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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
C'est une nuit de veillée funèbre. Celle d'Albert. Giono - avec 5 personnages : le mort, son épouse qui dort, Thérèse et deux commères – fait de cette veillée un chef d'oeuvre de réflexion sur l'humain, l'ambiguïté, la démesure. Cette nuit blanche dont le motif – la mort – n'est pas anodin, n'est également un prétexte pour créer un huis-clos entre les trois femmes éveillées. Thérèse est la plus vieille c'« était une âme forte. Elle ne tirait pas sa force de la vertu : la raison ne lui servait de rien » ; elle est le sujet de ce roman. Cette âme forte de sa détermination presque animale, va raconter/ confesser sa vie. Je dis confesser mais Thérèse une femme résolue qui n'a besoin ni de confesse, ni de pardon. Elle vit par et pour elle. Un deuxième personnage va apporter tout au long du récit de Thérèse des éclairages nouveaux. En contredisant le récit idéalisé de Thérèse, elle l'oblige à bifurquer vers la vérité. C'est un effet de miroir déformant qui est très troublant car on ne saisit pas bien qui manipule qui. En effet, le récit commence doucettement par la fuite de Thérèse avec son amoureux, Firmin qui n'est pas accepté par ses parents. Leur romance racontée de façon idyllique les conduit jusqu'à une auberge où ils vont trouver tous les deux un honnête travail mais c'est compter sans la commère qui a entendu parler d'une autre histoire entre les tourtereaux. Un récit plus sombre, fait d'errance, de trimard (comme dit Thérèse) sur les routes, sous la pluie, fait de petites escroqueries, et à se donner au plus offrant. La narratrice reprend alors la parole sans s'opposer à cette vision. On s'attend à ce qu'elle se fâche mais non ! Au contraire, elle continue l'histoire en se plaçant sur ces nouveaux rails. Et oui, la réalité était différente, le récit continue, plus complexe. On découvre Thérèse faisant, à Châtillon (un petit bourg très provincial) la rencontre cruciale de Madame Numance – une autre âme forte, déterminée à faire le bien. Elle devient pour Thérèse une sorte de mère sublimée, le visage de l'amour, prête à tout lui donner, jusqu'au dernier de ses sous. Elle en sera la servante dévouée, la fille adoptive pendant que Firmin, lui, se détériore et rêve de richesse. La finesse d'étude des personnages que nous livre Giono confine au chef d'oeuvre quand survient une ultime contradiction qui précipite une fin inattendue et une chute infernale. le revirement est brutal. Un livre puissant.
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Giono c'est une atmosphère. Bien sûr on pense à la Provence, mais là, même si on y est en Provence (côté montagne de la Drôme) elle ne joue pas un grand rôle dans cette histoire. Ici c'est le tréfonds de l'humanité qui prime, cette âme si difficile à déceler.Giono ce sont des personnages. Et ici Thérèse, cette Thérèse partie de rien, sans instruction mais avec un grand dessein, et avec comme seule arme son âme forte. Magnifique.

Quel roman !

D'abord la forme ; ici on veille un mort, et pendant la veillée funèbre les femmes causent près du feu, avec quelques provisions et du café. Les histoires du village vont défiler, de façon certes décousues, avec de multiples retours et contestations, mais on comprend bien qu'il s'agît de la même histoire, dans ce village, dans cette auberge où s'arrêtent les pataches, où les voyageurs font haltes. Mais chacune a sa version, et Thérèse, vieille maintenant, raconte t-elle son rêve ou bien sa vie ? Cette unité de temps de la narration (une nuit) rend compte d'une bonne cinquantaine d'année à travers des voix multiples et souvent contradictoires. Sans découpage, l'enchainement des évènements et des personnages est parfois difficile à suivre, mais le récit est très rythmé.

Et puis le fond ; toutes les bassesses, toutes les jalousies, toutes les rancoeurs, les hypocrisies, un univers impitoyable et cruel où les sentiments sont bridés pour pouvoir agir froidement. Sauver coute que coute les apparences constitue également un leitmotiv. Mais on y trouve aussi l'amour, l'amour véritable, le dénuement, la passion dévoreuse, la folie.

