consulter lui a avoué qu'elle se drogait. Elle lui a demandé quoi faire.
«Et que lui avez vous dit ?
- D'aller se pendre, il n'y a pas d'issue.»
C'est ça qu'il lui a dit. [P.244]
Maintenant, je ne suis à peu près heureuse que dans les moments où je rêve, et où je rêve que je suis quelqu'un d'autre [p. 163]
A la cité Gropius, on apprend pour ainsi dire automatiquement à transgresser les interdictions. D'ailleurs, tout ou presque est interdit, et surtout de jouer à ce qui vous amuse
Je revois Detlev dans le courant de la nuit. Il me sourit - un sourire qui semble venir de très loin. Il a l'air très heureux. Il n'éprouve pas le besoin de venir me parler. Et moi je ne veux pas aller le rejoindre. C'est encore pire que la nuit où j'ai perdu Atze. Detlev est parti, parti dans un monde qui n'est pas le mien. D'un seul coup, à cause d'un doigt sur une seringue, il n'y a plus rien de commun entre nous.
J'ai douze ans. J'ai déjà un peu de poitrine et je commence à m'intéresser fortement aux garçons et aux hommes. A mes yeux, ce sont des êtres bizarres. Brutaux, tous. Aussi bien les grands garçons qui traînent dans la rue que mon père et même Klaus, à sa manière. Ils me font peur. Mais ils me fascinent aussi. Ils sont forts, ils détiennent le pouvoir. Je les envie. En tout cas, leur force et leur puissance m'attirent.
Il ne nous parle plus, il ne nous voit pas. C'est pire que les coups.
"À midi, ma mère me réveille et m'apporte le déjeuner au lit. Elle le fait toujours quand je suis à la maison le dimanche. Je me force à avaler quelques bouchées. Difficilement : à part le yaourt et le fromage blanc et les flancs, plus rien ne descend. [...] Comme chaque jour, je me regarde dans la glace. J'y vois un visage étranger, ravagé. Il y a longtemps que je ne me reconnais plus dans l'image que me renvoie le miroir. Ce visage ne m'appartient pas. Pas plus que le corps squelettique."