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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Comme une autobiographie par les livres ....

"Peut-être craigniez-vous qu'un livre sur les livres n'apparaisse que comme une coquetterie ? Vous avez donc imaginé un double inversé : il est homme, je suis femme ; il est âgé, elle est jeune; lui parisien, elle banlieusarde; il a baigné dans la culture, elle y a accédé... (...) Aviez-vous donc si peur, une fois de plus, de vous retrouver face à vous même pour éprouver le besoin de me prendre en otage de monologues à peine travestis en dialogues ? Doutez-vous tant de vous qu'il vous faille,
chaque fois , multiplier les leurres ?
C'est pourtant un beau livre que celui que vous auriez pu écrire. Un homme se déprend de lui-même. Il cherche sa vérité, et l'attaque comme un sommet, par sa face la plus périlleuse. Sa vie se confondait avec les livres ?
Alors quelle est-elle , sans eux ? Que va-t-il découvrir derrière sa bibliothèque, quand il l'aura vidée ? Lui ? Ou rien ? Il ôte, un à un, les vêtements qui furent les siens jusqu'à faire corps avec lui. mais y-a-t-il un corps sous ces oripeaux ?
Il s'était constitué par les livres, c'est par les livres qu'il se destitue. "(p. 349)


Ce roman (ou autofiction) de Michel Field avait tout pour me plaire; je l'ai acquis en juin 2014; je l'ai débuté aussitôt, abandonné, repris, ré-abandonné: pour la einième fois, je le reprends, décidée à en venir à bout . Tous les "ingrédients" étaient présents pour m'emporter dans cet amour des livres, cette passion même ...et une très vaste culture dans les domaines les plus variés, l'esprit possessif de l'auteur pour sa vaste bibliothèque, reflet des rencontres, d'apprentissages marquants qui ont nourri , construit son être, sa personnalité, affiné ses goûts...

"Depuis des années, sa bibliothèque s'était peu à peu imposée comme l'interlocutrice privilégiée de son existence. Elle était à la fois sa compagne, sa confidente, sa meilleure amie. Sa mémoire, puisque chaque période de sa vie était déposée là, sur quelque étagère. Son présent, la chose allait de soi. Et son avenir: chaque livre en appelait un autre, toute lecture exigeait une suivante et, plus il lisait, plus l'infini de ce qu'il n'avait pas lu, qui eût pu l'accabler, l'invitait au contraire à intensifier sa quête. Elle avait fini par avantageusement remplacer son rapport aux autres." (p.15)

Parvenu à un certain stade de son existence, il eut besoin de faire le point, de se "déprendre" de cette accumulation d'ouvrages.

Pour ce, il commence à se rendre chez un soldeur, pour vendre ses livres... Dans la queue des clients-vendeurs, une jeune femme l'accostera, et lui proposera un drôle de jeu: elle lui donnera un mot ou une idée... et il devra lui proposer un choix d'un ou de livres sur le sujet , et s'en séparer...! s'ensuivent des échanges énigmatiques, séduction, mises à distance...

Alors pourquoi ai-je abandonné cet ouvrage autant de fois ? Je ne parviens pas à saisir la vraie raison de ce manque d'accroche ...Peut-être la trop forte sensation du côté factice de ce dialogue et jeu entre cette jeune femme et notre "vieux" narrateur ! et quelques longueurs dans les digressions ( lorsque, je l'avoue, les thèmes m'intéressaient de façon moindre !)

Sinon, il est vraiment plaisant de voir la multitude d'ouvrages, d'auteurs lus, aimés par Michel Field sur les sujets les plus larges... une impression de familiarité et de rappels de souvenirs de mon propre parcours de libraire, de lecteur boulimique avec des maisons d'édition appréciées [ dont NEO , Nouvelles éditions Oswald...que l'on trouvait déjà chez les soldeurs, alors qu'il y avait des auteurs étrangers importants... Je me rappelle, entre autres "Des Bûcherons" de Thomas Hardy ]
Certaines de ses préférences croisent les miennes comme Panaït Istrati, Jack London...

"Il voulait maintenant comprendre ce que signifiait une bibliothèque. Ce que voulait dire cette succession d'actes, acheter, lire, garder, classer, accumuler, se laisser envahir par les livres. Il voulait maintenant savoir ce qu'on pouvait apprendre de quelqu'un en lisant sa bibliothèque : sa vie ? Son fantasme de vie ? Les regrets d'une vie ? "(p. 249)

Michel Field parle de boulimie, de lecture de plusieurs ouvrages, en simultané, mais aussi des multiples questionnements, hésitations pour classer au mieux "nos bibliothèques" ... Lecture plaisante et enrichissante , qui rend hommage à quasiment tous les genres et toutes les disciplines ! Hommages aux Livres et aux Lecteurs boulimiques !!

