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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Les fillettes, elles sont « trois fillettes qui brillent comme des libellules, qui sont affranchies comme des amazones, téméraires comme des cow-boys, intuitives comme des lionnes. Libres comme les êtres qui n'ont pas encore conscience de l'espace et du temps, de la finitude des choses et de la précarité de l'existence. La supériorité des fillettes c'est d'être puissantes et de l'ignorer. »

C'est elles. Trois gamines. Justine, Laurette et Ninon. Insouciantes, rêveuses, belles, libres, puissantes. Mais qui tanguent, un pied dans l'ombre et l'autre dans la lumière, au gré de la danse tantôt joyeuse tantôt macabre de la mère, Rebecca.

Rebecca est une femme fragile et fragilisée par la vie, par une enfance sombre. Elle sombre jeune dans des addictions qui vont l'abîmer et l'écorcher à vie.
Malgré tout, avec Anton, elle veut enfanter la vie, pour la faire tenir dans la vie, pour la raccrocher à la lumière.

Ce livre est tout simplement magnifique car il est écrit à hauteur d'enfants, dans la plus belle des insouciances. La folie est traitée avec beaucoup d'onirisme et avec tendresse. Contrairement à Bord de mer ou à Fugitive parce que reine où la folie est oppressante et marécageuse, ici l'écriture est tellement empreinte de réflexions réalistes qu'elle émeut sans crier gare.

« Quatre, ce n'est pas 3 + 1 (les fillettes et leur père). Quatre, c'est 5-1 (la famille sans la mère). »

Les fillettes, ce sont de jolies roses déposées sur un champ de ruine et de barbelés. Des roses parce que dans une mère, la folie dure engendre une folie douce qui permet le soleil et l'eau nécessaires à ces roses.

Un très beau livre aux nombreuses phrases accrocheuses non dénué de lumière et de rêves.
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D'emblée, l'écrit prend aux tripes. Ces trois fillettes, ce père dévoué, cette mère si peu conforme – conforme à qui, à quoi ? le foyer n'est pas ordinaire. On y sent le malaise. L'amour aussi.

Rebecca porte ses démons ou est-ce ses démons qui la portent, elle voudrait maîtriser, croit vaincre, s'enlise et s'enferre malgré les filles, les sentiments. La vie. L'ombre écrase la lumière entre deux flamboiements – ces brefs instants où chacun vit ou revit, rit et s'enlace. Une promenade. Des crêpes. Des mots. Des parfums inoubliables fondus dans l'étreinte. Les filles espèrent. S'accrochent. Rebecca aussi. Anton se cramponne. Ils vont réussir.

D'emblée l'écrit serre le coeur. Il est vécu, on le pressent, ces mots sont trop précis, trop intimes, trop vrais. La douleur suinte. Une fracture profonde dont le cal reste instable. Clarisse Gorokhoff livre les traces.

La plume est inimitable, à la fois poétique et directe, du texte brut sans pathos. Envoûtante. Addictive. Clarisse Gorokhoff maîtrise l'art du partage d'émotions nous entraînant dans la spirale d'une chute. On en reste profondément retourné.

Magnifique.
Lien : http://aufildeslivresblogetc..
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Justine, Laurette et Ninon sont trois petites filles au caractère bien trempé et elles ont une drôle de vie, une vie merveilleuse auprès d'une maman fantasque et créative qui ne leur interdit jamais rien, raconte des histoires extraordinaires et leur fait des crêpes ; en revanche elle ne se lève pas le matin et arrive rarement à l'heure pour la sortie des classes.
Heureusement, Anton, leur papa, est là pour la gestion du quotidien, mais quand même...
Clarisse Gorokhoff évoque avec infiniment de délicatesse les thèmes de l'addiction et de l'amour maternel, l'addiction à l'alcool et aux médicaments, l'amour immense de Rebecca pour ses 3 filles et ses tentatives désespérées pour qu'il supplante ses démons.
Un court récit poétique et poignant qui ne laisse aucune équivoque sur le désastre provoqué par une addiction.


