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3,79

sur 390 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Ce roman est en fait une autobiographie à peine romancée de la jeunesse de Violaine Huisman et de sa soeur, filles de Catherine et Antoine. Leurs parents sont, pour le père, un homme mondain, philosophe et écrivain, d'origine juive (« un peu juif »dit-elle») évoluant dans un milieu grand-bourgeois, à la fois hautain et coincé quand il s'agit de la grand-mère . Pour faire bonne mesure, leur père, Antoine, a vu une vague de suicides dans sa proche famille et lui-même se comporte de façon passablement a-normale, entre carriérisme et plaisirs sexuels de tous ordres.

Quant à Catherine, une femme dite « roturière », danseuse, chorégraphe, élégante, gracile, malgré une déformation de la jambe et surtout excentrique, fantasque, névrosée, il faut dire qu'elle a de quoi être perturbée : fille d'une mère danseuse classique qui l'a délaissée des années durant en la « déposant » à l'hôpital Necker, une mère elle-même victime d'un viol. Pas mieux pour ce qui est du père abuseur et absent.
Sevrée d'amour maternel, s'étant jurée de ne jamais traiter ses filles avec indifférence, elle pratique l'amour exacerbé, les excès de langage sur tout le registre émotionnel, entre déclarations passionnées à ses filles et insultes, voire gifles retentissantes. Si, comme on dit, tout se joue avant l'âge de cinq ans, elle et ses filles partent dans la vie avec un sacré handicap !

Il faut dire que le milieu prétendu « libéré » dont elle fait partie par mariage ne risque de structurer ni sa vie ni celle de ses filles : amants, amantes, échangisme, dépenses à profusion, consommation de drogues, de médicaments et d'alcool, absence totale de frein à sa prétendue créativité (dont on ne voit guère la trace, si ce n'est la création de quelques écoles de danse éphémères), Catherine fait peine à voir vivre tant elle est éparpillée, inconstante, idéaliste, carrément égoïste ou superbement généreuse, une flamme qui s'agite en tous sens et brûle les fondements de la jeunesse de ses filles. Ses séjours en HP ne vont pas la guérir de cette maladie qui tombe comme une avalanche sur la tête de deux toutes petites filles, d'une « phrase qui tue l'enfance » : elle est maniaco-dépressive.

On peut la trouver attachante, si pleine de vie, si tendre, si...tout ce qu'on voudra ! En fait, elle est surtout « trop », trop tout ! On ne sait pas comment ses maris et amants ont pu vivre en continu avec elle (sauf s'ils étaient un peu borderline eux aussi, ce qui fut souvent le cas) mais on compatit à la douleur des deux enfants, devenues mères de leur mère, chargées, à dix ans, de la réanimer, d'appeler les pompiers, entre drogues diverses, vomi, alcool et échos de luxure. Comment se construire après tout cela ?

Pourtant, ce livre est une ode à l'amour mère-fille, un chant vibrant d'émotion, une déclaration haute et forte que la mère, tout imparfaite qu'elle soit reste l'amour de leur de leur enfance, de leur jeunesse, de leur vie de femme. Compréhensible ? Peut-être. Touchant, sans aucun doute.

Le récit s'articule intelligemment entre d'abord, le récit de la fille cadette, avec ses analyses et son ressenti et ensuite, celui d'une narratrice qui restitue la vie de Catherine vue de son point de vue. Les deux parcours se croisent et précisent les faits.

L'écriture de ce roman qui n'en est pas un est précise, sans émotions superflues, à l'image des exigences de Catherine : « Tu veux que je t'en colle une pour que tu saches pourquoi tu pleures? Maman exagérait, maman abusait franchement, sa mauvaise foi dépassait les limites de l'entendement : elle-même pleurait à tout bout de champ[...]quand la saison des larmes arrivait c'était la mousson, Isis faisant déborder le Nil. »

Ce livre pose, une fois de plus, la question des rapports enfant-parent et surtout mère-fille, relation passionnée, fusionnelle, excessive, démesurée, qui condamne tout, qui pardonne tout, qui nous revient en effet-miroir et nous impose de nous positionner dans la chaîne de la filiation.

