Lancinant,
le cri des mouettes
nous traverse comme un reproche
Nous avons vécu des années de poussière
sans retenir la leçon des tempêtes
Le temps s’est évaporé,
la plage est vide
Si peu de mots pour construire la vie
Le cri des mouettes,
lancinant,
dénonce les renoncements,
la passivité des miroirs
Nous avons laissé nos couteaux au vestiaire
Il fallait brasser sans relâche la boue,
extraire l’or,
et scintiller
Il fallait mettre le rêve en mouvement
Il fallait
Mais nous avons si peu rêvé
Déchirant,
Le cri des mouettes
Déchirant.
Tout n'est-il que trompe l’œil
dans ce monde en suspens?
Nous avons égaré notre texte,
et le souffleur s'en est allé
Tout n'est-il donc qu'illusions,
Ombres et vents
Vagabondages?
Chevauchées à travers la mémoire
qui ne retient que la fumée
Surprise de l'aurore
échappée de la nuit sauvage
comme un filet d'eau claire
qui délivre les joies possibles
Le vent a chassé les nuages,
balayé les mémoires
Une étrange lumière invite au songe
révélant la naissance du monde
La vie n'est-elle qu'une escapade
aux sources du soleil?
Ainsi que des faucons s’accouplant en plein vol,
arrimés à l’amour,
quelques fois à la haine
Perdus dans les hauteurs
et refusant d’un geste vaste
la pesanteur et ses limites
Ainsi que des rêveurs en quête de réel,
explorateurs d’espace
et de franchissement
dans tous les lieux du dire,
par le rythme et le souffle
Passagers clandestins,
cachant nos désirs d’absolu par peur des dieux jaloux
nous errons et planons
ballotés d’amours en refus
d’espoirs fugaces en douleurs provisoires
cherchant des points d’ancrage
dans les sables mouvants
Ainsi que de grands fauves
En manque de tendresse
L’air m’enveloppe,
me berce
comme l’eau maternelle
douce et sauvage au fond du rêve
Je suis sans nom
Aigle et poisson
dans la tentation du vide et le bouillonnement des choses…
Pierre dissoute
Liquéfiée dans le vent
Le solide n’a plus de base
Plus de mémoire
Éclatement
Pierre torche dans le bouillonnement du monde…
Le poème est un court-circuit
qui porte l’incendie
jusqu’au cœur de nos plus lourds sommeils
Rapt et ravissement
Il fonce, rapace au bec de braise,
sur la vie léthargique…
Festival Voix Vives 2022
Lecture et croissants : Colette Gibelin
Images et montage : Thibault Grasset
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