"C'est peut-être ça, une bibliothèque. mais tout aussi l'inverse. Une manière de poursuivre le dialogue avec les morts, de les faire revivre, de mettre ses pas dans les leurs. de sauvegarder le lien. Ces livres délaissés, comme mis à l'index dans cette petite pièce désolée, n'attendaient qu'une chose. Qu'on les ouvre à nouveau. Qu'on les parcoure . La lecture, chaque fois, comme une résurrection. Comme un défi aux morsures du temps qui passe."
(p. 276)

Joyeuse d'avoir enfin lu cet ouvrage, qui est comme une conversation complice et stimulante sur toutes nos folies et excès face à nos attachements démesurés aux livres... C'est aussi une invitation à l'éclectisme et à la tolérance !...

D 'abondantes remarques judicieuses sur ce que peut représenter une bibliothèque, à quel(s) cheminement (s) individuel (s) renvoie(nt)-telle ?

Comme un livre de chevet, que l'on peut reprendre au hasard, relire tel ou tel passage...retrouver des mini-bibliographies, des références oubliées ou méconnues!
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Un miel, que cet univers des livres qui n'est pas sans rappeler le magnifique Une trop bruyante solitude de Bohumil Hrabal. Michel Field nous confie de la même manière son amour inconditionnel pour le livre ; amour pourtant conditionné à celui de la femme aimée : se débarrasser un à un de ses livres pour plaire à la belle, bigre, pas rien !
Mais plus encore que ce geste amoureux, c'est bien de tout ce qui gravite autour des bouquins, hommes, lois, soi et les autres, soi et l'amour, qu'il nous entretient. En fait, rien ne lui est étranger, les portes s'ouvrent comme par magie sur ce qu'on ne supposait même pas. L'auteur communique sa façon d'appréhender le monde tel qu'il le ressent, tels que le traduisent les livres qu'il cède un à un au soldeur.
Pour l'essentiel, le soldeur, c'est à cette lecture-là que nous sommes invité : la souffrance d'avoir à se défaire de livres qu'on pensait compagnons de vieillesse, amis protecteurs - Montaigne en sa bibliothèque.
Un pur bonheur, une belle intériorité, un beau défi.
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Je crois que pour aimer ce livre, il faut aimer se triturer les méninges !
Ici l'histoire n'est qu'un support pour servir le discours sur la passion que peut engendrer la littérature, mais pas que...
Il ne faut pas s'attendre à une intrigue forte sous peine d'être rapidement déçu. L'intérêt est ailleurs et croyez-moi, il y en a !

"Le soldeur" n'est pas destiné seulement aux passionnés de littérature car le livre est traité comme le reflet du monde, des Hommes et de leurs relations dans notre société. Dans cette histoire, le livre est en quelque sorte l'arbre qui cache la forêt. le narrateur parle du livre car c'est sa zone de confort, mais de son rapport aux livres, de ses goûts littéraires, de sa façon de ranger les livres découle toute sa personnalité. Lorsqu'il dépeint ses lectures, il dépeint son caractère et au delà de lui, par recoupement, le nôtre ou celui de notre voisin.

Il y a dans ce livre énormément d'émotion et d'amour. L'émotion est contenue, elle m'a plu car il fallait sans cesse imaginer le ressenti réel du narrateur. Il va parler de tel livre qu'il a aimé lire, qui a acquis une valeur affective, dont il peine à se séparer, puis il le liquide sans effusion. Ce flou artistique, ce décalage entre un objet auquel on tient et celui qu'on jette laisse une grande liberté d'interprétation au lecteur, j'ai trouvé cela agréable.
Quant à l'amour, c'est un amour peu commun à traiter que celui du livre. L'auteur choisit d'en parler comme d'une curiosité à deux faces. Il y a le livre face A, l'objet qu'on expose dans une bibliothèque et le livre face B dont on s'empare, dont on tourne les pages et qui nous nourrit. Que faut-il privilégier ? Les yeux ou l'esprit ? le plaisir des yeux n'est pas grand chose finalement car si les livres s'entassent, ils encombrent, alors qu'ils pourraient servir à d'autres.

Finalement, l'auteur soulève beaucoup de questions. S'ensuit un raisonnement quasi philosophique sur la représentation du livre : est-il synonyme de partage ou est-ce un plaisir strictement égoïste ? C'est très intéressant de suivre la lecture sous cet angle.

Le bémol que j'émets toutefois, c'est la longue liste des ouvrages en fonction de leur édition, la couleur de leur couverture. Les plus érudits s'en sortent, les lecteurs comme moi ont tendance à s'y perdre. J'aime lire, mais je ne lis apparemment pas suffisamment pour tirer une quelconque satisfaction quand on m'évoque l'esthétique d'une édition en particulier.
C'est le seul inconvénient du Soldeur: plus on est en phase avec les goûts de l'auteur, plus on tire plaisir à se balader dans sa bibliothèque.
D'un autre côté, l'incroyable talent de l'auteur, c'est de réussir à nous embarquer même quand on n'est pas en phase avec ses lectures.
C'est un livre dans lequel il faut se plonger sans a priori pour en saisir toutes les subtilités et surtout ne porter aucune attention particulière à l'histoire entre le narrateur et l'inconnue en elle-même car elle n'est qu'un fil conducteur.
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