Au début de ce roman, on fait connaissance avec Bach, le personnage principal, un homme qui aime la solitude et la nature. Il est craintif, angoissé, bégaie même.
Bach est instituteur. Il vit à Gnadenthal, sur la rive gauche de la Volga, entre Samara et Volgograd, entouré de paysans Kirghizes, qui lui paraissent bien austères.
«
Les Enfants de la Volga » est un récit très romanesque, mais qui se réfère à l'Histoire.
Dès la 2e moitié du XVIIIe siècle, sur l'invitation de la tzarine
Catherine II, beaucoup d'allemands sont venus coloniser les environs de l'actuelle ville de Saratov, pour cultiver les rives de la Volga. Ils ont conservé leur langue et leur culture jusqu'au milieu du XXe siècle.
Ainsi, tout comme Jacob Bach, nombre d'habitants de Gnadenthal sont allemands.
Un jour, Bach reçoit une lettre lui demandant de se rendre à un RDV… Intrigué et curieux, il décide d'y aller… l'adresse est celle d'un fermier, Udo Grimm, un personnage très bourru et autoritaire.
Il a appelé Bach, pour qu'il donne des cours privés d'allemand à sa fille Klara, qu'il qualifie de « gourde » !
Klara est une jeune fille de 17 ans, très timide, privée de l'affection maternelle et souffrant de l'étouffante autorité paternelle.
Il s'avère que Jacob Bach va devoir dispenser ses cours d'allemand sans voir Klara, qui se trouve cachée derrière un paravent, selon l'exigence de son père !
« Privé de la possibilité d'observer son visage,
il se concentrait sur sa voix – douce, grêle, souvent tremblante … »
Enseignant et élève sont aussi sensibles et vulnérables l'un que l'autre.
Généralement, en société, Jacob Bach « rentrait en lui-même – comme une tortue rentre sa tête et ses pattes sous sa solide carapace – pour éviter d'être offensé par quelque maladroit.
A présent, il se retrouvait contraint de jouer le rôle
inverse : écouter attentivement les plus petites nuances dans l'intonation de Klara, pour détecter à temps les premiers signes de désarroi ou de tristesse ; réfléchir longuement à la question qu'il allait poser, puisant dans toutes ses ressources de tact et de douceur innée. »
On est tenus en haleine.
On aimerait savoir si Bach et Klara pourront se voir.
Bach imagine Klara de plein de façons.
Est-elle jolie, laide, aveugle, ou mutilée ?
En tout cas, la voix de son élève l'envoûte…
Klara écrit au crayon sur un livre de
Goethe que lui passe Bach par-dessous le paravent…
Elle pose ainsi discrètement des questions à son professeur…
Puis un jour, au début de l'année scolaire, voici Klara qui se présente elle-même à la porte du logement de Bach !
Elle lui raconte comment elle s'est échappée de la maison familiale…
Elle veut Bach pour mari ! Mais elle est encore bien jeune et n'a aucun document à fournir, et de ce fait, ils ne peuvent être mariés…
Les villageois de Gnadenthal ont des regards réprobateurs à leur encontre… Les rumeurs et commérages vont bon train… Ils deviennent un peu victimes d'ostracisme.
Klara et Bach décident de quitter Gnadenthal.
Ils traversent la Volga pour retourner à la ferme de Udo Grimm, qui est inhabitée maintenant, car le père de Klara est parti vivre en Allemagne…
C'est la guerre, et le village s'est vidé progressivement de ses habitants…
Bientôt, Klara va être enceinte, mais pas de Bach !
Mais pour Bach, le plus important, c'est que Klara soit heureuse; elle qui semblait être infertile, aura une fille, Anntche, que seul, bientôt, Bach devra élever tant bien que mal…
Je n'en dévoilerai pas davantage.
Tout ce début de roman est admirablement écrit de façon très sensible et poétique.
«
Les Enfants de la Volga » est un roman fleuve de près de 500 pages.
Beaucoup de personnages, d'événements et de péripéties interviennent dans le récit.
Un jour, des traineaux décorés jaillissent sur la Volga, prise par les glaces et se rapprochent de Bach… Ce sont des colons ivres qui lui annoncent qu'il doit se réjouir !
On est le 6 janvier 1924.
La République soviétique des Allemands de la Volga vient d'être crée par
Vladimir Ilitch Lénine.
Lénine avait une passion pour l'Allemagne. Il imaginait une révolution mondiale pour pouvoir diriger la révolution socialiste dans la lointaine Allemagne. Des communistes dévoués parmi les colons de la Volga furent secrètement envoyés sur les rives du Rhin avec pour objectif de détruire le régime impérialiste de l'intérieur. Et pour lutter contre l'émigration des colons de la Volga, la décision fut prise de donner l'autonomie aux Allemands soviétiques.
Mais avec la mort de
Lénine, la pérennité de la République soviétique des Allemands va être remise en question par Staline !
Le récit raconte comment les Allemands de la Volga ont souffert des réquisitions de céréales et de bétail, comment ils ont souffert de la famine, provoquant ainsi la fuite de nombreux habitants.
Il nous relate aussi les nombreuses répressions qui culminèrent avec les purges staliniennes !
Joseph Staline, 2 mois après l'invasion allemande en U.R.S.S. ordonna la déportation massive vers la Sibérie et le Kazakhstan, de tous les Allemands de la Volga, craignant que les Allemands locaux ne s'allient avec l'armée nazie !
La Volga tient une place très importante dans ce roman.
Elle est d'une beauté trompeuse, qui cache une immense laideur. C'est un fleuve gorgé de mort.
Bach découvrira que son fond est couvert de cadavres...
Après la guerre, les Allemands ne sont jamais rentrés sur leurs terres près de Saratov.
Les noms des villages ont été russifiés et aujourd'hui, seules quelques églises protestantes peuvent encore attester de leur histoire.
L'impératrice
Catherine II, dans son discours, appelait
« mes enfants », les colons qu'elle avait fait venir d'Allemagne.
C'est la raison précise du choix du titre de ce livre.
Dans ce roman fleuve, amour, mélancolie, tristesse, courage, s'entremêlent avec l'Histoire.
Et dans l'épilogue, on apprend ce que sont devenus tous les personnages principaux de ce récit.
Bien que j'aie trouvé ce roman intéressant, je ne lui ai attribué que 3 étoiles et 1/2, car de nombreuses descriptions et énumérations m'ont paru parfois interminables, trop copieuses, alourdissant un récit déjà bien touffu.