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Ce roman, c'est tout d'abord une écriture poétique, ciselée, travaillée, envoûtante… Mais c'est aussi une multitude de personnages à l'humanité débordante mais pas dégoulinante. C'est la déclaration d'amour d'une famille à sa mère désaxée. C'est un roman sur l'enfance et sur la maternité. C'est le roman d'une résilience.
Tout est d'une incroyable justesse. C'est un court texte, mais je l'ai tellement aimé que j'en ralentissais la lecture, juste pour ne pas le quitter: je n'étais pas prête. Et une fois fini, il continue encore de m'habiter. J'ai été longtemps incapable de me replonger dans un autre texte (ce qui est très gênant pour une libraire qui prépare la rentrée littéraire!).

Plusieurs voix, plusieurs visions se succèdent. Grâce à une construction extrêmement bien pensée, le roman nous emporte et nous nous attachons très vite à cette famille qu'il nous propose de découvrir.

Au centre, il y a Rebecca, une mère distraite mais sincère dans l'amour qu'elle porte à son mari et à ses filles. Elle passe à côté de sa vie, se déconnecte, et utilise le plus clair de son temps pour boire de l'alcool, consommer des bonbons contre la toux, et essayer d'écrire. Autour d'elle gravitent un père, qui en vaut 10, et trois fillettes : Ninon 1 an, Laurette 5 ans et Justine 6 ans. Chacune avec un caractère bien défini, chacune sa voix.
La majeure partie du roman se passe sur une journée. On suit alors chacun des personnages dans son quotidien et dans ses pensées. Ce qui nous frappe surtout, c'est l'amour comme pilier de cette famille d'apparence bancale. Et surtout, l'amour maternel. En effet, Rebecca, être exceptionnel aux yeux de tous, suscite autant d'amour qu'elle en donne.

L'autrice, dans son prologue, nous écrit:

« Vous allez pénétrer dans un conte noir, une histoire vraie. Il y aura trois fillettes, et il y aura leur mère. Une femme drôle, belle et poétique mais qui flanche -menacée par elle-même. Il y aura leur père, une homme sensible et fantasque, déterminé à sauver le navire. Mais qui rame. Car l'eau déborde. Heureusement, les fillettes sont des vikings. Voraces et vitales, elles n'ont pas peur et aiment follement la mer – même déchaînée. »

Il est certain que la sublime prose de Clarisse Gorokhoff saura vous transporter et vous faire aimer ces fillettes et leurs parents!
Lien : https://vouslisezquoicesoir...
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"Les humains n'ont pas inventé le bonheur mais ont créé les gélules"
Et Rebecca, malgré son parcours universitaire, hypokhâgne, khâgne, malgré son mari et ses trois gamines qui l'aiment, n'arrive pas à être heureuse, à être bien dans sa peau. Née dans un milieu médical, elle a très tôt été mal dans sa peau, et a plongé corps et âme dans les addictions. Encore enfant, Rebecca avait consulte le Vidal familial et ouvert  l'armoire à pharmacie familiale. Elle avait commencé ses mélanges....
Anton l'avait connue, et aimée alors qu'elle consommait de l'héroïne et des opiacés.... il en était tombé amoureux. Avec  elle, il  "s'était dit qu'il aurait la vitesse et l'ivresse" et  "espérait secrètement qu'enfanter pourrait réparer Rebecca"
Mais Rebecca a toujours l'esprit ailleurs,  elle ne s'occupe pas ou peu de ses gamines, vit dans son monde, et les gamines peuvent arriver à l'école encore en  pyjama.
Trois gamines, trois fillettes. Justine l'aînée va avoir dix ans. Elle est suivie par Laurette, sa cadette âgée de  cinq ans . Quant à Ninon,elle est encore au berceau. Trois gamines qui ont appris à se débrouiller seules, car Rebecca assommé par les mélanges est encore au lit quand elles se lèvent et ne sortira de sa torpeur que plus tard, quand les mouches de la nuit l'auront laissée tranquille. Elle ne voit rien, rien ne l'a bouleverse.
Seule cette mouche qui tourne autour d'elle la tracasse, la perturbe, l'empêche de s'occuper de l'éducation des gamines....une mouche qu'il faut chasser. Avec la drogue et les mélanges  !
Et pour les siens, ceux qui l'aiment malgré tout, ce n'est pas tous les jours facile. Ils aimeraient tant l'aider à laisser tomber cette addiction, trouver les mots ou les attitudes qui lui permettraient de laisser de côté  cette saloperie. Pas facile pour cet homme amoureux depuis toujours de cette femme...malgré tout ! Pas facile pour ces enfants qui n'ont que l'image de déchéance de cette maman...
On ne peut  en  sortir seul,  simplement...Non, on ne peut que plonger, plonger jusqu'au drame .
Beau roman sur l'amour,  celui d'un homme qui fait tout pour accompagner cette épouse, pour être présent auprès de ces trois fillettes...l'amour de ces trois gamines pour cette mère , malgré ses absences.
Jusqu'au drame !
Ce n'est pas le premier roman sur la drogue que je lis,  mais, c'est certainement l'un de ceux qui m'a le plus bouleversé, sans doute parce que l'enfant  est au coeur du roman, l'enfant confronté à un adulte fragile et absent , confronté aux absence de l'adulte.....
....."une enfance coupée nette"
Le manque......
Lien : https://mesbelleslectures.co..
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Comme je vous recommande le nouveau roman de Clarisse !!! Ce livre est celui que j'attendais d'elle. Elle exhorte et sublime sa douleur originelle, celle d'une mère partie trop tôt, victime de la violente beauté de la vie…

