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Critique de chocobogirl


Comme Sylvain Tesson ou Astrid Wendlandt, Cédric Gras est un amoureux de la Russie. Après une première immersion à Vladivostok en 2011, il nous emmène cette fois-ci dans le grand Nord Russe. Sauf que le Nord est ici une histoire de ressenti. Ne le cherchez pas en haut de la carte. Pour les russes, le Nord, c'est l'Est. L'Est et ses territoires assimilés au Nord selon une géographie toute personnelle de l'état russe et de ses habitants.

L'état, à l'époque soviétique, a mis en place une politique d'incitation à s'installer dans des territoires reculés et hostiles du territoire. Une prime était alors versé aux courageux volontaires en partance pour le Grand Nord, mais aussi vers d'autres territoires assimilés, selon des coefficients de nordicité (!) et d'inconfort. Allant du vrai nord cardinal jusqu'aux confins de la Sibérie ou aux portes de l'Altaï, ces territoires offrent une diversité incroyable que l'auteur nous invite à découvrir.

Se basant sur plusieurs voyages et séjours au long cours, Cédric Gras nous emmène dans un voyage non pas chronologique mais géographique. Écumant tout cette partie Est de la Russie assimilé au Nord sur plusieurs années, il donne à voir région par région ce paradoxe que même les habitants continuent de perpétuer, annonçant « aller dans le Nord » pour évoquer un voyage aux frontières de la Chine.
Kamtchatka, République de Touva, Iakoutie, Carélie,… : ces parties du monde dont peu se soucient sont pourtant aujourd'hui un enjeu majeur de géopolitique. En 20 ans, la population est passée de 8 à 6 millions d'habitants et l'exode se poursuit encore, tant les conditions de vie sont difficiles. Ce sont des zones désertiques de steppes, de montagnes peuplés de multiples groupes ethniques. Territoires abandonnés, villages désertés où la nature se fait rude mais où l'âme russe se trouve sans fard, même si parfois elle se perd dans les vapeurs de vodka.
Rien n'échappe aux pas de notre géographe infatigable et d'une curiosité érudite qu'il partage avec beaucoup de modestie.
Cédric Gras nous conte une Russie, exempt de clichés. Il s'attache à la décrire telle qu'elle est, avec ses qualités et ses défauts et sa tendresse sans équivoque pour les russes, n'empêche pas un regard parfois négatif sur le pays.

Il convie dans ces pages les fantômes de Ossendowski, nous emmène sur les traces de Dersou Ouzoula, évoque son ami Sylvain Tesson qui l'accompagna un temps. Surtout, il nous rappelle, à travers la perdurance forcée d'un mode de vie chiche et sans superficialité que la richesse est surtout humaine, faite d'attentions et de solidarité entre les êtres.

L'émotion ne manque pas dans ces récits rugueux où on visualise sans problème les rides profondes qui creusent les visages, les plaies béantes qui saccagent la terre russe ou les cicatrices des âmes.
Qu'importe, acceptons d'être déboussolé, de plonger dans un Nord qui ne l'est pas et de s'imposer la découverte de terres hostiles. Peut-être y trouverez-vous, comme l'auteur, des raisons de continuer à avancer.
Lien : http://grenieralivres.fr/201..
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