SMERALDINE. [...] Servir une femme amoureuse, ce n'est vraiment pas de tout repos. Elle fait mille extravagances, ma maitresse; et ce que je n'arrive pas à comprendre, c'est qu'elle est amoureuse de monsieur Silvio au point de s’étriper par amour pour lui, et pourtant elle envoie des billets à un autre. A moins qu'elle n'en veuille un pour l’été et l'autre pour l'hiver...
J'ai servi à table deux maîtres, et aucun des deux ne s'est douté qu'il y en avait un autre. Mais puisque j'ai servi pour deux, maintenant, je veux manger pour quatre.
Les femmes ont la réputation d'être infidèles, mais les infidélités, ce sont les hommes qui les commettent dès qu'ils peuvent. On parle toujours des femmes, mais des hommes, on ne dit rien. Nous autres, on nous critique, et vous autres, on vous passe tout.
PANTALON. [...] (A Clarice et à Silvio.) Qu'en dites-vous, les enfants, n'est-ce pas bien ainsi ?
SILVIO. Moi je ne désire rien d'autre que d’être à côté de ma chère fiancée.
SMERALDINE. (à part). Bien sûr, c'est la meilleure friandise.
Allons, madame ma maîtresse, qu'attendez-vous donc ? Un peu plus, un peu moins, les hommes sont tous cruels avec nous autres femmes. Ils exigent la fidélité la plus stricte, et, au moindre soupçon, ils nous persécutent, ils nous tourmentent et voudraient nous voir mourir. Cela dit, comme, un jour ou l'autre, il faudra bien que vous épousiez celui-ci ou celui-là, je vous dis, comme on le dit aux malades : puisqu'il faut prendre médecine, exécutez-vous.
Que voulez-vous ! Le malheur vous guette à tous les coins de rue. Allons, ne parlons plus de choses tristes. Vous savez ce que je vais vous dire, cher compère Brighella ? Je sais que vous vous flattez d'être un excellent cuisinier. Et bien, je voudrais que vous nous prépariez deux ou trois petits plats de votre façon.
Eccovi la mia destra, e con questa vi dono tutto il mio cuore (Silvio a Clarice, porgendole la mano)
Il servitore di due padroni, Atto Primo, Scena prima)