Infiniment abouti, il forme avec ses deux premiers — de la bombe et Casse-gueule — une sorte de triptyque du chaos affectif qu'elle a vécu. Avec quelle douceur s'empare-t-elle de son sujet ! Les écueils étaient pourtant nombreux, difficile de s'attaquer aux contingences du quotidien d'une mère inadaptée pour le réel. Vous ne trouverez ici aucun pathos dégoulinant, le livre est émouvant bien sûr, mais bourré de lumière. C'est le livre de la réparation.

Rebecca est tombée amoureuse un peu trop tôt de l'Héroïne et des opiacés, puis plus tard d'Anton, à qui elle a donné 3 fillettes. « Coup sur coup. Comme tout ce qu'elle fait, c'est un peu excessif. » Anton lui, s'est donné comme mission de sauver cette jeune femme aux yeux verts et aux pupilles dilatées. Il allait la rendre la plus heureuse des femmes, la plus épanouie des mères. Il avait cru, après quelques années de sevrage réussi, que la chimie était une histoire ancienne, jusqu'au jour où l'âpreté du quotidien a repris le dessus.

Personne n'osera juger cette mère. C'est tellement facile d'arrêter de se lever le matin, on trouve toujours une bonne raison de s'ôter de la vie concrète, les enfants pardonnent facilement, et les maris sont si arrangeants, tant qu'il y a cet amour dominant, enveloppant, qui efface les retards à l'école et autres défaillances. Tant qu'il y a ces après-midi bourrés de complicité à partager des crêpes au sucre.

