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Citations sur Deux mètres dix (24)

- Tu va les plier menu, Sue, la Russkof, la Bulgarof. Depuis le temps !
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Les portes s’ouvrirent. Le visage de Leonid Brejnev apparut au premier rang d’un groupe compact de dignitaires, accompagnés en retrait de leurs épouses.Il marqua un temps d’arrêt pour porter un regard lointain sur les gens et s’avança dans la salle. Tous calquaient leurs pas sur la lente démarche d’automate du président qui n’en finissait pas d’approcher. [•••]
Quel visage ! Lorsque ce fut son tour d’approcher le président suprême, Tatiana ne put retenir une hésitation, saisie par la rigidité de ses traits bouffis, violacés, malgré un épais poudrage, presque gênée par la maladresse de son embrassade. Les yeux humides, les sourcils touffus comme noircis au charbon, il ne disait rien, se contentait de dévisager chaque champion d’un interminable regard qui se voulait certainement socialiste, attentif, paternel et d’une durée égale pour tous. C’est son épouse, Viktoria Petrovna Brejneva qui prononçait des compliments. Elle posait des questions à la bonne franquette, puis le Secrétaire général , Alexis Kossyguine, épinglait les médailles de l’Ordre de Lénine.
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- La punition, c'était la fin des privilèges. Chez les communistes, rien ne comptait plus que les privilèges. Une existence sans files d'attente devant les boutiques, sans avoir à partager son appartement avec une famille, à l'aide de rideaux. La Lada, les permis de voyage. On m'a repris mon appartement sur Leningradsky Prospekt. Je suis revenue ici.
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« Si je comprends bien, à Helsinki, nous étions toutes les deux chargée comme de jolies mules. »
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Chère Susan,
Je m’appelle Tatyana Alymkul, mais tu m’as connue sous mon nom russe, Tatyana Izvitkaya. Peut-être te souviens-tu, nous nous sommes rencontrées à Helsinki en 1982. Un journaliste français est venu la semaine dernière pour me poser un tas de questions. Il voulait tout savoir sur cette époque. C’est lui qui m’a rappelé ce concours d’Helsinki. Il y avait assisté, et m’a demandé une foule insensée de détails, il s’imaginait que j’y pensais chaque matin. J’espère que tu n’en gardes pas un mauvais souvenir et que cette lettre ne réveille pas des sentiments désagréables. Nous avons donc parlé de la dernière barre, de l’orage et de toi, beaucoup de toi, bien sûr. Ce journaliste m’a parlé des soucis et des difficultés que tu affrontes depuis quelques années. J’ai abandonné le monde de l’athlétisme depuis longtemps, je suis retournée chez moi, au Kirghizistan. C’est un petit pays inconnu. Je vis dans une maison en bois peinte en bleu. Dans la rue, d’autres maisons sont rouges ou vertes.
Elle se trouve dans un village en montagne. Il fait très froid l’hiver, le blanc s’accorde au paysage. L’été, les journées sont chaudes, et en cette saison les arbres se parent de belles couleurs. Une rivière coule dans le village. Nous aimons cette rivière. Il y a un lac plus haut, on s’y baigne en été. Partout autour, des dizaines de milliers de chevaux et de moutons. Les chevaux sont de bonne compagnie en période chahutée, nos moutons aussi, crois-moi. La montagne te voudrait du bien. Une chambre t’attend. Elle est meublée de tapis de chez nous et de jolies étoffes. Elle donne sur un jardin. Il est en fouillis car je jardine mal. Les fleurs se disputent tant elles s’y plaisent. Ça me ferait plaisir que tu viennes, le temps que tu veux. On se promènera, on parlera seulement de ce que tu veux…
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Incipit
Un mobile home
Depuis un moment les merles ne chantaient plus, ils babillaient à peine et Sue le percevait. La chaleur dans le mobile home confirmait une matinée bien avancée.
Le drap dont elle avait recouvert sa tête ne pouvait plus duper son esprit embrumé. Elle finit par céder à une fatalité qu’elle savait impitoyable et ne repoussa pas
davantage l’attaque de la migraine que provoquerait son premier geste.