« Catherine ne pouvait être pour moi qu'une idée, une notion abstraite, au mieux une inconnue. […] A mes yeux, Catherine ne serait jamais qu'un personnage ? Aussi je lui attribuais mon fantasme de ce qu'avaient pu être son histoire, ses pensées, ses choix. Certes, sa vie elle me l'avait raconté par le menu, mais pour l'incarner il fallait l'imaginer, l'interpréter. Il fallait que j'en devienne la narratrice à mon tour pour lui rendre son humanité. »

Pour chacun, chacune d'entre nous, il est impossible de restituer la vie de nos mères, de nos pères, à moins peut-être de faire comme Violaine Huisman : tenter de se convertir en narrateur de leur vie, avec les éléments dont on dispose. Au risque de les trahir, au risque de se faire un peu mal, peut-être, mais avec l'espoir, sans cesse renouvelé, de les ramener un peu à la vie.

Un premier roman attachant, troublant, dérangeant aussi.
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Portait sublime, bien que déchirant, d'une femme et d'une mère aux abois, Fugitive parce que reine est un roman qui remue, qui émeut forcément et qui dérange parfois.
Au coeur du texte, Catherine à l'enfance brisée et surtout sa bipolarité dont rien ne nous est épargné ; certainement ni les larmes ni les frasques. Sa vie est une succession de malheurs et de choix douteux.
Parce que coutumière, la souffrance est rassurante, attrayante presque...

Mais c'est aussi Catherine mère envers et contre tout, malgré sa maladie et contre sa propre mère avant tout. Puisque c'est un fait, les mères de ce texte sont des mères terribles, sans concession dans leurs excès.
Racontée par l'une de ses filles, Catherine n'est cependant pas du tout une femme sans amour. Au contraire ses amours sont toujours fulgurantes voire dévastatrices souvent. Que ce soit l'amour pour les hommes et les femmes qui ont partagé sa vie, ou pour ses filles qui toute l'enfance portent le poids de devoir maintenir une mère en vie.

C'est un livre vertigineux qui donne à voir et à entendre une femme presque condamnée par avance, ses bonheurs fulgurants mais surtout un désespoir latent qui ne laisse aucune chance.
Et pourtant tout n'est pas noir ici et la folie de la mère ne condamne pas sa descendance. Au contraire c'est une magnifique déclaration d'amour d'une fille à une mère flamboyante.
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Et si nous dressions le portrait d'une mère devenue reine dans le coeur de ses deux filles ?

Catherine, cette mère magistralement imparfaite, excessive, excentrique, extravagante, a tissé une relation exclusive avec ses deux filles.

Dans la première partie du roman, Violaine, la cadette et narratrice, nous raconte sa mère, à la fois rayonnante et défaillante. Maniaco-dépressive, rongée par l'alcool et les excès, elle ne semble pas créer un environnement sécurisant afin que ses filles puissent toutes les deux s'épanouir. Et pourtant, un amour inconditionnel les lie toutes les trois que rien ne semble pouvoir altérer.

La seconde partie m'a particulièrement touchée. La narratrice cherche à comprendre l'histoire de vie de Catherine. Au fil des pages, nous apprenons de mieux en mieux à la découvrir en parcourant avec elle son enfance et ses failles. Cette description humanise cette mère qui apparaît, tout d'abord, nocive pour ses enfants. Son terrible parcours de vie permet de bien mieux comprendre ses rapports avec ses filles.

Ce premier roman, nous livre des portraits touchants dépeints avec une plume à vif.

J'ai aimé cet bel ode à l'amour maternel mais surtout l'omniprésente du poids des générations successives dans les rapports filiaux.

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J'ai acheté ce livre à contre coeur. Trop de publicité, trop de tapage autour de cette jeune femme dont on vantait le talent avec une insistance suspecte. J'y voyais quelque chose de louche, de parachuté. Et puis franchement, un premier roman qui parle d'une mère un peu folle : on a l'impression d'avoir lu ça deux cents fois. Et pourtant, je fus emporté, littéralement transporté par ce récit, par la profondeur des émotions que l'auteur parvient à communiquer avec sincérité mais aussi, avec beaucoup de pudeur. Un premier roman réussi. On attend le second, sur une thématique moins intime ?
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Violaine Huisman nous emmène à la rencontre de sa mère comme on entre dans une mer houleuse. Une mer agitée qui nous rend compte de ce qu'a vécu cette mère. Une mer que l'on souhaite apprivoiser, une mère que l'on souhaite aimer et protéger. Résister et essayer tant bien que mal d'y nager. Faire de son mieux pour rendre cet amour puissant qu'elle transmet.