Achetez ce livre. Vous suivrez, sur une journée entière, Justine, Laurette et Ninon partir à l'école ou à la crèche. Anton est au travail, Rebecca à la maison, face à elle-même et son journal. Vous serez, je vous l'assure, envoûté par la plume élégante et le style vibrant, explosif, de Clarisse. Rebecca voulait qu'une de ses trois filles écrive… Elle n'imaginait pas qu'elle lui écrirait ce magnifique chef d'oeuvre. Bravo.
Lien : https://agathethebook.com/20..
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Avoir foi en la vie, c'est comprendre intimement ce que l'autre vit, c'est comprendre intimement ce dont l'autre a besoin pour être en vie. Et pour être en vie et pour survivre Rebecca a besoin d'opiacés. Cependant, on ne peut pas changer le cours des choses, ni décider pour les autres alors Rebecca vit à travers les limbes et les rêves. Elle aime ses filles intensément et rend les moments les plus ennuyeux de la vie surprenants. Elle est le diamant mystérieux que les fillettes se partagent pour assurer leur pouvoir sur la vie. Justine, Laurette et Ninon sont des petites filles très vives, malicieuses et très intelligentes. Rebecca possède un goût marqué pour l'écriture, elle a une imagination débordante et sait manier les mots avec aisance comme on manie les ingrédients pour en faire des breuvages imaginaires. Rebecca a toujours eu le sens des formules. le vert paradis des fillettes ce sont des amours qui se réduisent à un seul, démesuré, gonflé pour leur mère. Une mère omniprésente malgré des absences. Elles sauront, Justine l'aînée et Laurette la cadette contenir dans la beauté le combat que se livre Rebecca contre ses démons. C'est une belle oeuvre pleine de poésie et de tendresse partagées. Ecrite avec verve et virtuosité cette histoire mère/filles nous emporte et nous touche. Les dialogues entre les petites filles aux étonnements futés ; à l'ingénuité et de plus à l'ingéniosité perspicace sont des merveilles de grâce, de désinvolture et de légèreté intelligente. Puis vient le coup de sonnette brutal, strident, métallique, ou coup de poing qui fait éclater les coeurs en mille morceaux. Dans un genre non méconnu et donc difficile, celui des récits d'enfance, Clarisse Gorokhoff confirme de façon éclatante son talent. C'est un livre marquant, vrai et sensible où l'amour inconditionnel est palpable à travers chaque ligne.
Lien : https://leschroniquesdecoco2..
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La famille Durouet pourrait ressembler à n'importe quelle autre famille. le père Anton est artisan-peintre, la mère Rebecca, « fille d'une pharmacienne et d'un chef de service en pédiatrie » aime tous les arts et plus particulièrement l'écriture et leurs trois fillettes sont d'adorables petites diablesses à l'inventivité débordante.
Mais tout n'est pas aussi simple dans cette famille parisienne car Rebecca a sombré très jeune dans l'addiction aux opiacés et ne peut plus reprendre le cours d'une vie normale. Hantée par ses démons intérieurs, elle se détache du monde réel et, « à force de vivre un peu trop fort », elle n'arrive plus à gérer un quotidien ordinaire.
Pourtant, elle est tout pour ses filles et chacune d'elle a hérité d'une part de cette mère pas comme les autres. Débrouillardes et nourries par l'imagination sans limites de leur mère, elles ont du mal à s'intégrer aux enfants de leur âge car elles ne connaissent pas « la frontière entre la folie et la norme, entre le chaos et l'ordre … entre la vie et la mort ». Pourtant, à 6 ans, 4 ans et 1 an, Justine, Laurette et Ninon, sont animées d'une grande joie de vivre, même si elles pressentent que tout ne va pas si bien dans leur famille.
L'auteure, qui raconte probablement sa vie dans ce roman, possède cette faculté de revêtir la peau de chacun de ses personnages avec une finesse et une sensibilité exceptionnelles.
Qu'elle se place dans l'esprit torturé de Rebecca cherchant des médicaments dans les pharmacies de son quartier, qu'elle raconte les péripéties de l'espiègle Justine dans les rues de Paris, ou qu'elle se fonde dans les pensées toute en sensations de la petite Ninon à la crèche, elle parvient à nous émouvoir de mille et une façons. L'empathie qu'elle fait naître chez nous est intense et on est happé par cette famille atypique et tellement attachante.
Ce très beau roman qui réveille en nous l'enfance et célèbre l'amour filial, m'a totalement enthousiasmée. Un vrai coup de coeur.
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Lire Gorokhoff, c'est entendre une musique résonner. Une musique très délicate, un air lointain qui berce, une mélodie à demi-mot comme un murmure. Puis la seconde d'après, une détonation merveilleuse. Lire Gorokhoff, c'est avancer à pas feutrés sur les frissons d'une grande symphonie. Et c'est devenir soi-même l'une de ces cordes qui vibrent de sensibilité.