Sue se redressa d’un coup pour s’asseoir au bord du lit. Remarquant l’absence de culotte, elle fit la moue, tâtonna du bout des doigts entre ses jambes afin de vérifier si en plus elle n’avait pas couché. Elle tendit ses longues jambes bronzées, s’amusa à faire saillir ses muscles en rapides contractions. Sans fierté, seulement ravie, elle les contempla une nouvelle fois. Mes îlots de beauté qui résisteront à tout, pensa-t‑elle. Du bout du pied, elle ramena une jupe et un tee-shirt qui traînaient par terre. Les merles savouraient les derniers recoins d’ombre dans les branches des séquoias, avant qu’elle ne soit absorbée par le soleil qui frappait d’en haut. Ils s’avancèrent sur une branche, les mâles en plastron noir, les dames en chemisier roux, foulard blanc, et saluèrent d’un trille flûté. Merci, merci, les amis. Éblouie par la lumière, les mains serrant une tasse de café, Sue se posa en haut du marchepied et observa dans l’herbe les bouteilles et les mégots éparpillés. Encore une lame de fond d’ivresse qui l’avait échouée en vrac, sans nausée. Ça la paniqua presque. Elle fut tentée de se glisser deux doigts dans la gorge. Elle eût souhaité vomir son dégoût contre un arbre, même sous le regard des passants, comme ça lui était déjà arrivé, ou hoqueter sa bile, vider la saleté au bord de sa cuvette, pleurnicher de fureur.
Au loin, en bordure d’une prairie, une file de silhouettes se dirigeait vers l’entrée de l’Old Coyote Park. Un chien vint par-derrière fourailler de son museau les mains de Sue jusqu’à les ouvrir.
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Il tourne autour de la fonte, la pointe du doigt, dialogue avec elle. Il lui raconte une histoire. Il se frappe huit fois les épaules, s’immobilise et se saisit de la barre : main droite, main gauche. La fonte s’élève. Les jambes plient, le bassin va chercher au niveau des talons une force d’inertie, les poignets tournent la barre à hauteur des clavicules ; Chabdan la bloque. Il se relève au ralenti, ses pieds se mettent à bouger sans qu’on sache s’ils cherchent une meilleure position ou s’ils jouent à provoquer le suspens ; il savoure le mouvement qui dans un instant va lui arracher une terrible brûlure, il propulse la barre en l’air d’un geste inouï et, sans vaciller, la maintient à bout de bras, visage rayonnant d’un sourire intérieur. On croît qu’il va faire un tour sur lui-même. Il la pose à ses pieds, la regarde immobile.
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Ceux qui pensent que la frustration abîme l'amour sous-estiment la formidable faculté de l'amour à s'adapter aux situations qui en valent la peine.
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- Une question m’a toujours intriguée : pourquoi diable tu as refusé la barre à 2,04 mètres ?
– Chez nous, les Coréens, le chiffre 4 porte malheur. Mais les nougats gluants portent bonheur.
– C’était ça ?
– Oui. Toi, ton gri-gri, pour sauter si haut ? Tu passais à la cheville un bracelet en peau de serpent à sonnette de ton désert ?
– Moi, je portais la même petite culotte que le jour où je suis devenue championne des États-Unis.
– Ah ! Difficile de lutter contre ça !
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-Vous en faites des tronches, lança Sue. Accident ?
-Tu parles d'un accident ! Les États-Unis boycottent les jeux de Moscou.
-Quel boycott ? Ça veut dire quoi ?
-On n'y va pas ?
- On reste à la maison, Sue, répondit un athlète. Plus besoin de te vider les tripes à l'entraînement. Tu respires un grand coup, tu fermes les yeux et tu laisses filer ton rêve. Battue sans concourir, tu peux imaginer ? La faute à cette foutue guerre en Afghanistan dont on se contrefout. Carter vient de le confirmer. Être patriote, il a dit. J'ai mal pour toi, chérie.
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