Citations sur Dedans ce sont des loups (66)
Par-dessus, elle ajouta un sourire à corrompre une douzaine de paradis, leurs anges respectifs et leurs clients.
Puis, parce que les hommes sont décidément incapables de reconnaître leur impuissance, ou de reconnaître qu’il puisse exister un ordre qui leur échappe, ils avaient fait du loup un fantôme.
Encaisser aussi, parce que le dernier debout affrontait le vieux. C’était sa fierté, au paternel, que ses gosses sachent que la vie était une chienne dépourvue de tendresse et de compassion. Il se glorifiait d’agir ainsi pour que ses fils soient prêts à affronter l’avenir qui, à ce qu’il prétendait, serait pire que le quotidien.
Tentant de s’en éloigner, il reproduisait, sans en avoir conscience, le schéma de son enfance. Le comportement du paternel et de la fratrie dans laquelle il avait grandi. Pour obtenir l’attention du chef de famille, il fallait écraser chacun des frères. Il était le cadet et aucun des autres n’aurait laissé sa place au plus petit. Alors se battre. Alors la prendre de force. Alors ne pas pleurer, même si roué de coups. Alors ruminer, freiner son impatience en attendant que les années passent, en attendant que la vie développe ce corps d’enfant, d’adolescent, et cogner de plus en plus dur.
— Tu décroches pas ton pas de mes bottes. Tu t’éloignes pas à moins d’un demi-mètre.
— Bien, chef.
— Tu me colles, compris ?
— C’est une proposition ? Parce que si c’en est une…
— Je plaisante pas, Sarah, y a plus de timbrés au Terminus que tu pourras jamais en croiser en une vie entière, même si tu turbinais nuit et jour dans un asile psychiatrique.
— Nats, tu devrais redescendre sur terre et cesser de regarder en l’air. D’une part, tu risques un torticolis, et d’autre part, à moins d’un miracle, il y a peu de chances que, d’ici, tu puisses voir sa petite culotte.
Il avait précisé que la seule façon d'aider son prochain était de lui permettre de subsister pour entreprendre, non de lui offrir sa pitance.
C'était sa fierté, au paternel, que ses gosses sachent que la vie était une chienne dépourvue de tendresse et de compassion.
D’aucuns, disaient connaître celui qui nommait le contremaître, le patron, le grand patron, mais en vérité ces affirmations tenaient davantage d’allégations d’ivrognes et elles ne s’appuyaient sur aucune réalité tangible.
Cependant, ce que tous savaient était que le contremaître recevait ses ordres par un seul canal : le téléphone. Ainsi, le Terminus possédait deux appareils de ce type, l’un placé derrière le comptoir, que le personnel avait à disposition pour passer commande, appeler une famille lorsqu’il en avait encore une, et un autre se trouvant dans la salle attenante. Ce dernier était accroché au mur, sonnait rarement et seulement en trois occasions. La première pour ordonner une extradition ou une mise à mort. La deuxième pour signaler la cessation d’activité de l’une des filles et l’arrivée de sa remplaçante. Et la troisième pour prévenir que le percepteur allait passer tel jour, telle heure. Dans ce dernier cas, un homme encostumé de gris se pointait, jamais le même, au jour et à l’heure dite. Il vérifiait les comptes en compagnie du contremaître et, après avoir prélevé sa part, il entassait les bénéfices dans deux cantines que le personnel chargeait, sanglait sur le plateau d’un pick-up, qui reprenait la route en direction de la ville.
L'équilibre de la meute est fragile, et si l'un des individus qui la composent enfreint les règles, il met en péril la survie de tous. Si un chien venait à s'y introduire, un seul, se faisant passer pour un loup, et qu'il fasse ce que sait faire un chien, dormir sans chasser, manger sans partager, vivre pour lui seul et prendre la part des autres,la meute serait à ce point affaiblie qu'elle serait dans l'incapacité de se reproduire et l'espèce disparaîtrait.