« L'enfance est une atmosphère. Décor impalpable et mouvant, mélange d'odeurs et de lumières. Les silhouettes qui l'habitent sont fuyantes, et finissent par s'envoler. Sa mélodie est apaisante, la seconde d'après elle se met à grincer. Agonie à l'envers, épopée ordinaire, c'est le début de tout ; une fin en soi. L'enfance est irréparable. Voilà pourquoi, à peine advenue, nous la poussons gentiment dans les abîmes de l'oubli. Mais elle nous court après – petit chien fébrile – et nous poursuit jusqu'à la tombe. Comment peut-on en garder si peu de souvenirs quand elle s'acharne à laisser tant de traces ? »

Rebecca a trente-trois ans et dans l'âme, la fugue des étoiles

Les fillettes est un portrait comme une photo percée de lumière. La lumière, elle émane de trois filles et d'un mari. Et cette lumière, elle se heurte à l'opacité des rideaux blancs de la réalité qui se dresse devant Rebecca, incapable de délaisser les limbes protecteurs des rêves pour affronter ce monde insaisissable. Rebecca a trente-trois ans et dans l'âme, la fugue des étoiles. Elle a fait des études prestigieuses, parle plusieurs langues, est d'une élégance de satin, aimée mais surtout, prise au piège par des noeuds existentiels. de ce monde fait de salaires qui tombent à la fin du mois, de bureaux sombres mais confortables, de soirées où l'on parle de son travail, où l'on évoque ses prochaines vacances ; étouffée par toute cette société de gens normaux. Cette mécanique rassurante des choses qui broie Rebecca. Désarmée face à ce chaos qui ne cesse de la tenailler, elle dilue la substance du monde dans la chimie et se dissout ainsi toute entière dans des sphères éthérées, artificielles. Pernicieuses. Et dans ce combat infernal, elle n'aura comme alliés que la musique, la nicotine et son journal. Auxquels s'ajoutent les regards berceurs de ses trois filles et de son mari, impuissants.

D'une habilité et d'une délicatesse inouïes, Clarisse Gorokhoff dresse le portrait d'une mère par les paroles, les questionnements, les actes et l'amour de ses filles et son mari, autant que par les extraits de son journal intime. Gorokhoff – et si je ne cesse de répéter son nom, c'est pour bien que vous compreniez que c'est un nom à retenir – nous raconte l'intimité de cette famille désaxée sur une journée, pas plus. Et nous plonge dans la tête de ces cinq personnages, chacun en prise avec sa propre réalité dissonante, qui s'entrechoque avec celle de Rebecca, rongée par l'addiction. Ce qui est brillant dans ce roman, c'est la façon qu'a l'auteure de jouer avec les intensités, cette manière de faire poursuivre cinq personnages une même lumière. Une même lumière qui pourtant prend des lueurs si différentes… Chaque chapitre est une flammèche qui se jette dans le grand brasier de l'intrigue et qui fait crépiter ce personnage de Rebecca d'une ardeur quasi mystique. Car malgré toute la lumière qu'elle reçoit, Rebecca reste une éclipse.

« Mais trois fillettes peuvent-elles sauver une femme ? Avec des cris, des rires, des larmes, peut-on pulvériser les démons d'une mère ? »

S'il est une question qui colore le texte, c'est bien celle-ci : peut-on sauver une mère avec l'innocence et l'insouciance enfantines ? Pour Rebecca, la seule façon de ne pas être dans le massacre de la vie, c'est de demeurer enfant. du haut de leurs 1, 4 et 6 ans, Ninon, Laurette et Justine lui donnent l'énergie nécessaire pour espacer ses prises de drogue. Mais jamais assez cependant pour décrocher. Et distraitement, les fillettes guettent les errements de leur mère pour se blottir dans ses éclairs de lucidité. Elles savent que Rebecca peut parfois être totalement happée hors de la réalité, mais elles savent surtout qu'elle n'est pas folle. Les fous, ce sont ceux qui ne rêvent pas. Leur mère, elle, est simplement préoccupée par des rêves plus passionnants. Des rêves faits d'un liquide inflammable…

Mais ces fillettes, ce sont autant Ninon, Laurette et Justine que Rebecca ! Car une fois ses crises de folie évaporées, Rebecca retrouve les instants d'une enfance enfouie en elle. Elle retrouve un monde bienveillant et accueillant. Mais alors, peut-on calciner ses démons grâce aux flammes de l'enfance ?