Car, dans tout ce tourbillon de vie qui pourrait s'apparenter à de la débauche mêlée à de la folie, se trouve énormément d'amour. Un amour d'une grande puissance qui va d'un extrême à l'autre. Un amour tantôt piquant tantôt protecteur. Un amour maternel, un amour enfantin, une sororité inattendue…

Je n'y ai pas rencontrer une femme folle, non saine d'esprit, mais, au contraire, une femme forte, torturée, physiquement et moralement, par la vie. Une femme comme prise dans le piège de la vie, prise dans cette effervescence de possibilités d'existences, perdue entre le calme et la tempête… Mais, une femme qui souhaite s'en sortir…

Et, c'est pourquoi, la plume de l'autrice est d'une efficacité pure et dure. Elle ne pèse pas les mots et écrit les choses telles qu'elle les dirait ou penserait. Elle part ainsi à la recherche de Catherine, non pas la mère, telle qu'elle la connue et apprivoisée, mais la femme, celle qui lui avait été jusque-là inaccessible.

On retrouve ainsi, dans ce livre, le fait d'écrire et de se remémorer rétrospectivement des événements passés de notre vie. de se demander si telle ou telle chose était « normale », d'interroger tel ou tel événement et ses impacts. de sortir de cette bulle, de cet environnement compact qui ne nous faisait voir autre chose que la situation dans laquelle on vivait à cet instant-là.

De la douceur, de la force, de l'inattendu et de l'inexplicable. C'est une lecture qui m'a marquée, et après laquelle j'ai eu besoin de faire une petite pause, pour réfléchir et choisir les bons mots.
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L'amour d'une mère pour ses filles et l'amour des filles pour leur mère. Quoi de plus normal ! Mais quand la normalité n'a plus cours, l'amour grandit désespérément " maman chérie que j'aime à la folie pour toute la vie - et pour l'éternité du monde entier ".
La première partie m'a mise mal à l'aise. Beaucoup trop loin de moi sur tous les plans. Mais la deuxième partie ( vue par la mère) m'a vraiment touchée.
Je lirai avec attention le prochain livre de Violaine Huisman.
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C'est l'histoire d'un amour fou. L'amour de deux filles pour leur maman que la vie a ravagée.
Ça, elle n'a pas eu de chance Catherine… C'était mal barré. Même avant sa naissance. Mais Catherine est une reine, alors elle se bat, tout le temps, elle lutte contre le destin, contre cette auto-destruction qu'elle a là, vrillée au corps. Catherine est diagnostiquée maniaco-dépressive puis internée parce que vraiment, rien ne va plus. Catherine enchaîne les extravagances, les folies, Catherine boit, Catherine fume comme un pompier, jure comme un charretier, Catherine se drogue aux médicaments, baise à tout va, n'importe qui, n'importe comment. Il n'y a plus de limites quand Catherine essaie d'oublier qui elle est. Juste une chose résiste à l'incendie : l'amour que Catherine porte à ses filles.
Et le papa dans tout ça ? Pas mal barré lui aussi. On ne peut pas dire qu'il soit absent. Pas totalement. Il a d'autres chats à fouetter, il fait partie de l'élite, un intellectuel, un entrepreneur. Alors il pare au plus urgent. Il paie. Il paie aussi pour le mal qu'il fait à Catherine en l'aimant complètement de travers. Un homme double, à deux visages.
Les deux petites filles font ce qu'elles peuvent pour survivre dans cette vie foutraque. Elles aiment leur maman. Passionnément.
C'est Violaine, la cadette qui raconte cette histoire pas totalement romanesque (ou pas du tout ?). D'abord en nous plongeant dans le quotidien de cette famille « hors normes » puis en cherchant, dans le passé de sa maman les racines du mal qui la ronge.
Une écriture rock n'roll, remarquable, différente, impressionnante et sans pathos.
Un livre fort, aussi éprouvant que passionnant.

