Citations sur Moi, Christiane F., 13 ans, droguée, prostituée... (90)
L'héroïne m'inspire une sainte horreur. Quand il est question de ce truc-là, je me rappelle brusquement que j'ai treize ans. Mais, d'un autre côté, me voici, une nouvelle fois, pleine de considération pour les autres — les groupes où on se pique. Pour moi, ce sont eux maintenant les êtres supérieurs. Les junkies nous regardent avec le plus grand mépris. Le haschisch, ils appellent ça de la drogue pour bébés. Ça me déprime de penser que je ne ferai jamais partie de leur bande, que la vrai Scène ce n'est pas pour moi. Plus de promotion possible, donc. Car cette drogue-là me répugne profondément : c'est le fond de l'abîme.
Ç'a m'est assez égal de voir notre bande se défaire : j'ai Detlev. Les autres ne comptent plus tellement. Detlev et moi, ça va de mieux en mieux. Un dimanche je l'emmène à la maison. Je sais que ma mère et son ami sont absents. Je fais la cuisine pour Detlev, je lui prépare un vrai repas. Nous nous mettons à table et nous prenons notre déjeuner dominical, comme un vrai couple. Je trouve ça vachement chouette"
Il ne nous parle plus, il ne nous voit pas. C'est pire que les coups.
Rien ne transpire à l'extérieur des souffrances et du désespoir de ces enfants en détresse et de leur monde.
Ça me dégoûte, ce manque total de solidarité entre les filles. Dès qu'il est question des garçons, tous les liens d'amitié sont oubliés.
Je me dis qu'il doit bien y avoir un moyen terme entre fuir cette société pourrie et s'y adapter totalement.
Plusieurs toxicos ont déjà choisi ces toilettes du Bundesplatz pour s'y suicider : elles sont si bien!
C'est moche de mourir quand on n'a pas encore vécu.
Malheureusement on ne pouvait pas la garder, la clinique n'ayant pas de service d'isolement. C'était un mensonge. Depuis je me suis renseignée : la clinique Steglitz a un service d'isolement de 25 lits. En réalité ils ne veulent pas de toxicos, ils se trouvent trop bien pour ça. [P.317]
Juste avant de m'endormir, je me dis : «Christiane, tout ça n'est pas pour toi. Tu te trompes de chemin.»
(après sa "mise au vert" par sa famille) :
La plupart des mecs fréquentant les discos de mon patelin m'inspirent une véritable horreur. Peut être parce que j'ai l'air un peu différente des autres, ils sont tout le temps après moi. Ces sifflets, ces "alors, ma vieille, on va faire un tour ?" me débectent encore plus que le manège des clients Kurfürstenstrasse. Eux, au moins, même quand ils vous font signe au volant de leur voiture, vous octroient encore un sourire. Mais ces caïds de village ne se donnent même pas cette peine. Je crois bien que la plupart des michetons se sont montrés plus gentils et même plus tendres avec moi que ces petits mecs avec leurs nanas. Ils veulent baiser sans un mot ou un geste aimable, sans la moindre tendresse - et bien entendu, il ne leur viendrait pas à l'idée de payer pour ça.