C'est à une psychanalyse sans foi ni loi que nous livre
Bernard Herzog. Ça fait du bien, même si d'être sans foi ni loi, contre une psychanalyse universitaire soporifique, entraîne aussi le défaut d'être caricatural. Je crains le langage New Age. Dans ce livre, nous circulons sur une ligne de faille qui provoquera des relents de gerbe, sans toutefois aller jusqu'au bout du dégobillage. Il faut accepter de plonger en pleine symbolique alchimique, même si ça nous donne l'impression d'assister à une redite bouffonne de Woodstock.
Hypothèse de base : importance de l'embryogénèse psychique du sujet et de la construction d'un édifice en accord avec la vision de l'architecte (LOL).
Le projet peut être foutu en l'air dès les fondations, si on refuse l'idée que le couple parental soit assimilable à un creuset alchimique. Vous savez, ça fait un peu penser à tous ces connards qui parlent de la sexualité comme d'une spiritualité et d'une union avec l'absolu. C'est déjà pas mal de baiser en s'unissant avec son partenaire non ? Pourquoi vouloir atteindre l'absolu et l'harmonie des sphères ou je sais pas trop quoi ? On retourne finalement à l'idée d'une morale sous-jacente, même s'il s'agit d'une morale libérée, qu'ils disent.
S'en référant au YIN/YANG, à la Lune/Soleil ou encore à l'Anima/Animus, Bernard envisage tout déséquilibre à ce niveau comme responsable de lourdes pathologies. Etrangement, le déséquilibre négatif est toujours associé à la présence d'une mère dominante, écrasante, le discours donnant parfois l'impression que la fonction de la mère est de s'effacer pour permettre au père d'assurer sa fonction d'ouverture, et donc à l'enfant de trouver sa fonction d'individu mature. On aurait également pu souligner la défection des pères trop lâches, ou simplement arrêter de mettre fin à une querelle liée aux figures parentales car plus personne ne vit comme au Moyen Age, dans un foyer coupé de tout contact avec la réalité.
Anyway, si l'explication plaît à certains, ça peut être utile. Faut avouer qu'elle est percutante.
« le premier stade de l'embryogénèse psychique est inclus dans l'utérus, c'est-à-dire dans la caverne ou le labyrinthe, où nous sommes tous enchaînés selon le mythe de
Platon, car cette aventure est vécue de façon passive, sans grand degré de liberté.
Les chaînes sont le fruit vénéneux d'un lien affectif persistant à la Mère. Elles résultent d'une union imparfaite entre les parents et d'une identification trop prégnante au seul territoire matrilinéaire. »
Bernard observe que le point commun entre toutes les personnes malades du sida et du cancer c'est d'avoir connu une absence symbolique du père, souvent associée à une mère immature. le masculin étant associé, dans la psyché, à la défense du territoire, à la verticalisation et aux résistances immunitaires, cette explication semble expliquer qu'un tel déficit ait des conséquences foireuses pour la construction du sujet. La maladie permet alors un exutoire à court terme pour balancer les miasmes inconscients et toute la négativité du sujet. Bernard relate de nombreux cas où il intervient par la mythanalyse (analyse mythique des rêves) pour aider le malade à prendre conscience des origines de sa négativité et à positiver l'épreuve.
« Les songes constituent le viatique spirituel qui permet de s'alimenter au cours du voyage initiatique. Ils constituent la mane céleste qui permettait aux esclaves de Pharaon de pouvoir trouver l'énergie suffisante pour quitter les rives d'une terre de souffrance et d'immaturité vers le sol promis. »
Le médecin devrait donc retrouver sa mission sacrée et permettre au malade d'être initié à son chemin d'intériorité. Si la maladie a un sens, il s'agit de le retrouver. Au-delà de ses défauts (qui ne sont peut-être que la traduction ou l'imitation parodique de la falsification mythique de notre modernité), la lecture de ce livre n'est pas négligeable.