« Manquer d'une mère, c'est porter en soi jusqu'à la tombe une fêlure. »

La forme du roman est très intéressante et ouvre à la perfection les perspectives et les questionnements. Gorokhoff aurait simplement pu se contenter d'alterner un chapitre sur deux ou trois entre journal et fiction ; mais à la lecture, nous aurions été pris dans une dynamique mécanique. Et justement, le propre de ce roman est d'aller se glisser au creux des singularités, d'ouvrir les libertés. Et au final, on se rend compte qu'il y a très peu de passages où Rebecca s'exprime directement. Mais chacun des extraits de son journal est d'une fulgurance ahurissante. Ainsi, avec un style extrêmement marqué et marquant, Gorokhoff creuse avec force un portrait fait de flottements. Presque le portrait d'une absente. Mais dont l'ombre jaillit de partout.

Si ce roman est aussi percutant et réussi, cela tient également de l'écriture pleine de grâce de Clarisse Gorokhoff. Au sein d'une histoire bouleversante, jamais l'auteure n'aura inséré du pathos. Jamais un mot de trop. Ce ne sont pas des silences, car autour le monde rugit, frappe, se fracasse lui-même. Son écriture est un vertige qui s'ouvre de plus en plus en nous, une coulée invisible dont on n'aperçoit que les torrents qui se déversent. Un onirisme qui résiste contre le fracas. Il y a dans l'écriture de Gorokhoff des petites touches de surréalisme, dans ces percées poétiques qui essaient de dire un réel diffus, illogique. Mais ce qui est certain, c'est qu'elle habille le chagrin de poésie d'une façon absolument exquise. Avec la pudeur de la finesse.
Lire Gorokhoff c'est tendre les mains pour récolter les larmes du ciel et les voir se transformer en perles. C'est agripper la lumière qui s'insinue dans les failles et transformer ce qui fut ébréché. Par la magie blanche des mots.
Lien : https://eterneltransitoire.w..
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Entrez ! Entrez donc dans cet appartement, à la découverte des trois fillettes : Justine, Laurette et Ninon ; accompagnées de leur père Anton, et de leur mère Rebecca, belle comme le soleil, brillante comme son intelligente, aimée par le monde mais totalement seule dans son monde.

Plusieurs regards, plusieurs voix qui se succèdent sur une journée entière, à l'école, dans la rue, dans leur appartement, au travail, dans leurs têtes, grâce a une construction du roman extrêmement novateur. Tel un papillon, l'auteure survole le quotidien de chaque personne en entrant dans leurs pensées.

L'amour maternel est le centre, le courant à suivre, le pilier, le leitmotiv de ce roman. Rebecca est l'être suprême, exceptionnel aux yeux des personnes qui l'entourent, qui l'aiment, qui l'aident a aller mieux.

Une mère qui oublie, une mère qui autorise l'école buissonnière, une mère qui ne veut pas se réveiller le matin mais une mère avec un amour énorme pour ses fillettes. Une mère qui écrit chaque jour, comme pour oublier sa dépendance, sa solitude, son envie de s'en sortir. Et là, à coté, ses trois fillettes, ultra courageuse, qui se battent, qui se défendent, qui ne comprennent pas forcément tout mais qui ont un amour inconditionnel envers leur mère.

Comme le soleil a son point culminant au milieu d'un ciel bleu, Clarisse nous éblouie avec une plume forte, élégante, remplie de sincérité. Comment ne pas être touché par cette histoire personnelle !
"Les fillettes" est ce roman incomparable, addictif du a sa construction, envoutant grâce aux sentiments qui en dégagent et tellement poétique malgré la détresse et la rudesse de l'histoire.

Un roman qui sent le vécu, qui vous prend à la gorge ! C'est en lisant tout d'abord le prologue si fort puis en refermant ce roman, quand on a ressenti l'auteure derrière l'histoire, le partage des émotions d'une vie et cette ode a une mère partie trop tôt, qu'on se dit que Clarisse Gorokhoff est une grande écrivaine !
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