Voilà ce qu'était la guerre. Ce n'était pas la gloire dorée de jeunes hommes en armures reluisantes, gravant leur nom dans la chair de l'histoire. Ce n'était pas la bravoure homérique de héros changeant la face du monde. Non. Ce n'était qu'un calme terrible, un silence absolu, un mal épouvantable qui laissait des enfants morts dans son sillage.
(...) et la mort posa un doigt squelettique sur son âme.
- Ce n'est pas la victoire, l'important, Cormac. La vraie force vient de l'effort.
Il y a des gens qui ont besoin de souffrir pour intégrer les choses.
Par le sang d'Odin! les hommes de ce village ont de la pâtée pour cochons à la place de la cervelle!
- Tu n'es jamais assommant, dit Cormac. Tu es un merveilleux conteur.
- Tu me rediras ça le jour où tu en auras écouté un autre. C'est facile d'être le roi quand on est le seul habitant du pays.
Un homme peut passer sa vie à voler ; pourtant, il suffit qu'il accomplisse une seule bonne action pour qu'on l'évoque avec tendresse en chanson. Mais un roi ? il peut consacrer son existence à faire le bien, mais s'il commet le moindre acte malveillant, on se souviendra de lui comme un tyran. [...] On regarde le vaurien de haut, mais le roi, on le regarde d'en bas. C'est pourquoi le vaurien peut toujours être pardonné, tandis que le roi représente bien plus qu'un homme : c'est un symbole. En tant que tel, il n'a pas le droit d'avoir des faiblesses.
- Je ne suis pas ton père, espèce de rat du Sud, répondit l'homme avec un sourire, dévoilant l'unique dent qui pendait à sa gencive.
- N'en sois pas si sûr, père. Tu m'as l'air d'avoir été de ceux qui disséminent leur semence dans leur jeune temps, et ma mère attirait ce genre d'hommes.
La foule gloussa et le vieil homme avança, une lueur brillant dans ses yeux bleus.
- En effet, maintant que tu le dis, on a un petit air de famille. Je suppose que tu as apporté un cadeau à ton vieux papa?
- J'avais peur, pourtant. Mais tout ce que je voyais, c'était une femme diabolique. Au pire, elle me tuait. Est-ce si terrible que ça? Dans cinquante ans, tout le monde aura oublié mon nom. Je ne serai qu'un grain de poussière dans l'histoire. Avec un peu de chance, je mourrai âgé et je pourrirai. Sinon, je mourrai jeune. De toute façon, l'issue sera la même.
- On ne gagne jamais rien à débattre avec une femme, murmura Prasamaccus. Elles ont toujours raison, je m'en suis rendu compte dans mon village. Il ne te reste plus qu'à aller t'excuser auprès d'elle.
- Pourquoi donc?
- Pour lui avoir démontré qu'elle avait tort.