Giono nous dresse là un tableau de la société dans ces vallées alpines à la fin du XIXème siècle. Une société en mutation, où l'on construit le chemin de fer, où l'on fait appel à la main d'oeuvre piémontaise, où s'installe durablement des chantiers colossaux, et où les affaires et l'argent peuvent être rapidement gagnés pour qui sait s'y prendre.
Lien : http://animallecteur.canalbl..
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Jean Giono signe là un livre déconcertant. Où il brouille délibérément les pistes, il brouille l'intrigue, il brouille les personnalités, il brouille les temporalités. Et c'est bien. Ca marche pour moi.
Hormis le prénom du personnage central : Thérèse. Ou en fait, c'est d'autant plus culotté (ou calotin) de sa part de choisir ce prénom si chrétien, pour une femme qui est donc définie comme une âme forte. Je ne décrirai ou définirai pas ce termes, parce que c'est précisément tout l'enjeu du livre. de parvenir à mettre en place et faire tenir debout tout cet artifice ou attirail "âme forte".
On connaissais les bons hommes, les gens de bien, et plus récemment les belles personnes. Ici, ce n'est pas aussi évident, c'est troublé et troublant.
La narration -je le répète- peut déconcerter aussi. Sans doute pas mal de lecteurs lâcheront le livre ne s'y retrouvant pas. Pourtant les histoires qui se superposent, se contredisent, c'est très amusant, au fond.
Et qu'est-ce qu'une vie, de toute façon...
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Savoureuse (et féroce) histoire racontée par deux femmes lors d'une veillée mortuaire, quelque part entre Lus-la-Croix-Haute et Châtillon-en-Diois, selon deux versions différentes dont on ne saura jamais le fin mot, mais on s'en fout. Ce qui compte, c'est la langue, et que l'histoire se déroule, vraie ou pas, et les deux commères s'y entendent à merveille. Beau voyage dans le temps et dans la Drôme où commence la Provence.
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Dans un contexte de vie simple de femmes qui viennent, dans une maison de village, veiller un ami, trois personnages se racontent, évoquant les faits simples d'une vie...On se croirait sur une scène de théâtre.
L'écriture dévale comme un torrent où finalement l'histoire se soustrait au style, et nous emporte sans relâche, dans un débit époustouflant, caracolant, dans l'approche psychologique de tous les possibles de la noirceur humaine.
Le lecteur, n'ayant aucune branche où s'accrocher dans cet écoulement nauséabond, hors d'haleine, échoue dans le cercle infernal « du tel est pris qui croyait prendre », anéantit, dans une sombre méditation de la part d'ombre mouvante de l'être humain.
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Dans une belle soirée de 1949, au crépuscule, quelques femmes se rassemblent pour veiller le pauvre Albert qui vient de trépasser. Ces femmes sont toutes des commères plus ou moins discrètes, Thérèse, Berthe, Rose et d'autres non mentionnées. Enfin, de veille, cela n'en a que le nom. On colle le vieillard dans une pièce, enfonce deux grands cierges de part et d'autre de sa tête, et la veillée est lancée. On ferme la porte, pille son garde-manger, sa cave… les commérages peuvent commencer. Thérèse commence à raconter son histoire, les autres y mettent leur grain de sel en racontant leurs points de vus et ainsi passe la nuit. Mais du pauvre Albert, que nenni.

Avec Un roi sans divertissement, je lis peut-être ici mon livre le plus noir de Jean Giono. A la lecture, l'on prend conscience des tourments de l'âme qui l'ont habité lors de cette récente guerre. le récit est très sombre et met en scène le triomphe de la tromperie, de la fourberie, du pillage des coeurs et de la confiance. C'est à celui qui trompera le mieux, afin d'obtenir les louanges du capitalisme régnant. le petit pauvre peut facilement devenir riche grâce à la duperie. On retrouve bien des personnages pleins de bonté, mais ils sont toujours du côté des victimes.
L'on est bien loin du Jean Giono qui m'a fait rêver dans Que ma joie demeure, ou dans un autre style : la saga du [Le] Hussard sur le toit. le récit est sombre mais j'arrive à aimer ces personnages, et je ne sais pas pourquoi. La plume de l'auteur reste toujours magique et il arrive toujours à ces fins. Un livre complexe par rapport à d'autres ouvrages de l'auteur, mais que je pense dorénavant incontournable pour bien le comprendre dans ses diverses facettes.
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Je n'avais jamais lu Jean Giono auparavant, et ce fut une découverte très plaisante, qui m'a fait me retrouver avec surprise dans un univers mélangeant Pagnol et Zola.

Les Âmes fortes c'est la chronique d'un village, Châtillon. Quoi de mieux qu'une veillée funèbre pour alors faire remonter à la surface toutes les histoires qui ont entouré la vie du défunt? Les narrateurs vont donc s'en donner à coeur joie, en racontant celle de Thérèse, Firmin et les Numance. On y rencontre des personnages aussi passionnés que passionnants, aussi tragiques que comiques et finalement terriblement humains, le tout dans véritable thriller à la sauce provençale.

J'ai beaucoup aimé le style d'écriture, les personnages uniques et passionnants, les rebondissements multiples et captivants, l'ambiance villageoise et l'univers provincial toujours agréable.
J'ai moins bien aimé la lenteur avec laquelle le récit débute.