Extrait d'un poème de Violaine à sa maman :
Maman, Maman,
Toi qui m'aimes tant,
Pourquoi partir sans prévenir ?
Car maintenant je vais souffrir
Souffrir de ne pas te voir revenir…
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Le titre est fabuleux même sans le comprendre. Puis on lit, on lit, et le titre devient encore plus beau, plus lumineux, il prend alors tout son sens. Comme l'histoire elle-même. Au début, on se retrouve happée par une écriture franche, sans pudeur, mise à nue, dévoilée, presque indécente. On est quelque peu gênée, qui est donc cette mère, si violente, si abrupte, si fantasque. On est mal à l'aise, on regarde de travers, on fronce les sourcils, se demandant le sens à tout cela. Puis on arrive tout en haut soudain, c'est-à-dire au milieu du livre et une autre histoire est racontée. Commence la chute. Lente, mais vertigineuse. L'auteur ne nous épargne pas, elle dit les choses, écrit, elle vomit presque ses mots, son histoire et SON histoire et nous retourne le coeur. La femme qu'on a jusqu'alors peut-être un peu détestée, nous paraît si attachante. C'est plus qu'un portrait de mère, c'est un portrait de femme. C'est un hymne à l'amour, un amour débordant, inconditionnel, sans limite, qu'on ne veut/peut pas quitter. J'ai tremblé, mon coeur s'est serré, mes yeux embués. Bouleversant.
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Une enfance malheureuse ou une enfance hors norme ? Pas facile de la vivre avec une telle maman ! Mais cette maman donne également à ses filles l'art du grandiose, du démesuré, et malheureusement du jusqu'au-boutisme dans la lente folie. Un enfant ne sort pas indemne d'un tel chaos, c'est certain.
Balancer sans cesse entre la prodigalité maternelle et l'angoisse de cette dernière.
Ce récit m' énormément touchée, peut-être parce que j'y' trouve quelque écho ....
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Il y a des histoires de famille qui vu de l'intérieur, peuvent avoir une résonance dramatique. Il y a des filles qui savent rendre un juste hommage à leur mère quand bien même cette dernière eût été maniaco-dépressive et totalement fantasque. Telle est la démarche de Violaine Huisman qui dédie son premier roman, à la mémoire de sa mère. Une femme fugitive face à cette vie qui ne la comprend pas, une femme reine pour ses filles et ceux qui l'aiment d'un amour inconditionnel. Une mère Fugitive parce que reine.

9 novembre 1989, le mur de Berlin s'écroule. Elsa a douze ans, Violaine en a dix. Ni l'une, ni l'autre ne comprend ce qui est en train de se jouer. Au même moment, c'est leur mère, Catherine, qui s'effondre. Maniaco-dépressive, elle est internée à Sainte-Anne. Les deux fillettes sont habituées. Leur mère a toujours été fantasque. Elle a toujours vacillé. Trop de souffrance, trop de folie, trop d'excès en tous genres. Mais tellement d'amour entre cette mère et ces deux petites filles. La première les aime à la folie, les secondes feront tout leur possible pour protéger cette femme fragilisée.

Violaine Huisman évoque sa mère à travers ses yeux d'enfant puis, c'est en adulte qu'elle s'efforce d'expliquer, de retracer la vie de cette femme excessive et extravagante. Elle raconte les crises qui succèdent aux folles déclarations d'amour et inversement. Elle raconte le parcours de vie d'un être non désiré à la santé fragile, élevé par une mère célibataire et distante. Un être qui finira par devenir une belle femme constamment en quête d'amour et de reconnaissance. Une femme qui multipliera les histoires d'amour, les expériences en tous genres, une femme insaisissable, hors du commun. Une femme qui deviendra mère. Une mère qui aimera ses deux filles à la folie et qui les embarquera dans le tourbillon de sa vie.

Fugitive parce que reine est une folle histoire d'Amour entre une mère et ses filles. Violaine Huisman explore ses sentiments sans pathos, sans concessions. le tout est drôle et tragique à la fois, élégant, dérangeant. L'écriture est juste, tantôt poétique et légère, tantôt violente et grave. Fugitive parce que reine est un premier roman parfaitement maîtrisé, bouleversant. Un premier roman à découvrir.

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