Monsieur Han

Un vieillard meurt. Dans le monde actuel, cela ne dérangera personne. D'ailleurs, personne ne le connait ce vieux. Il parait qu'il s'appelle Monsieur Han. Un solitaire, limite de la sociabilité, un penchant pour la boisson et l'ivresse qui suit, des insomnies fréquentes. En fait, ce Monsieur Han, c'est mon portrait dans quelques annnées… Sauf que ce Monsieur Han vit sous le 38ème parallèle après avoir été né au-dessus de ce même 38ème parallèle.

Entre le roman et le témoignage, Monsieur Han apporte la vérité ressentie par les habitants de la Corée sur cette coupure du 38ème parallèle. du jour au lendemain, une ligne « imaginaire » puis de barbelés vient déchirer l'âme d'un peuple. le Nord contre le Sud, les ennemis sont partout dans les deux camps : tout le monde devient suspect aux yeux des autres. Un gars du Nord dans le Sud devient un traître alors qu'hier, c'était simplement un compatriote coréen….

Premier roman de Hwang Sok-Yong que je lisais, il n'en fut pas moins marquant. de par sa noirceur et de par son actualité.

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Aujourd'hui, Monsieur Han est un vieil homme en piteux état, vivant seul et sans presque rien. Il ne parle à personne : ses voisins ne savent pas à qui ils ont affaire : un homme qui a vécu la guerre avec violence...

Sok-Yong Hwang est un écrivain relativement connu dans le milieu littéraire et international, notamment pour son histoire de réfugié politique, de prisonnier revendicateur et ses romans qui sont très souvent proches de l'autobiographie dans une Corée déchirée. Monsieur Han ne déroge pas à la règle, en narrant le parcours plein d'abnégation du médecin nord-coréen Han qui tente de sauver sa peau en passant dans le Sud en pleine guerre de Corée.
Si le fond historique est extrêmement intéressant, dépeignant les mouvements des populations à cette époque gravissime et impliquant tous les enjeux géo-politiques mêlant également l'ancien colonisateur japonais, l'auteur nous laisse un récit fictif mais ô combien plausible non pas faible mais presque uniquement factuel. La construction est assez étrange, les évènements s'enchaînent souvent trop rapidement, sans réelle ellipse narrative claire. On pense notamment au moment où Han décide de passer au Sud pour quelques jours, le temps de se mettre à l'abri, et qu'on retrouve un an plus tard toujours là-bas sans plus d'explication, là où la logique viendrait expliquer qu'entre temps, les frontières n'ont pas arrêté de bouger et que surtout la situation ne s'est pas améliorée.
De plus, comment compatir au destin de ce personnage plus naïf qu'autre chose ? Si Han démontre une vraie déontologie médicale, il prend toutefois sans vraiment en avoir l'air conscient des risques certains répétés par rapport au contexte local. Là où tout le monde tente de sauver sa peau par tous les moyens possibles et imaginables, lui défie les hautes autorités qui ont le pouvoir, en toute impunité, de terrasser tout un chacun sous couvert de lois à la fois obscures et paranoïaques. Et pourtant, même si on pourrait saluer cette façon de militer face au danger ou à l'injustice, on ne peut s'empêcher de ressentir le personnage comme trop naïf, alors même qu'il manque de profondeur.
Malgré la renommée de cet auteur qui traite majoritairement de la tragédie Nord/Sud de son pays, on a l'occasion de mieux cerner cette terrible dualité et ses monstrueux résultats avec d'autres récits.
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