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Critique de Babbu2A


Il est des livres qui vous marquent un peu plus que d'autres. Sans être un chef d'oeuvre, celui-ci en fait partie.

Mais avant de vous dire ce que j'ai retenu de ce roman, un mot sur l'histoire et les personnages.

"Un bon jour pour mourir", c'est l'histoire d'un road-trip à travers l'Amérique des années soixante, au cours duquel un féru de pêche dépressif accro aux somnifères et au whisky -le narrateur-, un ancien vétéran du Vietnam impulsif qui carbure aux amphétamines et une belle blonde, un peu perdue, aux courbes pulpeuses et aux jambes interminables, décident lors d'une beuverie de faire sauter un barrage du Grand Canyon. Ainsi l'étrange équipée sauvage, unis par cette mission folle, absurde et dérisoire, balance au fil du récit entre euphorie chimique et déprime corsée avant de se terminer fatalement en une sévère gueule de bois !
Mais ne nous trompons pas, cette mission et ce voyage ne sont en fait qu'un prétexte, qui permet à Jim Harrisson de traiter, notamment travers ses 3 personnages sans repères et désenchantés, les thèmes du mal-être et de la fuite en avant d'une génération.

Alors, pourquoi ai-je apprécié ce livre ?

D'abord, c'est le livre c'est le reflet d'une époque avec des personnages et une histoire qui pointent du doigts les questionnements du moment et les spécificités de la société (Guerre du Vietnam, libération sexuelle, consumérisme, découverte des drogues, prise de drogue, refus du travail régulier, refus de la famille…). Ainsi, les voyages, l'exploration de religions orientales ou les paradis artificiels étaient autant de manières de refuser la société établie.
Bref, à travers ces 224 pages de cuites, de sexe, de drogue et de dynamite, mais aussi de vitesse, de découverte de nouveaux horizons et d'évocation des peuples opprimés (les indiens !), j'ai apprécié pouvoir me plonger dans ce concentré des années 60.

Ensuite, il y a un une écriture formidable qui rappelle que Jim Harrisson est un grand écrivain. A l'image des 3 personnages du livre noyés par les vapeurs d'alcool, le brouillard de la drogue et la fatigue, le style se révèle parfois, fiévreux, haché, tonique et à d'autres moments décousu, à la limite de l'incohérence. Mais dans tous les cas, l'écriture colle à l'état dans lesquels les personnages du roman apparaissent : ivres, défoncés, lunaires ou ensuqués.

Notons également le ton (désabusé pour ne pas dire pessimiste, mais non dénoué d'humour) qui s'inscrit dans le courant d'une partie des écrivains de cette époque : Henry Miller, Charles Bukowski, John Fante ou Jack Kerouac. Si vous les aimez, vous apprécierez Jim Harrisson.

Il y a tout de même un bémol, c'est le sort réservé aux femmes qui dans ce roman ne sortent pas vraiment grandies. Incarnée par Sylvia, l'un des trois protagonistes de l'oeuvre, les femmes apparaissent telles des objets sexuels plutôt décérébrées. Je ne crois pas qu'il y avait là une volonté délibérée de rabaisser les femmes, mais sans doute le reflet d'une société fortement patriarcale et misogyne.

Mais en définitive, ce que je retiens avant tout, à travers ce livre mais aussi à travers son oeuvre, c'est, au-delà du ton savoureux et d'un style marqué, cette capacité à restituer, y compris dans les petits détails, les marqueurs forts d'une époque. C'est ce qui en fait pour moi un grand écrivain.
Bref, laissez-vous enivrer par ce roman stupéfiant !
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