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sur 141 notes

Critiques filtrées sur 2 étoiles  
LaBanque est un espace culturel qui accueille des expositions d'art moderne et dont on sort toujours un peu dubitatif quant aux oeuvres vues, tant le lieu, fascinant, est ce qui attire le regard, de la salle des coffres jusqu'aux appartements du directeur. Je n'ai pas vu la première expo qui y fut montée, judicieusement dédiée à Georges Bataille, l'auteur de « La part maudite » qui rêvait d'une dépense pure, improductive et d'une consumation de soi. Or Haenel, qui y participa, apprend à cette occasion l'existence d'un homonyme de l'écrivain qui fut justement trésorier à la Banque de France de Béthune.
Comment ne pas gamberger sur une telle coïncidence ?
C'est donc pleine d'allant que j'ai ouvert ce roman que je referme avec le sentiment d'avoir trouvé mon livre-étalon, celui qui contient absolument tout ce que je déteste en littérature. C'est pourquoi je ne l'ai pas gratifié de la simple étoile qui signale la daube - c'était une épiphanie.
Je ne sais plus quel formaliste russe affirmait que la littérature commence quand on écrit non que l'héroïne est distraite mais qu'elle met son gant gauche à sa main droite, quand il s'agit pour l'auteur moins d'affirmer que de laisser une place au lecteur. Haenel, au contraire, s'enferme dans un face-à-face avec son personnage et nous explique ce qu'il pense, ce qu'il écrit, fait le texte et l'analyse du texte, parce que, bien sûr, le banquier Georges Bataille n'est pas différent du philosophe Georges Bataille, et vas-y que je te tartine sur le système de la dépense entre accumulation mortifère et gaspillage fécond.
Ah, parce que ça oui, ça tartine. L'art comme plus court chemin entre l'idée et sa manifestation n'est pas l'objectif de Haenel qui est plutôt dans l'optique de rendre la meilleure dissertation possible. Comme l'argumentation n'est pas son fort, il répète en se disant que la répétition vaut démonstration. Donc Haenel explique comment l'exposition sur Bataille l'a inspiré (théorie de la dépense, première). Puis Bataille le personnage explique à son meilleur ami qu'il va s'orienter en économie (théorie de la dépense, deuxième). Puis il fait un exposé dans son école de commerce (théorie de la dépense, troisième). Puis il rencontre son supérieur à qui il ouvre son coeur (théorie de la dépense, quatrième). […] Puis il écrit ce qu'il pense de la dépense (théorie de la dépense, dix-septième). […] Puis il récapitule ce qu'il a écrit in petto en se demandant ce qui a bien pu effrayer sa copine qui a lu ses carnets (théorie de la dépense, vingt-deuxième). Puis… Évidemment, seule la formulation change, Bataille a presque tout compris dès le départ. À la fin, il il découvre que le don le plus gratuit consiste à aimer et que c'est super d'être amoureux. On est d'accord.
Parce que si le roman se contentait d'être une dissertation sur Bataille, ce ne serait pas le pire. Mais Haenel poétise et là encore, comment dire?, ça clichetonne vraiment à tout va. C'est un festival d'images précieuses avec des « feux », des « rosées du matin » et des « filigranes sacrés ». Mais ça ne veut rien dire. Tiens, ça, par exemple: « On dit que ceux qui ont vu les Mystères d'Éleusis rient et pleurent comme avant d'avoir été initiés, mais qu'à travers leurs rires et leurs larmes une autre lumière brille, aussi discrète que cette teinte rose qui colore les ailes des tourterelles ; et cette lumière change tout. » La superposition des images, ça fait riche, mais ça ne parvient pas à masquer la platitude de l'idée.
