Je peux compter sur les doigts d'une main de manchot le nombre de livres qui m'ont attirée dès la première ligne ; et ceux qui m'ont captivée à chacune des lignes suivantes sont encore moins nombreux ! Bref « La trilogie berlinoise », pavé de 1015 pages que j'ai (enfin) abordé sur l'insistance d'une personne de mon entourage, est une totale réussite… Je vais essayer de développer, ayant néanmoins conscience que l'essentiel a été dit dans les critiques déjà mises en ligne sur ce site ; positives, voire dithyrambiques, à 94%.
L'auteur, pour commencer : j'aurais juré qu'il était allemand, ou tout au moins, quelqu'un ayant beaucoup vécu à Berlin tant ce qu'il décrit lors des déambulations de Bernie dans cette ville sent le réel, le vécu. Mais il est britannique et aucune de ses biographies lues ici ou là ne mentionne de séjour plus ou moins long dans cette ville… On peut être expert en recherches documentaires mais il faut beaucoup de talent pour rendre le résultat aussi vivant et réel… « un écrivain qui cherche à combiner romanesque haletant et rigueur historique » (Le Monde)
La trame du livre est basée sur un postulat de l'auteur : « à quoi aurait été confronté le détective Philip Marlowe si
Raymond Chandler avait vécu, non aux Etats-Unis dans les années 1930, mais en Allemagne à la même époque ? » (Le Monde)… Philip Marlowe, ce détective désabusé évoluant dans une société corrompue, a été parfaitement transposé par
Philip Kerr dans le personnage de Bernie (Bernhard Gunther) ; un Bernie intelligent et intuitif, sensible au(x) charme(s) féminin(s), et qui essaie de préserver son intégrité morale dans une situation qui se dégrade… un personnage à « l'idéalisme terni ». Là encore, une totale réussite, un personnage auquel on s'attache dès les premières lignes, avec lequel on doute, on souffre, on ironise, on cherche, on trouve… bref, avec lequel on vit intensément.
Philip Kerr a brossé la fresque romanesque la plus documentée et glaçante de la vie quotidienne sous Hitler et dans l'immédiat après-guerre » a écrit le Monde dans son article nécrologique consacré à l'auteur. Plongez-vous sans attendre dans cette fresque … vous ne le regretterez pas un seul instant, foi de lectrice pavéphobe.