J'ai tout d'abord été interpellée par ce titre et cette couverture que je trouve vraiment très parlante en ce qui concerne les femmes et le suivi de leurs plaintes par la justice.
Cet essai écrit par une avocate est tout simplement révoltant mais reflète malheureusement parfaitement la réalité en ce qui concerne la justice et le dépôt de plaintes des victimes, on en voit d'ailleurs encore beaucoup d'exemple récemment avec des actrices qui portent plainte des années après les faites, de mêmes que des anonymes récemment pour des animateurs.
Souvent les questions posées par la police sont du type, mais quel était votre tenue, n'étiez vous pas plus ou moins consentante etc...
Quand les chiffres tombent concernant le nombre de plaintes traités sans suite, cela est effarant, très peu de plaintes aboutissent au final.
Les victimes subissent donc la double peine, celle de l'acte vécu et le fait que cela ne soit pas reconnu par la justice par la suite, le dépôt de plainte étant de plus une épreuve de devoir revivre la ou les scènes de les raconter à plusieurs reprises et à plusieurs personnes différentes.
Je ne lis pas tellement d'essai mais ici le sujet m'a parlé de suite, j'ai même failli loupé mon arrêt de bus tellement j'étais immergé mais aussi révoltée par celle-ci.
J'aimerai tellement que l'on parle plus de cet essai afin que les mentalités également à ce sujet puisse évoluer.
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Essai court et indispensable, d'une clarté incroyable et écrit par une avocate passionnée et révoltée.
Elle dresse le constat amer que 80% des plaintes de violence conjugales ou de viols sont classées sans suite. Et cela malgré meetoo et tous les réseaux sociaux, les célébrités mises en accusation etc… le sujet reste encore tabou dès que cela nous touche ou touche un proche : c'est proprement hallucinant.
L'auteure nous parle de la nécessité d'agir dès la petite enfance où, si une fille va à l'école avec un sac Spiderman, ça passe, mais si un garçon y va avec un « reine des neiges » il sera huer.
Nous sommes dans une culture patriarcale et elle est appuyée par la religion, le toujours présent code Napoléon. Changer sera long, trop long.
Elle nous décrit l'enfer du dépôt de plainte, le regard porté sur ces femmes qui portent plainte des années après parce que le choc a été tel qu'elles l'ont oublié, gommé et qu'après elles estiment que c'est trop tard, qu'il n'y a plus des preuves. Ce qui veut dire que l'on peut doubler au moins le chiffre des femmes violentées ou victimes conjugales. C'est effarant.
J'avoue tomber dans l'extrême et au lieu d'un avocat, penser castration du coupable. Mais elle convainc aussi qu'il faut se dire que les lignes bougent, bien trop lentement, mais elles bougent favorablement
Un livre à lire absolument pour se rendre compte du phénomène et de tout ce qu'il y a à faire et militer, faire entendre sa voix pour que justice soit entendue et rendue.
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J'ai lu cet essai dans le cadre d'une réflexion sur la culture du viol en France. C'est un essai complet, accessible et très bien sourcé. A travers le prisme du système judiciaire en France, et notamment pénal, l'autrice démontre comment à chaque étape les victimes de violences de genre et de violence sexiste et sexuelle sont confrontées à un impressionnant armada de freins pour déposer plainte, être reconnue par la justice comme victime (et par extension la société).
A une époque où beaucoup décident d'attendre que "la justice fasse son travail" ou "des preuves", c'est un livre essentiel pour comprendre les rouages d'un tel schéma de pensées et de l'impasse qu'il représente.
De plus en plus, j'en viens à penser qu'une véritable réforme pénale et judiciaire pour les crimes et délits sexuels accompagnera un changement des mentalités, ce livre participe à m'en convaincre.
A mettre en plus le plus de mains possibles !
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Précis, intense et imparable, ce livre d’utilité publique vient combler un vide éditorial sur un sujet pourtant essentiel.
Lire la critique sur le site : MadmoizellePresse
Réfléchir à des habitudes concrètes qui ne présentent vraiment pas un danger de mort immédiat peut être perçu comme une paranoïa excessive. En réalité, le sexisme commence ici : le fait de ne pas vouloir interroger des habitudes, en estimant que « ce n'est pas si grave », « ça a toujours été comme ça », est un signe de plus de l'incidence de nos préjugés sur notre jugement rationnel. Il ne s'agit pas ici de nous accabler individuellement du poids du sexisme collectif, sur lequel à l'échelle individuelle nous n'avons évidemment qu'une infime part de responsabilité. Il est plutôt question d'accepter d'interroger certains de nos réflexes sociaux. Ce n'est pas un exercice agréable, puisque cette réflexion peut ponctuellement nous amener à remettre en question des choses que nous faisons, que parfois même nous aimons, et qui nous rassurent car elles appartiennent à notre système de valeurs.
À la naissance, seulement 10 % de nos connexions neuronales sont établies : le cerveau d'un individu se développe donc essentiellement à partir de la naissance et selon l'expérience de vie. (...) Le cerveau n'est donc pas figé. Prendre une « photo » IRM de cet organe revient juste à en fournir un cliché instantané à un moment donné. Au moment de la photographie d'un cerveau adulte, les connexions neuronales sont déjà imprégnées de plusieurs décennies de vécu patriarcal. Le fait de visualiser des différences ne signifie pas qu'elles sont présentes depuis la naissance, ni même qu'elles vont rester ad vitam : cela ne dit rien sur l'origine ni le devenir de ces disparités. D'ailleurs, ces différences n'apparaîtraient pas de manière significative chez les enfants, ce qui rend d'autant plus pressante l'urgence d'éradiquer le sexisme de l'école.
C'est pourquoi, pour rompre avec cette idéologie délétère, il faut sans doute entrer en résistance intellectuelle, en militance ferme : il faut aller chercher d'autres modèles, d'autres références, secouer l'histoire pour lui faire dégorger toutes les femmes silenciées et invisibilisées (…)
Il faut pourtant être lucide et sortir de ces stratégies de communication délétères. À l'heure actuelle, on ne peut ignorer que déposer plainte équivaut à s'engouffrer dans un tunnel sans lumière tout en s'exposant à être broyée par le système. Bien à l'opposé, donc, d'une quelconque voie de prise en charge correcte.
Toutefois, il est indéniable que déposer plainte permet d'entrer dans les statistiques et ainsi de sortir « officiellement », par les chiffres, les violences de l'invisibilisation.
À l'heure actuelle, on ne peut ignorer que déposer plainte équivaut à s'engouffrer dans un tunnel sans lumière tout en s'exposant à être broyée par le système. Bien à l'opposé, donc, d'une quelconque voie de prise en charge correcte.