Il s'agit bien évidement d'un ouvrage que je conseille à tous, surtout aux amateurs de personnages dévorés par la passion, car ce sont sans doutes ceux dont on se souviendra longtemps...
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Quand on pense à Giono , des réminiscences de saveurs méridionales , des odeurs de lavande , d'enivrantes descriptions provençales affleurent la mémoire du lecteur du Chant du monde .
Et pourtant , peut-on oublier l'autre Giono , l'écrivain du cri intérieur , l'homme en proie à ses doutes intérieurs , l'homme blessé par des accusations infondées concernant ses positions durant la seconde guerre mondiale, le désillusionné ?
Les âmes fortes appartient à cette période sombre d'oeuvre de l'écrivain .Les âmes fortes , les âmes mortes ? Petit indice d'emblée pour donner le ton de ce roman en écho au monde Gogolien , celui de l'absurde , et des turpitudes de l'être humain.
Il s'agit pour Giono de souligner toute la noirceur de l'humanité à travers une longue nuit , une veillée funèbre durant laquelle quelques commères de village raconteront , chacune à sa façon , la vie de Thérèse ....Mais Thérèse participe aussi ....Le temps s'est arrêté , la nuit enveloppe les âmes , les langues se délient , les récits s'entremêlent , s'enchâssent , dans des mouvements de va et vient temporels , les versions s'opposant , les contradictions chantantes , les avancées narratives se bousculant , l'une chassant l'autre , dans une débandade chronologique fantasque.
Probablement alors que l'exutoire est nécessaire pour déverser le trop plein de crassouilles tapis dans l'ombre du vernis social de cette petite société bien-pensante . Et les veillées funèbres remplissent ce rôle régulateur .
La nuit tous les chats sont gris .
Alors oui , Thérèse et Firmin vécurent ensemble dans l'errance et l'appât du gain , alors oui Monsieur et madame Numance liés par leur générosité sans limites . Thérèse aurait-elle ourdie toute cette affaire machiavélique pour plumer le couple Numance ? Ou bien Firmin serait-il l'instigateur ? le couple Numance dans sa démesure donatrice serait-t il aussi virginal qu'il y parait ?
Où se situe la vérité dans les multiples récits qu'entend cette nuit inquiétante ? Les chemins sont nombreux , kaléidoscopiques , ambigues , piégés , opaques , souvent incohérents ...Le lecteur y perdrait son latin s'il en avait . Giono enferme son lecteur dans un labyrinthe complexe et d'une opacité étouffante .
L'athmosphère est inquiétante , les incohérences destabilisantes pour le lecteur cartésien , les fantaisies Gionesques autant jubilatoires que frustrantes ....
"Par delà le bien et le mal ",voilà une oeuvre déroutante , récit façon chronique , fable amorale , où rien n'est binaire , tangible , vrai d'une vérité démontrée justifiée , où la figure Christique de Mme Numance apparait tout aussi effrayante que celle de Thérèse dans son machiavélisme presque revendiqué ,une oeuvre dérangeante avec une rare puissante narrative .
Basée sur un discours de l'oralité d'une musicalité étonnante , très rythmée , dans une technique narrative novatrice pour l'époque je suppose , libre , audacieuse . Giono s'efface et laisse ses personnages s'emparer du roman, il crée juste une percée pour laisser l'histoire devenir . Libre au lecteur de s'emparer des morceaux du puzzle et de créer , acceptant les dés pipés , et les facéties de Giono .
Quant aux âmes fortes , je vous laisse dans le plaisir de la découverte de ce roman malicieux , malin , cruel , addictif et jouissif . L'être humain aime les eaux troubles , vous devriez y trouver votre compte .
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Veillée funèbre. Ça plomberait l'ambiance s'il n'y avait pas le babillage de quatre grands-mères plus enclines aux commérages et aux médisances qu'au recueillement, le tout avec ce parler « début 20e » qui me rappelle mes propres mamies (séquence émotions). le jeu narratif est particulier: la plus ancienne, nommée Thérèse, prend le discours en main et relate sa vie, constamment interrompue par une autre qui recadre son propos, la contredit et fait apparaître un passé bien moins reluisant avant de passer à un narrateur omniscient. La vie de Thérèse se joue et se rejoue en fonction des points de vue. L'impression d'un livre décousu, comme un bla-bla de mamie, peut en refroidir certains. Moi j'ai aimé.
Lien : https://tsllangues.wordpress..
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Pas le plus facile des #Giono, mais on retrouve son talent unique à décrire les sentiments de ses personnages et le sentiment d'une époque.

Et puis cela se passe en montagne, donc je suis plus facilement conquis.
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