Et enfin, le pire: la belle histoire du banquier anarchiste qui découvre la charité se heurte à une idéologie bien rance. Bataille, qui découvre le surendettement, décide d'aider un couple acculé par les dettes (tiens, le cliché ça me gagne). Évidemment, ils sont incapables de s'exprimer «  ouvrant simplement la bouche pour se nourrir de chips et de barres chocolatées dont les emballages vides débordaient des poches de l'homme. » Et, deux lignes plus loin: « Massif, les cheveux longs et filasse, une longue barbe négligée, tout enfoui dans sa parka qu'il n'avait pas déboutonnée, il n'ouvrit pas la bouche, sauf pour grommeler, lorsque Bataille lui demanda son nom, que tout le monde l'appelait le Polonais. » On notera que si le pauvre ne sait pas qu'il faut toujours déboutonner le bas de sa parka, Haenel semble ignorer qu'on appelle rarement quelqu'un « le Polonais » à Béthune (ou alors il faudrait ajouter un numéro). Mais Bataille n'aide pas n'importe qui (ah ben non): « […] en étudiant le dossier de chaque endetté, il évaluait son degré d'honnêteté: il était capable de distinguer ceux qui dilapidaient et ceux qui survivaient. Il y a deux sortes de ruines, dit-il, celle qui vient du vice et celle qui vient du malheur. » Notre trésorier-payeur écarte donc ceux qui auraient acheté un écran plat avec l'allocation-rentrée et laisse à la disposition des pauvres vertueux la jouissance de sa buanderie [sic] pendant qu'il vit seul dans une immense maison acquise pour pas cher parce que bosser à la Banque de France donne de menus avantages « à commencer par un taux dont il serait aisé de fixer le pourcentage d'une manière attractive ». Et il a bien fait, Bataille, de se laisser aller à la charité, parce que le Polonais et sa dame sont bien reconnaissants: « Ils semblaient ne pas y croire, et traversaient le parc en se faisant tout petits. Corinne Walski ne cessait de remercier Bataille ; quant à son mari, il avançait silencieusement, chargé de gros sacs en plastique, la tête baissée, voûté, recroquevillé à l'intérieur de sa parka, comme s'il voulait s'effacer.  » On se croirait dans la scène des Comices chez Flaubert: « Ainsi se tenait, devant ces bourgeois épanouis ce demi-siècle de servitude. »
Ça me met vraiment en rogne, ce pseudo-roman sur la dépense et le don, la générosité et l'ouverture aux autres, qui ne parle jamais que d'un bourgeois s'achètant une bonne conscience à bas prix ( à l'image de son meilleur ami brocanteur qui achète des armoires du XVI° en mentant à leurs propriétaires sur leur valeur véritable): à la fin du roman, le héros possède thunes et amour et se prend pour un rebelle parce qu'il loge quelques malheureux dans sa buanderie et gamahuche madame à l'arrière de sa Mercedes. Et c'est cette charité cul serré qui est censée nous parler de l'extase du don!
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Un grand merci à l'équipe de Babelio et aux éditions Folio Gallimard pour l'envoi de ce roman très littéraire lors de la dernière opération Masse critique.
Au vu des critiques , j'étais impatiente de le lire et je pensais qu'il me plairait car il aborde des univers que je connais bien (l'art contemporain, la banque de France), mais cela n'a pas été le cas.
Malgré quelques beaux passages, j'ai surtout trouvé qu'il y avait des longueurs et je lisais un chapitre après l'autre sans avoir envie de les enchaîner. Malgré les incises qu'il glissait tout au long du texte (qui m'ont d'ailleurs paru un peu inutiles et artificielles), j'ai eu du mal à voir où l'auteur voulait en venir et je me suis sentie un peu perdue dans ce roman foisonnant, qui aborde des thèmes aussi variés que l'économie, l'art contemporain, la finance, la charité, la religion, l'érotisme, la philosophie, etc. Il y avait cependant parfois au détour d'un développement un peu longuet une idée lumineuse ou une phrase magnifiquement écrite qui me donnait envie d'aller plus loin, mais le roman dans son ensemble me laisse relativement perplexe, et je me rends compte en le refermant que je n'ai pas mis de traits sur le visage du personnage principal, ce fameux Trésorier Payeur du nom de Georges Bataille, ce qui me semble assez significatif du fait que je ne suis pas entrée dans l'histoire. Dommage car je ne doute pas que ce roman pourra plaire à des lecteurs qui en attendaient autre chose que moi et qui ont peut-être un esprit moins cartésien.

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Tout ça pour ça…
Ce livre m'est littéralement tombé des mains, par sa pesanteur, par son absence de souffle, par son absence de vie…
Bref j'ai déclaré forfait après une centaine de pages, comme un pensum maniéré, tout le contraire des grands romans.
Au suivant…
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Un banquier philosophe, anarchiste, proche des idées communistes, cela peut paraître incongru, donc une histoire qui donne envie d'être découverte. Problème c'est bien trop long, souvent ennuyeux, il n'y a pas vraiment d'histoire et on a du mal à savoir où l'auteur veut en venir. Je ne dois pas avoir la culture adéquate pour apprécier ce genre de conte destiné à un public érudit ! Bref je suis passé à côté.
En plus HY commence par nous expliquer comment lui est venu l'idée d'écrire ce livre, encore une fois pourquoi pas mais c'est tout aussi long et ennuyeux et sans véritable intérêt en tout cas pour moi alors autant commencer directement à la page 64 !
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